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Litige entre l'Association des pompiers de Montréal et la Ville de Montréal sur la notion d' "avantage". Est-ce que la Loi 15 diminue un "avantage" prévu au Régime de retraite ?

Association des pompiers de Montréal Inc. c Montréal (Ville), 2018 CanLII 7412 (QC SAT)
https://www.canlii.org/fr/qc/qcsat/doc/2018/2018canlii7412/2018canlii7412.html?searchUrlHash=AAAAAQAMwqtwb2xpY2llcsK7AAAAAAE&resultIndex=11

Une décision récente a été rendue concernant un litige qui oppose la Ville de Montréal et l’Association des pompiers de Montréal.

Le litige porte sur l’étendue d’une clause de protection prévue à la convention collective en en relation avec la Loi favorisant la santé financière et la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal (ci-après la « Loi 15 »).

Effectivement, la convention collective qui lie l’Association et la Ville stipule :

« 40.02   La Ville maintient également en vigueur le régime de retraite des employés pompiers de la Ville de Montréal (Règlement 94-056).

Dans l’éventualité où une loi, un règlement ou une règle administrative en découlant diminuerait les avantages dont bénéficient les employés pompiers en vertu de ce régime de retraite, une évaluation actuarielle sera effectuée afin de déterminer la valeur de telle diminution et, de là, des réaménagements des bénéfices et/ou véhicules autres que le régime de retraite seront déterminés. Tout réaménagement sera décidé conjointement avec l’Association. »

La Loi 15 limite, dans le cas des pompiers, à 20% la « cotisation d’exercice ».   Cette cotisation d’exercice s’établissait, au 31 décembre 2013, à 23,8 % de la masse salariale des participants actifs. Cette diminution du niveau de financement du Régime devait nécessairement entraîner la coupure ou la réduction de certains des bénéfices.

Les parties, pour satisfaire au plafond de contributions imposé par la Loi, conviennent de plusieurs mesures importantes, dont un report de l’âge normal de la retraite et une réduction du taux d’indexation des prestations viagères, pour ne mentionner que celles-là. La valeur totale de ces réductions de bénéfices représente environ 3,8% de la masse salariale des participants actifs. En mai 2017, les parties s’entendent pour reconnaître que ces modifications représentent une diminution des « avantages » qu’offrait le Régime, laquelle diminution doit être compensée comme le prévoit l’article 40.02.

Un litige subsiste toujours quant à l’impact de deux autres changements majeurs imposés par la Loi 15 et qui sont au cœur du présent litige. Il s’agit de la parité des contributions au financement du Régime ainsi que la création et le financement d’un fonds de stabilisation.

L’Association soutient que cette augmentation de la contribution des pompiers constitue une « diminution [d’] avantages dont [ils] bénéficient » et qu’elle devrait être compensée tel que le prévoit la convention collective.

Que signifie un avantage au sens de l’article 40.02 ? Telle est l’essence du litige.

Il ne fait aucun doute que, dans le sens commun du terme, un régime de retraite constitue un avantage, tout comme le fait qu’il soit à prestations déterminées. Il en va de même du niveau de contribution de l’employeur à ce régime.

Ce qui est visé à l’article 40.02, ce sont « les avantages dont bénéficient les employés pompiers en vertu de ce régime ».

On dit bien qu’il s’agit d’avantages dont ils « bénéficient […] en vertu de ce régime », ce qui laisse entendre que la protection découle du Régime lui-même et invite à en examiner le contenu pour déterminer ce qui constitue un avantage ou un bénéfice, un terme qui y est manifestement apparenté.

Le fait d’avoir un régime de retraite, qu’il soit à prestations déterminées et que l’employeur se soit engagé à en financer les bénéfices convenus entre les parties dans une proportion plus importante que les pompiers constituent un avantage. Il est la résultante des négociations pour la conclusion de la convention collective et se traduit, dans celle-ci, par l’engagement de la Ville de « maintenir » le Régime. On pourrait donc affirmer que le Régime dans son existence, le niveau des prestations qu’il doit offrir, les conditions d’admissibilité et son mode de financement constituent un avantage, un engagement que l’employeur est tenu de respecter en raison de la force obligatoire du contrat collectif entre les parties.

Mais le texte de l’article 40.02 qui prévoit une compensation pour faire suite à la modification du Régime, par un tiers faut-il le préciser, protège non pas l’avantage dont le pompier bénéficie « en vertu de la convention collective », ce qui aurait pu permettre l’interprétation large que plaidée par l’Association, mais un avantage « en vertu du Régime », ce qui a une portée plus restreinte.

Selon l’arbitre Côté, l’augmentation de la contribution des pompiers n,est pas un avantage découlant du régime. Il s’agit d’un avantage découlant de la convention collective. Ainsi, l’augmentation de la contribution des pompiers et la diminution corollaire de la part de la Ville au financement du Régime ne sont pas une matière visée par la disposition invoquée au soutien du grief, bien qu’elle puisse constituer une diminution d’avantages au sens de la convention collective elle-même. Cela étant, il appartiendra aux parties de décider lors du renouvellement de la convention collective, le cas échéant, si, dans quelle mesure et de quelle manière les salariés obtiendront une compensation pour cette perte d’avantages.

Grief rejeté.