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Devoir d'accommodement et droit de retour au travail: développement majeur

CSST c. Caron 2015 QCCA 1048

DROIT DE RETOUR AU TRAVAIL ET DEVOIR

D’ACCOMMODEMENT : UN REVIREMENT

Le 15 juin 2015, la Cour d’appel du Québec a rendu un arrêt retentissant qui ramène à l’ordre la CSST et la CLP en matière d’application du devoir d’accommodement prévu à la Charte dans le cadre de l’exercice du droit de retour au travail prévu à la LATMP.

Avant l’arrêt Caron[1], la jurisprudence constante de la CLP voulait que les nombreuses dispositions de la LATMP sur le droit de retour au travail et sur la réadaptation constituaient en soi des mesures d’accommodement légales qui écartaient l’obligation de l’employeur d’accommoder son travailleur accidenté en vertu de la Charte.

L’état de la jurisprudence de la CLP avait pu créer certaines situations inusitées, voire injustes, où un travailleur accidenté du travail se retrouvait avec moins de droits qu’un travailleur handicapé pour des raisons personnelles. En principe, la Charte s’applique à tous et il est interdit de discriminer une personne handicapée. Or, l’employeur d’un travailleur handicapé pour des raisons personnelles était tenu à une obligation d’accommodement sous réserve d’une contrainte excessive, mais l’employeur du travailleur accidenté du travail pouvait mettre fin à l’emploi de celui-ci en informant la CSST qu’il n’avait aucun emploi convenable à offrir.

Heureux revirement : la Cour d’appel a précisé que l’obligation d’accommodement s’ajoute aux dispositions de la LATMP. La Cour mentionne que la LATMP n’impose pas à un employeur l’obligation de modifier les tâches de l’emploi prélésionnel ou de tout autre emploi disponible, mais que celui-ci a tout de même l’obligation légale, en vertu de la Charte, d’aménager un poste ou des tâches de travail si cela ne lui cause pas une contrainte excessive. Malgré les objections de la CSST et de la CLP, la Cour renchérit en mentionnant que l’obligation d’accommodement est certainement conciliable avec les dispositions de la LATMP et qu’il suffit à la CSST et à la CLP de vérifier si l’employeur est en mesure d’accommoder le travailleur avant et après l’identification d’un emploi convenable.

Autre fait intéressant. La Cour d’appel mentionne que l’expiration du délai relatif à l’exercice du droit de retour au travail d’une ou deux années (art. 240 LATMP) n’est pas fatale et que cet élément n’entraîne pas, à lui seul, la déchéance de ce droit. La Cour d’appel s’oppose donc à une application mécanique sans discernement de cet article.

Il sera intéressant de voir aux cours de prochains mois comment la CSST (CNESST) expliquera à ses agents de réadaptation ces enseignements récents de la Cour d’appel et quelles modifications elle apportera à ses politiques administratives. Quoi qu’il en soit, la CNESST a tout de même déposé une requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême, étant insatisfaite de ce revirement favorable aux travailleuses et travailleurs.

[1] Commission de la santé et de la sécurité du travail c. Caron, 2015 QCCA 1048