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Veille juridique du 12 avril 2022

SECTION DROIT DU TRAVAIL 

GÉNÉRAL

 

Teamster Québec, local 1999 c. Poulin, 500-17-111468-206, décision rendue le 1er décembre 2021

Disponible ici.

Le syndicat se pourvoit en contrôle judiciaire devant la Cour supérieure du Québec à l’encontre de la décision arbitrale rendue le 30 décembre 2019 par le défendeur. Dans cette décision, l’arbitre rendait un jugement déclaratoire et précisait la catégorie de salariés assujettie à l’article 41.1 de la Loi sur les normes du travail (ci-après la « Loi »). Le grief en cause prétendait que la convention collective établissait une disparité de traitement au sens de la nouvelle version de l’article 41.1 de la Loi, amendée le 1er janvier 2019, relativement au traitement salarial de trois groupes de salariés travaillant pour l’employeur.

41.1 Un employeur ne peut accorder à un salarié un taux de salaire inférieur à celui consenti à ses autres salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le même établissement uniquement en raison de son statut d’emploi, notamment parce qu’il travaille habituellement moins d’heures par semaine.

Les trois groupes de salariés en cause sont ceux définis dans la convention collective comme étant les salariés de type « Remplaçants plus » (ayant accumulé plus de 2080 heures de travail), les « Remplaçants moins » (ayant accumulé moins de 2080 heures de travail) et les salariés « Occasionnels » (employé saisonnier ou embauché temporairement pour une période de six mois ou moins). L’arbitre conclut que seule la catégorie de salariés Remplaçants plus est visée par l’article 41.1 de la Loi. La convention collective contrevient à la Loi en raison du taux inférieur accordé aux Remplaçants plus alors qu’il s’agit de salariés ayant acquis le nombre d’heures requises pour devenir un salarié régulier. Cette imposition permanente d’un taux inférieur est interdite parce que fondée uniquement sur le statut. Le syndicat est en désaccord et prétend que cette conclusion vaut pour les trois catégories de salariés.

La Cour constate que, bien que succinct, le raisonnement de l’arbitre fait partie des issues possibles et raisonnables au regard de la preuve présentée. La différence salariale s’explique par l’écart au niveau des compétences et qualifications. En effet, la preuve au dossier, majoritairement constituée d’admissions, démontre que le taux de salaire des Remplaçants moins diffère de celui versé aux salariés réguliers, non pas uniquement en raison de leur statut, mais parce qu’ils possèdent moins d’ancienneté, moins d’heures travaillées et moins d’habiletés. Également, pour les Occasionnels, les admissions établissent que toute personne nouvellement embauchée est un salarié occasionnel pendant une période de six mois durant laquelle il doit suivre plusieurs heures de formation afin d’acquérir des habiletés et compétences. Pour la Cour, leur taux de salaire inférieur s’explique donc par le manque d’expérience, de qualifications, d’habiletés et de compétence comparativement aux salariés réguliers.

Le pourvoi en contrôle judiciaire est rejeté.

 

 

Preure et Centre de services scolaire de Montréal, 2022 QCTAT 253

https://canlii.ca/t/jlzj0

La travailleuse est une enseignante en arts plastiques dans une école primaire sous la responsabilité du Centre de services scolaire de Montréal. En mars 2019, un incident survient entre la travailleuse et un élève alors que ce dernier lui profère des insultes. Une technicienne en éducation spécialisée rencontre l’élève et lui impose une retenue à l’intérieur de l’école à titre de sanction. Or, la travailleuse est en désaccord avec la nature de la sanction et des discussions ont lieu entre la technicienne et la travailleuse. Ces échanges s’enveniment et le ton monte.

Par la suite, la travailleuse dépose une réclamation à la CNESST dans laquelle elle allègue avoir subi une lésion professionnelle en lien avec le ton et l’attitude de la technicienne et dont le diagnostic est un trouble de l’adaptation avec humeur anxio-dépressive. Pour sa part, l’employeur considère que la condition de la travailleuse relève purement de sa perception subjective de l’événement.

Dans son analyse, le Tribunal rappelle que la jurisprudence sur la notion d’événement imprévu et soudain exige la survenance de faits, circonstances ou d’un événement qui, objectivement, possède un caractère traumatisant. Or, de l’avis du Tribunal, l’exigence d’une telle preuve dénature la notion et fait reposer sur le travailleur un fardeau de preuve plus élevé que celui de la prépondérance des probabilités. En matière de lésion psychologique, les éléments factuels, en raison de la nature difficilement objectivable, comportent une part de subjectivité et c’est au tribunal d’effectuer un exercice de pondération entre l’appréciation des faits et la perception subjective que peut en avoir le travailleur.

Le Tribunal conclut qu’il y a absence d’une preuve de circonstances assimilables à un événement imprévu et soudain et que, par conséquent, la travailleuse n’a pas subi de lésion professionnelle. Les discussions entre la travailleuse et la technicienne ont été de courte durée et portaient sur un désaccord quant à la nature de la sanction à imposer à un élève. En ce sens, un conflit entre collègues qui engendre des échanges « musclés » ne rencontre pas l’exigence de l’événement imprévu et soudain en l’absence de paroles, gestes ou comportements déraisonnables, abusifs, vexatoires ou violents.

La contestation est rejetée.

 

 

Syndicat des professionnelles et professionnels de l’éducation du Saguenay et Centre de services scolaire de la Jonquière, 2022 QCTA 106

https://soquij.qc.ca/portail/recherchejuridique/ConsulterExtExpress/0BD902D139D86029B165406EB4DFDD5B?source=EXPTRAV

Dans ce dossier, le syndicat conteste la fin de la période de probation de la plaignante. À l’audience, le syndicat soulève une objection préliminaire quant à la compétence de l’arbitre au motif qu’une transaction était intervenue entre les parties afin de prolonger la période de probation. Pour l’employeur, aucune transaction n’a été conclue puisqu’en vertu de la Loi sur l’instruction publique, seule la directrice des ressources humaines détenait l’autorité nécessaire pour lier l’employeur. Ainsi, le coordonnateur n’avait pas le pouvoir pour obliger l’employeur et contracter en son nom. La transaction alléguée est donc nulle, de nullité absolue.

En vertu du Règlement de délégation de pouvoirs de Centre de services scolaire de la Jonquière, seule la directrice des ressources humaines détient l’autorité pour lier contractuellement l’employeur en matière d’engagement, d’affectation du personnel professionnel, enseignant et de soutien et y mettre fin à l’emploi. Toutefois, l’arbitre retient de la preuve que la directrice avait approuvé les termes de l’entente et que le coordonnateur agissait uniquement comme courroie de transmission. L’offre de prolonger la période de probation a été soumise au syndicat par le coordonnateur, mais à l’initiative de la directrice. Le coordonnateur agissait en tout temps pour et au nom de la directrice.

Le second argument de l’employeur voulant qu’il avait retiré l’offre de contracter avant son acceptation par le syndicat est également rejeté. L’arbitre conclut que le syndicat a accepté l’offre le 8 juillet 2021, à 11h07, et que le retrait de l’offre de contracter par l’employeur est survenu a posteriori la même journée. Le Tribunal constate qu’une transaction est effectivement intervenue entre les parties.

L’objection préliminaire à l’arbitrabilité du grief est accueillie.

 

 

Syndicat québécois des employées et employés de service, section locale 298 (FTQ) et Terrasses Versailles (griefs individuels), 2022 QCTA 121

https://soquij.qc.ca/portail/recherchejuridique/ConsulterExtExpress/BBDBDB8EBD3D131FC5F0DD164C8AD351?source=EXPTRAV

Le syndicat dépose neuf griefs individuels contre l’employeur, une résidence pour personnes âgées, afin de contester les fins d’emploi des plaignantes qui occupent des postes de préposées aux bénéficiaires à temps partiel. En raison de signalements quant à des lacunes dans leur travail, les plaignantes doivent suivre la formation prévue à la Loi modifiant le Code des professions et d’autres dispositions législatives dans le domaine de la santé. Or, les plaignantes échouent la formation et l’employeur met fin à leur emploi au motif qu’il s’agit d’une condition essentielle pour occuper le poste. Pour sa part, le syndicat prétend que les critères applicables en matière de congédiement administratif, énoncés par la Cour d’appel du Québec dans l’arrêt Costco, n’ont pas été respectés notamment parce que l’employeur a omis d’avertir les plaignantes du risque de fin d’emploi en cas d’échec.

Aux fins de son analyse, l’arbitre rappelle les critères de l’arrêt Costco auxquels doit répondre un employeur avant de mettre fin à l’emploi d’un employé incapable d’accomplir ses tâches. Ces critères sont : 1) l’employé doit connaître les politiques de l’entreprise et les attentes fixées par l’employeur à son égard ; 2) les lacunes dans son travail lui ont été signalées ; 3) l’employé a obtenu le support nécessaire pour se corriger et atteindre ses objectifs ; 4) l’employé a bénéficié d’un délai raisonnable pour s’ajuster ; 5) l’employé a été prévenu du risque de congédiement à défaut d’amélioration.

L’arbitre retient deux éléments prépondérants pour conclure au non-respect de ces critères. D’abord, quant au délai raisonnable offert aux plaignantes pour s’ajuster, l’employeur avait lui-même fixé à six mois le délai pour reprendre la formation. Pourtant, le congédiement survient trois mois avant l’expiration de ce délai. Ensuite, la preuve démontre qu’il existait une ambiguïté quant aux attentes de l’employeur relativement à la réussite de la formation. Les plaignantes n’ont pas été avisées clairement que l’échec pouvait entraîner leur congédiement. Pour l’arbitre, le défaut de le mentionner est fatal.

Les griefs sont partiellement accueillis. Les plaignantes ont trois mois pour compléter et réussir la formation.

 

 


 

POLICIERS ET POLICIÈRES

 

Rien à signaler.

 


 

TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER

 

Rien à signaler.

 

 


 

POMPIERS ET POMPIÈRES

 

Rien à signaler.

 


 

ARTISTES

 

Alliance internationale des employés de scène de théâtre et de cinéma des États-Unis et du Canada (IATSE), section locale 56 et Centre culturel de Joliette inc., 2021 QCTAT 5237 (CanLII)

https://canlii.ca/t/jk6q9

Le 2 août 2021, le syndicat dépose une requête en accréditation en vertu de l’article 25 du Code du travail afin de représenter les salariés occupant les fonctions de techniciens de scène chez l’employeur, un diffuseur de spectacles en arts de la scène qui gère la salle Rolland-Brunelle. La requête est déposée en champ libre et les parties sont d’accord sur le libellé de l’unité de négociation recherchée. Toutefois, un désaccord existe quant à l’inclusion ou non de certaines personnes dans la liste des salariés visés. Le syndicat demande que neuf salariés soient retirés de la liste et qu’un y soit ajouté.

Le 12 mars 2020, l’employeur suspend temporairement ses activités en raison de la pandémie. Initialement, l’employeur offre aux employés réguliers une garantie de trente heures de travail par semaine pour suivre de la formation et s’assurer de l’entretien d’équipements. Ensuite, un projet majeur de rénovation de la salle Rolland-Brunelle débute et certains employés sont mis à contribution durant les mois de mars et avril 2021. Finalement, la salle Rolland-Brunelle demeure fermée jusqu’à la fin des rénovations prévue pour le mois de janvier 2022.

Le Tribunal procède à l’analyse de la liste des salariés visés par la requête en accréditation au sens de l’article 36.1 du Code du travail. La liste des salariés doit inclure le nom des salariés qui sont au travail le jour du dépôt de la requête ou qui sont en réalité prochaine de retour au travail. La notion de réalité prochaine de retour au travail, précisée par la jurisprudence, vise à déterminer l’inclusion ou non de salariés qui sont en situation de mise à pied ou qui bénéficient d’un droit de rappel. L’objectif étant celui d’avoir un aperçu réel de toutes les personnes à l’emploi sans bonifier artificiellement la liste.

Néanmoins, la prétention de l’employeur selon laquelle la liste de salariés visés doit refléter la situation qui existait juste avant le moment de la fermeture de la salle, au mois de mars 2020, est rejetée. Pour le Tribunal, bien qu’il faille tenir compte des effets de la pandémie sur les activités de l’employeur, il ne peut faire abstraction des conséquences des rénovations majeures effectuées. Ainsi, selon la régularité des prestations de travail fournies par les salariés entre les mois précédant la fermeture de la salle et le jour du dépôt de la requête en accréditation, seulement trois personnes concernées par le désaccord doivent apparaître sur la liste des salariés visés.

Le syndicat est accrédité.

 

 


 

SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

 

R. c. Stairs, 2022 CSC 11

https://canlii.ca/t/jnl5x

Dans cet arrêt, les policiers répondaient à un appel 911 d’un citoyen ayant aperçu un homme frapper une femme dans une voiture. Après avoir localisé la voiture dans l’entrée d’une résidence, les policiers ont frappé à la porte, mais personne n’est venu répondre. Craignant pour la sécurité de la femme, ils sont entrés dans la maison. Une femme présentant des blessures récentes au visage est montée de l’escalier du sous-sol. Les policiers ont procédé à l’arrestation de l’accusé et ont effectué une inspection visuelle à des fins sécuritaires de la salle de séjour du sous‑sol, d’où venaient d’arriver l’accusé et la femme. Lors de l’inspection, ils ont aperçu un contenant transparent et un sac de plastique bien en vue renfermant de la méthamphétamine. L’accusé a été inculpé de possession d’une substance désignée en vue d’en faire le trafic, de voies de fait et de défaut de se conformer à une ordonnance de probation.

En vertu de la nouvelle norme, lorsque les policiers effectuent une fouille accessoire à l’arrestation dans une maison d’habitation, ils doivent avoir des soupçons raisonnables qu’une fouille des espaces se situant hors du contrôle physique de la personne arrêtée contribue à l’atteinte de l’objectif valable de sécurité du public et des policiers, y compris celle de l’accusé. De plus, la fouille ne doit pas être plus attentatoire que nécessaire pour écarter les soupçons raisonnables des policiers.

En parallèle de la norme des soupçons raisonnables, l’étendue acceptable d’une fouille représente une autre limite à la capacité des policiers de procéder à une fouille accessoire à l’arrestation dans une habitation. Elle limite les fouilles de deux façons : par la nature des préoccupations qui sous‑tendent l’arrestation, ainsi que par la nécessité qu’il y ait une proximité sur les plans temporel et spatial entre la fouille et l’arrestation. Tout comme le pouvoir d’effectuer une fouille accessoire à l’arrestation découle de l’arrestation elle‑même, une fouille ne peut se justifier que si son but est lié à celui de l’arrestation. Une arrestation qui ne donne lieu qu’à des préoccupations liées à la sécurité ne peut, sans plus, autoriser une fouille pour des questions non liées à la sécurité. Il doit y avoir un lien téléologique avec la nature de l’arrestation. Une fouille qui relève de ces paramètres doit aussi être à proximité de l’arrestation sur les plans spatial et temporel.

Plus particulièrement, lorsque l’espace du domicile visé par la fouille accessoire à l’arrestation est hors du contrôle physique de la personne arrêtée au moment de l’arrestation, la norme de common law relative aux fouilles accessoires à l’arrestation doit être modifiée de deux façons qui la rendent plus rigoureuse. D’abord, les policiers doivent avoir des raisons de soupçonner qu’il y a un risque pour leur sécurité ou celle de la personne arrêtée ou du public, qu’une fouille permettrait d’éviter. La norme des soupçons raisonnables est plus rigoureuse que la norme de common law relative aux fouilles accessoires à une arrestation. Les policiers ont besoin d’un ensemble de faits objectivement discernables appréciés à la lumière de toutes les circonstances donnant lieu au risque soupçonné. Les considérations suivantes pourraient être pertinentes : a) la nécessité d’une fouille; b) la nature du risque appréhendé; c) les conséquences potentielles de l’absence de prise de mesures de protection; d) l’existence d’autres mesures; et e) la probabilité que le risque envisagé existe réellement. De plus, lorsque le juge chargé de la révision évalue la conduite des policiers, il doit être conscient de l’instabilité et de l’incertitude auxquelles ceux‑ci font face — les policiers doivent s’attendre à l’inattendu.

Ensuite, les policiers doivent adapter soigneusement les fouilles qu’ils effectuent dans un domicile accessoirement à une arrestation aux intérêts accrus en matière de respect de la vie privée qui s’y rattachent. Le pouvoir de procéder à une fouille accessoire à l’arrestation permet seulement aux policiers de le faire dans l’espace environnant l’arrestation. La nature de la fouille doit être adaptée à son objectif précis, aux circonstances de l’arrestation et à la nature de l’infraction. La fouille ne devrait pas être plus attentatoire que nécessaire pour écarter les soupçons raisonnables des policiers.

En l’espèce, la fouille dans la salle de séjour effectuée accessoirement à l’arrestation ne violait pas le droit que l’art. 8 de la Charte garantie à l’accusé, et les éléments de preuve trouvés lors de la fouille dans la salle de séjour ont donc été dûment admis au procès.

L’appel est rejeté.