Veille juridique du 18 juillet 2023

18 juillet 2023

PAR ME MYLÈNE LAFRENIÈRE ABEL ET ME LYLIA BENABID

 

SECTION DROIT DU TRAVAIL

GÉNÉRAL

 

Réseau de transport de la Capitale et Syndicat des employés du transport public du Québec Métropolitain inc., 2023 QCTAT 2525 

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jxlz7>

Dans cette affaire, le Tribunal administratif du travail (ci-après, le « TAT »), doit décider si le Réseau de transport de la Capitale (ci-après, le « RTC »), et le Syndicat des employés du Québec Métropolitain inc., (ci-après, le « Syndicat »), doivent être assujettis à l’obligation de maintenir des services essentiels en cas de grève, en application du Code du travail. Suivant l’invitation du Syndicat, le juge administratif Pierre-Étienne Morand convient qu’il faut faire table rase de la situation antérieure dans laquelle le maintien des services essentiels fut décrété par le gouvernement. Ainsi, la seule question à laquelle le TAT doit répondre est la suivante : la grève des chauffeurs d’autobus du RTC peut-elle avoir pour effet de mettre en danger la santé ou la sécurité publique?

Le Tribunal répond par la négative à cette question. La preuve ne permet pas de conclure, tel que l’y invite le RTC, qu’une grève peut avoir pour effet de mettre en danger la santé ou la sécurité de la population du fait de l’augmentation de véhicules sur le réseau routier, compromettant ainsi les interventions par les différents services d’urgence. La preuve n’étaye pas un danger « imminent, évident et réel ». Notamment, le RTC néglige les différentes solutions de rechange à l’utilisation de l’autobus (à l’exception de l’automobile), dont l’implantation du télétravail.

Le TAT rejette également l’argument selon lequel la santé ou la sécurité de la population serait mise en danger en lien avec l’accès des personnes désavantagées sur le plan socioéconomique aux établissements de santé, à l’augmentation du nombre de blessés sur la route ou encore à la détérioration de la qualité de l’air. En l’espèce, l’exercice du droit constitutionnel de grève doit prévaloir. Tel que l’écrit le Tribunal :

[21] La consécration du droit de grève comme composante indispensable de la liberté d’association constitue un changement majeur dans le paysage juridique, ayant eu pour effet d’entraîner dans son sillage une interprétation véritablement restrictive des services essentiels. L’objectif est donc de porter atteinte le moins possible au droit de grève, de façon à ce que la santé ou la sécurité publique ne soit pas mise en danger.

[…]

[26] Certes, une grève des chauffeurs d’autobus provoquera des désagréments, des incommodités, des ennuis pour le grand public de la capitale nationale et de sa périphérie, mais la grève a justement vocation à déranger, faut-il le rappeler.

Le Tribunal déclare que le RTC et le Syndicat ne sont pas assujettis à l’obligation de maintenir des services essentiels en cas de grève en vertu de l’article 111.0.17 du Code du travail.

 

M. c. Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 307, 2023 QCTAT 2940

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jz22r>

Le requérant demande la révision d’une décision rendue par le Tribunal administratif du travail (ci, après, le « TAT ») rendue le 15 décembre 2022 (la décision de TAT-2). TAT-2 y rejette sa première requête en révision d’une décision rendue le 29 mars 2022 (la décision de TAT-1) rejetant la plainte pour manquement au devoir de représentation qu’il a déposée contre son syndicat.

Dans cette plainte, le requérant alléguait que le syndicat ne l’a pas représenté adéquatement au regard de situations de harcèlement psychologique vécues au travail ainsi que du suivi de griefs portant sur l’attribution d’heures supplémentaires. Lors de l’audience devant TAT-1, le requérant allègue aussi un manquement du syndicat en raison du retrait, en novembre 2020, du grief visant à contester son congédiement survenu le mois de juin précédent.

Le TAT juge que la décision de TAT-2 n’est pas entachée d’un vice de fond ou de procédure de nature à l’invalider : il a disposé des questions dont il pouvait traiter dans le cadre d’un recours en révision. Le requérant allègue essentiellement les mêmes arguments que ceux qu’il a fait valoir devant les deux premières instances. Or, le pouvoir de révision du TAT ne peut être invoqué pour solliciter indirectement un appel et obtenir une nouvelle évaluation ou appréciation de la preuve.

La requête en révision est rejetée.

Le cabinet RBD représentait le syndicat dans ce dossier.

  

Colibaba Sandra et Hôpital Santa Cabrini, 2023 QCTAT 2972

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jz3jx>

Dans ce dossier, la travailleuse, une infirmière clinicienne, demande au Tribunal administratif du travail (ci-après, le « TAT ») de rendre la décision qui aurait dû être rendue par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail (ci-après, « CNESST ») eu égard à la relation entre le diagnostic de déchirure partielle d’un des tendons de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite et l’accident du travail survenu le premier septembre 2020, et ce, même si elle n’a pas fait l’objet d’une décision explicite de la part de la CNESST.

Le TAT considère dans un premier temps qu’il peut se saisir du diagnostic de déchirure partielle d’un des tendons de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite. Entre autres choses, le professionnel de la santé qui a charge de la travailleuse requiert que la CNESST reconnaisse une lésion à l’épaule droite à cause de l’accident du premier septembre 2020, car la travailleuse a besoin de soins et de traitements, notamment, de la physiothérapie, de l’ergothérapie, une infiltration et, ultimement, une chirurgie. Par ailleurs, le 16 février 2021, l’agente d’indemnisation de la CNESST autorise les traitements de physiothérapie relativement au diagnostic de déchirure de la coiffe des rotateurs à l’épaule droite. Bref, l’analyse du dossier révèle que la CNESST omet ou refuse de se saisir de ce diagnostic de déchirure du tendon du sus-épineux de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite. Pour cette raison, le TAT actualise le dossier et il se saisit du diagnostic.

Dans un deuxième temps, le TAT conclut, au vu de la preuve administrée à l’audience, qu’il existe bel et bien une relation causale entre l’évènement accidentel du premier septembre 2020 et les diagnostics de tendinite de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite et celui de déchirure partielle du tendon du sus-épineux à l’épaule droite.

La contestation de la travailleuse est accueillie.

Le cabinet RBD représentait la travailleuse dans ce dossier.

 

POLICIERS ET POLICIÈRES

 

Fraternité des policiers et policières de Montréal c. Ville de Montréal, 2023 CanLII 60961 (a. Me Nathalie Faucher)

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jz363>

Le Tribunal est saisi d’un grief contestant le refus de l’employeur de promouvoir le plaignant au grade de sergent, lors des promotions ayant eu lieu vers le mois d’octobre 2019. L’employeur estime que le policier ne peut pas remplir les exigences de la fonction dans laquelle il a demandé à être promu, et ce, en raison de sa condition physique. Selon l’employeur, le plaignant ne satisfait donc pas au critère de la compétence.

Le Tribunal conclut que la Ville est en droit de considérer la capacité physique des candidats à remplir les exigences de la tâche lors des promotions. Deux clauses de la convention collective sont interprétées par le Tribunal : la clause 24.00 qui précise les critères à considérer lors de l’attribution d’une promotion et, la clause 24.09 qui protège le droit de policiers absents du travail de participer au processus de promotion.

L’arbitre ne retient pas l’argument du syndicat selon lequel, puisque la promotion possède un caractère temporaire et qu’elle ne deviendra permanente qu’après un an en poste, le critère de la capacité physique ne doit pas être considéré lors des promotions, contrairement à la mutation. L’analyse des termes de la convention collective, lorsque lus dans leur ensemble, convainc plutôt l’arbitre que l’aptitude fait partie du critère de la compétence et non l’inverse. Le salarié absent pour cause de lésion professionnelle est protégé par la convention collective, mais cela ne lui confère pas un droit absolu d’être promu. Le Tribunal considère que la décision de la Ville n’était ni déraisonnable, ni abusive, ni discriminatoire, ni injuste, ni entachée de parti pris.

Le grief est rejeté.

Le cabinet RBD représentait le plaignant dans ce dossier.

  

Lambert c. Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (Nkamba), 2023 QCCA 870

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jz1b7>

Le Tribunal des droits de la personne (ci-après, Tribunal) a rendu une décision le 4 mai 2023 où elle détermine que l’intervention des deux policiers n’était pas le fruit d’un profilage racial considérant que le conducteur appréhendé ne portait pas de ceinture de sécurité. Par contre, le Tribunal conclut que le menottage du conducteur constituait un traitement inhabituel et que la conduite des policiers à cet égard constitue du profilage racial.

Devant la Cour d’appel, les policiers demandent la permission d’appeler de la dite-décision du Tribunal. Les policiers invoquent que le Tribunal des droits de la personne a omis de tenir compte de la preuve pertinente à l’effet que leur conduite était conforme aux pratiques policières dans les mêmes circonstances. Par ailleurs, ils soutiennent qu’il n’existe pas en droit de présomption de discrimination et de profilage racial contrairement à ce que le jugement du Tribunal laisse sous-entendre. Finalement, les policiers considèrent que le Tribunal n’aurait pas dû octroyer des dommages-intérêts punitifs alors qu’il n’y a aucune démonstration que l’atteinte était intentionnelle.

Sans se prononcer sur les chances de succès des moyens d’appel invoqués, la Cour d’appel est d’avis qu’il y a lieu d’accorder la permission d’appeler puisque les moyens d’appel invoqués méritent l’attention de la Cour.

Le cabinet RBD représentait les parties policières dans ce dossier.

 

TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER

 

Rien à signaler.

POMPIERS ET POMPIÈRES

 

Rien à signaler.

ARTISTES

 

Rien à signaler.

 

SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

 

Labonté Martin c. R., 2023 QCCA 791

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jxnh1>

Le requérant demande l’autorisation de se pourvoir contre une décision de la Cour du Québec qui a écarté la peine de trois ans d’emprisonnement recommandée par les parties à la suite de son plaidoyer de culpabilité à quatre chefs d’accusation de fabrication d’armes à feu prohibées, possession en vue de trafic d’armes à feu prohibées, contravention d’une ordonnance d’interdiction de posséder des armes et défaut de se conformer à une ordonnance de probation. Le juge de première instance impose plutôt une peine totale de sept ans. Le requérant soutient que la peine recommandée était une peine individualisée et proportionnelle qui ne déconsidérait pas l’administration de la justice et que le juge de première instance a erré dans l’application du critère d’intérêt public en infligeant une peine supérieure que celle recommandée par les parties.

Le juge de première instance a exigé la comparution d’un témoin expert en armes à feu considérant que la peine de trois ans d’emprisonnement lui semblait manifestement mal fondée.

La Cour d’appel considère que le juge de première instance a omis de tenir compte de l’avantage crucial des recommandations conjointes pour le système de justice et a plutôt appliqué le critère de la justesse de la peine, en établissant une fourchette de peines utile afin de déterminer une peine adéquate, une erreur mainte fois réitérée par la jurisprudence.

Ainsi, l’appel est accueilli et la Cour substitue les peines infligées en première instance par la recommandation initiale des parties.

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