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Demande de partage des frais d’interprètes en langue des signes

Le 2 avril 2024

 

PAR ME MYLÈNE LAFRENIÈRE ABEL

 

Les frais d’interprète en langue des signes doivent-ils être supportés en parts égales par le syndicat et l’employeur?

 

Dans l’affaire Association internationale des machinistes et des travailleurs et travailleuses de l’aérospatiale (AIMTA) et Air Canada, 2024 QCTA 91 (a. Maureen Flynn – 29 février 2024 – disponible sur SOQUIJ), l’arbitre devait se prononcer sur une demande de partage des frais d’interprètes en langue des signes. Le plaignant est atteint de surdité. Le syndicat a démontré qu’il a besoin de l’assistance d’un interprète des langues de signes pour bien comprendre une discussion ou pour se faire comprendre.

Selon le syndicat, en raison du droit à une audience juste et équitable et du handicap du plaignant, les frais d’interprète constituent des dépenses de l’arbitre de griefs et doivent être assumés à parts égales par les parties. Le syndicat invoque l’article 14 de la Charte canadienne des droits et libertés (ci-après, la « Charte »), qui vise à protéger notamment toute personne malentendante appelée comme partie ou témoin devant un tribunal et qui ne peut suivre les procédures en raison de son handicap, ainsi que l’article 15(1) de la Charte, qui protège l’égalité de bénéfice.

Quant à l’employeur, il plaide que les services d’interprète relèvent des frais de préparation et de présentation à l’arbitrage devant être assumés par chaque partie. Il ajoute qu’en l’espèce, puisque l’arbitrage est conduit d’une manière accélérée, la preuve est essentiellement constituée de déclarations écrites par les témoins. Ainsi, le plaignant ne sera pas contre-interrogé sur sa déclaration.

Le tribunal souligne que l’arbitre de griefs doit assurer un processus d’arbitrage juste et équitable, dans le respect des règles de justice naturelle, dont celle de l’audi alteram partern. Ce dernier doit également assurer une application non discriminatoire de cette règle fondamentale. Selon l’arbitre, le droit à l’assistance d’un interprète pour un malentendant impliqué comme partie à un processus judiciaire ou quasi judiciaire ne se limite pas à la période où le plaignant témoigne ou est contre-interrogé. Il convient d’interpréter d’une manière large et libérale ce droit.

Le tribunal est d’avis que le plaignant doit être en mesure de comprendre ce qui se dit au cours de l’audience ou au cours de la médiation qui précède l’arbitrage. Tel que l’écrit l’arbitre : « [p]river le plaignant d’une assistance d’un interprète au cours du processus d’arbitrage équivaudrait à l’exclure de l’audience de sa propre cause » (paragraphe 23).

Dans le contexte de ce dossier, l’arbitre conclut que les frais nécessaires à une bonne communication constituent des dépenses de l’arbitre et doivent être assumées à parts égales.

La demande syndicale est accueillie.