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Veille juridique du 25 avril 2023

SECTION DROIT DU TRAVAIL

GÉNÉRAL

 

FIQ – Syndicat des professionnelles en soins des Laurentides c. Beaupré, 2023 QCCS 1168

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jwpv8>

FIQ – Syndicat des professionnelles en soins des Laurentides (le Syndicat) se pourvoit devant la Cour supérieure à l’encontre d’une sentence arbitrale rendue par l’arbitre René Beaupré. Le Syndicat contestait le droit du Centre intégré de santé et de services sociaux des Laurentides (l’Employeur) d’octroyer à des infirmières auxiliaires des quarts de travail d’une durée de 4 ou 5 heures plutôt que des quarts de travail correspondant à une journée régulière de 7 ou 7,25 heures. Il invoquait également que l’Employeur contrevenait aux dispositions de la convention collective en n’offrant qu’une seule période de repos aux salariées à temps partiel lors de l’exécution de leur quart de travail.

L’arbitre a conclu qu’aucune disposition n’empêche l’Employeur d’octroyer des quarts de travail de moins de 7 heures. Selon la Cour supérieure, le raisonnement de l’arbitre et son interprétation des dispositions de la convention collective n’est pas déraisonnable. On peut en effet raisonnablement conclure que les parties n’ont pas convenu de la durée minimale du quart de travail d’une salariée à temps partiel.

Quant aux périodes de repos, la clause 7.14 de la Convention collective prévoit que « la salariée a droit à deux (2) périodes de repos de 15 minutes par journée de travail ». L’arbitre a conclu que l’octroi par l’Employeur d’une seule période de repos à une salariée à temps partiel paraît raisonnable et conforme à la Convention collective. Sur cet aspect, la Cour est d’avis que le raisonnement de l’arbitre contient deux failles qui rendent sa décision déraisonnable.

D’abord, il est erroné de limiter la disposition de la convention collective qui confère deux périodes de repos aux salariées à temps complet, comme l’a fait l’arbitre, puisque cette disposition se trouve sous la rubrique « Salariées à temps partiel ». Ensuite, pour en arriver à sa conclusion, l’arbitre s’appuie sur les clauses de la convention collective qui concernent le calcul « au prorata des heures travaillées » des « gains » de la salariée à temps partiel pour en inférer qu’il est raisonnable d’appliquer cette logique aux périodes de repos. Or, les périodes de repos dont bénéficie une salariée à temps partiel ne constituent pas des « gains ».

Il s’agit donc d’une interprétation déraisonnable de la convention collective. La Cour déclare que l’Employeur devait accorder deux périodes de repos par quart de travail aux salariées à temps partiel durant la période visée. Elle défère le dossier à l’arbitre René Beaupré ou, en cas d’indisponibilité de ce dernier, à un autre arbitre de grief pour que soient traitées les indemnités dues aux salariées lésées.

Le pouvoir est accueilli en partie.

Le cabinet RBD représentait le syndicat dans ce dossier

 

 

J. P. et Ville de Longueuil, Cols-bleus, dossier 1288714-62-2208, le 20 avril 2023 (j.a. Andrée Gosselin)

 Disponible ici

Le travailleur, un chauffeur de camion à la Ville de Longueuil, subit une lésion professionnelle le 20 janvier 2020 en descendant de son camion. Un diagnostic d’entorse lombaire est retenu par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité́ du travail (la CNESST). Malheureusement, sa lésion n’évolue pas vers le mieux et une sciatalgie droite sur fond de sténose spinale est rapidement démontrée à l’examen par résonance magnétique.

La suite du dossier est ainsi résumée par le Tribunal administratif du travail (TAT). Le Dr. Boubez devient le professionnel de la santé en charge du dossier. En juillet 2020, il recommande la reprise du travail en travaux légers en attendant une chirurgie de décompression. Le travailleur reprend son poste régulier le 16 novembre 2020, en attendant cette chirurgie, qui ne peut être fixée en raison de la pandémie qui sévit à ce moment.

Le 25 février 2021, la CNESST transmet une demande de rapport final au travailleur. En l’absence d’un rapport final, une agente d’indemnisation de la CNESST renverse la présomption d’incapacité et ferme le dossier unilatéralement, sans consulter le travailleur ou le bureau médical de la CNESST. Le 16 avril 2021, une décision de capacité est rendue et celle-ci n’est pas contestée.

Le 29 juillet 2021, une nouvelle agente d’indemnisation reçoit un rapport médical du 21 juillet 2021 ordonnant un arrêt du travail pour une chirurgie prévue le lendemain. Elle demande au travailleur de déposer une nouvelle réclamation pour récidive, rechute ou aggravation.

En juin 2022, un nouvel agent analyse la demande de relation avec le nouveau diagnostic de sténose lombaire. Il la refuse en décidant, sans consultation médicale, qu’il n’y a pas de lien entre ce diagnostic et l’évènement accidentel de janvier 2020. Le lendemain, une nouvelle agente refuse unilatéralement la demande de récidive, rechute ou aggravation, sans autre analyse ou consultation.

Ce sont ces deux décisions de la CNESST que conteste le travailleur. En révision administrative, la CNESST confirme la décision quant à l’absence de relation avec le diagnostic de sténose lombaire et refuse de se prononcer sur la deuxième contestation, la jugeant hors délai.

Devant le TAT, le travailleur demande de considérer que les soins et traitements reçus depuis le mois de 21 juillet 2021 sont en continuité avec, et découlent directement de la lésion professionnelle subie le 20 janvier 2020. Ensuite, il demande que les diagnostics d’entorse lombaire avec sciatalgie droite et de sténose lombaire soient déclarés en lien avec l’évènement accidentel du 20 janvier 2020, et que la chirurgie de décompression subie le 29 juillet 2021 soit déclarée en lien avec ce même évènement. Alternativement, il demande que sa réclamation pour récidive, rechute ou aggravation soit acceptée.

Le TAT conclut que la CNESST devait se considérée liée par les constatations et conclusions du professionnel de la santé qui a charge, le Dr. Boubez. Ainsi, elle ne pouvait exiger que le travailleur dépose un rapport final ou une nouvelle réclamation pour récidive, rechute ou aggravation, vu le suivi médical régulier dont il faisait l’objet et le contexte de la pandémie qui limitait les interventions chirurgicales. La juge administrative Andrée Gosselin écrit :

[30] Les ratés du système de santé pendant la pandémie, relativement aux interventions chirurgicales, ne peuvent servir de motif à la Commission pour fermer un dossier ou le réactiver, à sa guise, en faisant fi de la Loi.

Selon le TAT, la preuve médicale prépondérante établit que le diagnostic de la lésion professionnelle du 20 janvier 2020 est une entorse lombaire avec sciatalgie droite ayant rendu symptomatique une sténose spinale lombaire préexistante. Le lien avec la chirurgie subie en juillet 2021 est également démontré.

Les contestations du travailleur sont accueillies et sa réclamation pour une récidive, rechute ou aggravation est annulée.

Le cabinet RBD représentait le syndicat dans ce dossier

 

 

 

Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux et Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) des Laurentides, 2023 QCTA 115  

Disponible sur SOQUIJ

Dans cette affaire, la plaignante, une physiothérapeute détentrice d’un poste à temps plein auprès de l’Employeur, dans un CHSLD, est en absence invalidité à partir du 1er août 2018 après avoir subi un accident de vélo ayant provoqué un traumatisme crânien léger. Elle tentera un premier retour progressif qui s’avèrera un échec. Elle effectuera de nouveau un retour progressif au travail à partir du 30 mars 2020 pour ne reprendre complètement ses tâches qu’au 26 octobre 2020.

Pendant son deuxième retour progressif, la ministre de la Santé et des Services sociaux adopte différents arrêtés modifiant les conventions collectives et ententes sectorielles. L’arrêté 2020-035 prévoit l’octroi d’une « prime escalier » pouvant aller jusqu’à 1 000$ par mois pour les personnes travaillant le nombre d’heures prévu à leur titre d’emploi dans un milieu désigné, dont les CHSLD. L’arrêté 2020-044 apporte certaines précisions : la personne salariée qui s’absente pour certains motifs (congé annuel, férié, libération syndicale, période d’isolement, etc.), demeure admissible à la prime au prorata du temps travaillé.

Puisque l’absence maladie n’est pas prévue à cette liste de motifs, l’Employeur refuse d’octroyer la « prime escalier » à la plaignante en retour progressif. Le Syndicat conteste cette décision, jugeant que l’Employeur l’arbitre agit de manière discriminatoire.

L’arbitre Éric-Jan Zubrzycki accueille le grief. Le décret crée bel et bien une distinction fondée sur l’un des motifs prohibés de discrimination énumérés à l’article 10 de la Charte, soit le handicap. Comparée aux autres salariés ayant été jugés admissibles à une prime malgré le fait qu’ils n’aient pas effectivement travaillé toutes les heures associées à leur titre d’emploi, la plaignante, qui était en retour au travail progressif, subit un traitement discriminatoire. Le Syndicat a fait la preuve que cette exclusion détruit ou compromet le droit à la reconnaissance et à l’exercice, en pleine égalité, des droits et libertés de la personne de la plaignante. Tel que le souligne l’arbitre, « l’exclusion d’un bénéfice économique ne repose pas sur des critères objectifs, telle la prestation de travail offerte, mais bien sur un critère arbitraire relevant de préjugés et stéréotypes, et ce, quand bien même cela serait inconscient ».

Le grief est accueilli et l’arbitre ordonne à l’Employeur de verser à la plaignante la prime prévue à l’arrêté ministériel 2020-035 en proportion de chaque heure effectivement travaillée pendant la durée de son invalidité au cours de laquelle s’appliquait l’arrêté, le tout à intérêt à taux légal.

 

 

POLICIERS ET POLICIÈRES

 

Rien à signaler.

 

TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER

 

Ambulance Chicoutimi et Syndicat des paramédics Saguenay—Lac-St-Jean-Nord (FSSS – CSN), 2023 QCTA 143 

Disponible sur SOQUIJ

Dans cette affaire, le Syndicat conteste la suspension de 80 heures de travail ayant été imposée au plaignant, un technicien ambulancier, pour avoir abandonné son poste et interrompu son quart de travail sans justification ni autorisation.

Les faits sont brièvement les suivants. Le 28 septembre 2021, à 20 h, le plaignant débute son quart de travail qui devait se terminer le lendemain, à 8 h. À 21h27, alors qu’il est affecté par le Centre de communication santé (CCS) sur un point d’attente défini de la Ville de La Baie, il reçoit un appel téléphonique de son voisin. Ce dernier l’informe que sa chienne en gestation hurle. Le processus de la mise bas est commencé.  Il contacte dès lors son superviseur et demande d’être libéré de son travail et d’être remplacé jusqu’à la fin de son quart de travail.

Après avoir essuyé plusieurs refus, le superviseur trouve un remplacement, mais ce dernier se trouve à 1h40 de route de la caserne. Il informe le plaignant qu’il sera remplacé, mais qu’il doit attendre environ deux heures avant que n’arrive sur place son remplaçant. Le plaignant répond que l’attente est trop longue, qu’il pourrait n’attendre que trente minutes et décide donc d’abandonner son travail. Il invoque un état d’anxiété maladif qui rendrait à risque toute intervention auprès d’un patient.

Le tribunal d’arbitrage conclut qu’il y a bel et bien insubordination en l’espèce et que la sanction imposée au plaignant est justifiée.  Notamment, l’arbitre retient le témoignage net, clair, précis et direct du superviseur qui affirme lui avoir demandé d’attendre son remplaçant. De plus, aucune preuve médicale d’une maladie n’ayant été administrée, l’arbitre conclut que l’état de maladie n’a pas été mis en preuve. Par ailleurs, l’arbitre n’accepte pas le raisonnement du plaignant selon lequel son départ prématuré fut sans effet sur le service offert.

Le grief est rejeté.

 

 

J-D. P. et les ambulances Gilbert (Matane) inc., Dossiers 1244811-01A-2109 1282460-01A-2206 1287616-01A-2207, le 17 avril 2023 (j.a. Raymond Arseneau)

Disponible ici

Dans cette affaire, le travailleur qui occupe un emploi d’ambulancier paramédical allègue s’être blessé à l’épaule gauche au mois de novembre 2020, lors du transfert d’un patient. Sa réclamation pour lésion professionnelle est rejetée par la Commission des normes, de l’équité de la santé et de la sécurité du travail (CNESST).

Le travailleur demande au Tribunal administratif du travail (TAT) de déclarer qu’il a subi une lésion professionnelle, sous forme d’accident du travail.

Le TAT précise d’abord que la présomption de lésion professionnelle de n’applique pas en l’espèce. En effet, selon la preuve, les pathologies à l’épaule gauche diagnostiquées résultent probablement de la manifestation au travail d’une condition personnelle. Ensuite, le TAT est d’avis que les circonstances associées à l’apparition des symptômes ne permettent pas de conclure en la présence d’un accident du travail. Aucune événement imprévu et soudain n’est survenu. Le juge administratif rejette également la thèse de l’aggravation d’une condition personnelle.

La contestation du travailleur est rejetée.

 

 

 

POMPIERS ET POMPIÈRES

 

Rien à signaler.

 

ARTISTES

 

Rien à signaler.

 

SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

R. c. Boucher-Germain, 2023 QCCQ 832

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jw03j>

Dans cette affaire, les coaccusés faisaient face à des accusations d’agression sexuelle, de menace et de sollicitation de services sexuels moyennant rétribution. Lors d’une soirée arrosée, les coaccusés ont demandé à la conjointe d’un des coaccusés si elle serait intéressée à avoir une relation sexuelle à trois. Hésitante, un des coaccusés lui a demandé « pour 1000$, le ferais-tu?». La plaignante alléguait qu’un des coaccusés l’aurait caressé dans son lit et lui aurait mentionné qu’elle est tellement belle qu’il la violerait. De plus, un des coaccusés aurait proposé une somme de 250$ à trois amies de la plaignante.

Le juge Poirier de la Cour du Québec affirme d’abord que l’intention requise pour l’infraction de sollicitation de services sexuels moyennant rétribution prévue à l’article 286.1 C.cr. exige que l’accusé sache que la plaignante est une travailleuse du sexe, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. De plus, l’expression utilisée par le coaccusé, bien que maladroite, n’est pas suffisante pour former l’intention spécifique requise, notamment en raison de son niveau d’intoxication avancé. Le juge de la Cour du Québec, à la première étape du test de l’arrêt W.D., croit les coaccusés. En effet, ces derniers reconnaissent avoir manqué de jugement en raison de leur état d’intoxication avancé. Ils nient également avoir agressé sexuellement la plaignante ou l’avoir menacé et leur version est crue.

Lors de l’analyse des deux dernières étapes de l’arrêt W.D., le juge affirme que la version des coaccusés permet de soulever un doute raisonnable. De plus, les contradictions entre les différents témoins permettent de soulever un doute raisonnable quant à l’ensemble de la preuve présentée à l’égard des coaccusés.

Les coaccusés sont acquittés de l’ensemble des chefs portés contre eux.

Le cabinet RBD représentait les accusés dans ce dossier