PAR ME ÉMILE B. DENAULT ET ME LYLIA BENABID
SECTION DROIT DU TRAVAIL
GÉNÉRAL
Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail c. 9187-3992 Québec inc., 2023 QCCQ 7096.
Décision disponible ici : <https://canlii.ca/t/k104m>
Dans cette décision, la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail allègue, au nom du travailleur, que l’employeur a fait défaut de lui payer les sommes auxquelles il a droit à la suite de l’envoi de son avis de cessation d’emploi.
L’employeur invoque plutôt que la terminaison de l’emploi du travailleur résulte d’un cas de force majeure en lien avec la pandémie de la COVID-19 et que conséquemment, il est exempté de l’obligation de transmettre un avis de cessation d’emploi. Il s’appuie alors sur l’article 82.1(4) de la Loi sur les normes du travail.
Le Tribunal doit déterminer si la pandémie de la COVID-19 constitue un cas de force majeure au sens de l’article ci-haut mentionné.
Le Tribunal conclut que la cessation d’emploi du travailleur ne résulte pas d’un cas de force majeure, mais plutôt d’une décision commerciale de l’employeur dans un contexte économique difficile. En effet, l’employeur a pris des décisions, à son entière discrétion, dans un contexte de gestion de l’entreprise à effectif réduit. Ces décisions ne résultent pas d’un cas de force majeure. Les effets de la COVID-19 sur l’entreprise ont certes nui aux activités commerciales de l’entreprise, mais elles n’ont pas été rendues impossibles de manière absolue et permanente.
La demande est accueillie.
Timbert c. Groupe de sécurité Garda, 2023 QCTAT 4419.
Décision disponible ici : <https://canlii.ca/t/k0kkx>
Dans cette décision le travailleur conteste une première décision du TAT-1 en lien avec sa fin d’emploi chez son employeur. Le travailleur estimait qu’il était victime d’un congédiement déguisé en lien avec un changement unilatéral de ses conditions de travail. Dans un deuxième temps, le travailleur alléguait que les mesures lui étaient imposées en raison de l’exercice de droits lui résultant du Code du travail, soit le dépôt de griefs et de plaintes au Tribunal.
En première instance, le TAT-1 conclut que l’employeur a repoussé la présomption au bénéfice du travailleur en illustrant une autre cause juste et suffisante pour le changement dans les conditions de travail et la terminaison de son lien d’emploi. Ceci écarte par le fait même le deuxième argument étant donné l’autre cause juste et suffisante.
Le Tribunal conclut qu’il n’y a pas eu démonstration que la décision du TAT-1 comporte un ou des vices de fond constituant des erreurs fondamentales justifiant une décision différente. Qui plus est, aucun fait nouveau n’a été établi et il n’y a pas eu de violation au droit d’être entendu.
La demande est rejetée.
POLICIERS ET POLICIÈRES
Fraternité des policiers de la régie municipale de police de Roussillon Inc. c. Régie intermunicipale de police de Roussillon, T.A., 6 novembre 2023 (a. Me André G. Lavoie)
Disponible sur demande.
Dans cette affaire, la Fraternité des policiers de la régie municipale de police de Roussillon Inc (ci-après « la Fraternité ») conteste les mesures disciplinaires ainsi que le congédiement imposé à un policier.
L’employeur reproche au policier les comportements suivants : dormir au travail, omission de se conformer à un ordre, omission de répondre à un appel d’officier, omission de se rendre à la Cour et omission de signer le registre de l’arme de soutien.
Le Tribunal rejette les reproches suivant l’omission de se conformer à un ordre, l’omission de répondre à un appel d’officier et l’omission de se présenter à la Cour. Le tribunal retient toutefois les reproches suivants : le fait de dormir au travail et l’omission de signer le registre de l’arme de soutien.
Le Tribunal conclut que le reproche de dormir au travail justifie, à lui seul, un congédiement dans les circonstances. En effet, le Tribunal retient le fait qu’il ne s’agit pas d’un événement isolé étant donné que le policier avait été pris au fait plusieurs fois ainsi que le policier avait l’habitude de dormir pendant ses quarts de nuit. Le Tribunal retient également que la fonction particulière du policier en l’espèce, lui impose un degré de vigilance important étant donné son autonomie.
Le grief est accueilli en partie. Le congédiement, pour sa part, est maintenu.
Commissaire à la déontologie policière c. J. B. et D. B., Tribunal administratif de déontologie policière, 8 novembre 2023 (décision par Sylvie Séguin)
Disponible sur demande.
Un chauffeur Uber, un homme noir, se déplace de l’autre côté de la rue à la demande des policiers à la sortie des bars dans le Vieux-Montréal, mais de nouveau il gêne la circulation en s’immobilisant. L’individu refuse d’obtempérer aux ordres des policiers et refuse de s’identifier aux fins de lui remettre un constat d’infraction. Une manœuvre de sa part fait craindre aux agents qu’il tente de fuir. Il est invité à sortir de son véhicule, il est menotté et fouillé par palpation. Il est détenu le temps de rédiger trois constats d’infraction (entrave au travail policier, stationnement oblique, omission d’afficher la vignette Uber) et est remis en liberté.
La Commissaire à la déontologie cite les agents devant le Tribunal administratif de déontologie policière (ci-après, Tribunal), leur reprochant de ne pas s’être comportés de manière à préserver la confiance et la considération que requiert leur fonction en posant des actes fondés sur la race et la couleur du conducteur.
Selon la preuve présentée, le Tribunal conclut que les agents n’ont pas adopté un comportement infligeant au citoyen un traitement différencié ou inhabituel, fondé sur un motif interdit par le Code de déontologie des policiers du Québec. Pour soutenir sa décision, le Tribunal évalue la crédibilité et la fiabilité des différents témoignages et détermine notamment que le témoignage du citoyen n’est pas compatible avec les probabilités qui caractérisent les faits de l’intervention.
Le déroulement de l’intervention est conforme aux pratiques usuelles en pareilles circonstances et la preuve prépondérante ne permet pas de conclure que les agents se seraient comportés différemment si le citoyen n’avait pas été membre d’un groupe racisé.
Les policiers n’ont pas dérogé à l’article 5 du Code de déontologie des policiers du Québec en posant des actes fondés sur la race et la couleur du citoyen.
POMPIERS ET POMPIÈRES
Bruno Roy c. Régie intermunicipale de sécurité incendie de la Vallée-du-Richelieu, TAT, 8 novembre 2023 (j.a. Karine Savard)
Disponible sur demande.
Dans cette décision, le travailleur revendique avoir subi une hernie inguinale lors d’une intervention. La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail ayant refusé sa réclamation, le travailleur conteste cette décision devant le Tribunal administratif du travail.
Le travailleur allègue qu’il peut bénéficier des effets de la présomption de lésion professionnelle prévue à l’article 28 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles puisqu’il rencontre les critères nécessaires. Ainsi, le Tribunal administratif du travail doit déterminer si le travailleur peut effectivement bénéficier des effets de la présomption en appliquant les critères énoncés par la jurisprudence.
Le Tribunal est d’avis que la preuve soumise permet de conclure, par la balance des probabilités, la présence des trois éléments constitutifs essentiels à l’application de la présomption soit : 1) une blessure; 2) qui arrive sur les lieux du travail; 3) alors que le travailleur est à son travail.
Par ailleurs, le Tribunal rejette notamment l’argument en lien avec l’absence de déclaration immédiate à l’employeur. En effet, le délai dans la déclaration s’explique par le fait que le travailleur était convaincu qu’il ne s’agissait pas d’une blessure sérieuse, mais bien une blessure dont la douleur disparaitrait avec le temps. Le travailleur témoigne à l’effet que par son métier de pompier il ressent souvent de la douleur à la suite des interventions, mais que celle-ci disparait normalement avec le temps.
La contestation est accueillie.
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