Merci de vous inscrire à notre infolettre.
Infolettre
Si vous souhaitez recevoir de nos nouvelles, il suffit d’entrer votre adresse courriel dans la boîte ci-contre.
Veuillez remplir les champs correctement.

Veille juridique du 21 juillet 2020

SECTION DROIT DU TRAVAIL 

GÉNÉRAL

Syndicat des employés du CISSSMO — SCFP 3247 et Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Ouest, 2020 QCTAT 2342
https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat2342/2020qctat2342.pdf

Deux syndicats déposent une plainte contre le Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Ouest (ci-après : « l’employeur ») pour ingérence et entrave aux activités syndicales en vertu de l’article 12 du Code du travail. Ces demandes sont présentées dans le contexte de la pandémie dans la foulée de l’adoption du décret 177-2020 ayant pour objet de déclarer le Québec en état d’urgence sanitaire et de ceux qui le prolongent ainsi que l’arrêté ministériel AM-2020-007. Cet arrêté prévoit la possibilité pour l’employeur de modifier certaines dispositions nationales et locales des conventions collectives en vigueur dans le réseau de la santé et des services sociaux particulièrement en ce qui a trait aux vacances annuelles.

Les syndicats, SCFP 3247 et la FIQ- Syndicat des professionnelles en soins de Montérégie-Ouest, reprochent à l’employeur d’avoir adopté unilatéralement, contre leur volonté et sans les consulter, de nouvelles règles devant s’appliquer à l’attribution des vacances estivales pour l’été 2020. Les syndicats reprochent également à l’employeur d’avoir communiqué directement avec les salariés à cette fin et d’avoir fait signer une entente confirmant la modification de leur choix de vacances. Ils demandent que soit ordonné à l’employeur de cesser ce comportement, en particulier celui de conclure ou de tenter de conclure des ententes individuelles.

La présente décision porte sur les demandes d’ordonnances de sauvegarde. Selon le Tribunal, la preuve démontre, conformément à l’arrêté AM-2020-007 qu’il y a eu une forme de consultation de la part de l’employeur. Selon le Tribunal, la question de savoir si elle était suffisante ne peut être évaluée au stade provisoire. Quoi qu’il en soit, selon le Tribunal, les syndicats n’ont pas été mis de côté ni empêchés d’agir et l’employeur les a informés au long du processus. Selon le Tribunal la preuve ne révèle pas non plus que dans ses communications avec les salariés, l’employeur a cherché à conclure des ententes relatives à des conditions de travail avec eux sans l’approbation de leur syndicat. Il ne faut pas oublier que le contexte n’était pas tant de convenir d’une condition de travail, comme on peut le faire en négociation, que de mettre en application une condition nouvelle imposée d’urgence. Selon la preuve présentée à ce stade, la démarche vise tout au plus à informer les salariés de la directive adoptée en raison des circonstances, une directive qui ne pouvait que les déranger toutes et tous et absolument les contrarier. En revanche, il est vrai, selon l’ensemble de la preuve, que l’employeur a possiblement agi avec précipitation et froissé bien des gens. Il ne s’agit pas pour autant d’un comportement qui peut s’assimiler à de l’entrave ou de l’ingérence.

La preuve de l’apparence de droit, ne convainc pas le Tribunal qu’il faille intervenir au stade de l’ordonnance provisoire.

Demandes d’ordonnance de sauvegarde rejetées.

.

Association des ingénieurs et scientifiques des systèmes spatiaux c. MDA Corporation, 29 juin 2020, Tribunal d’arbitrage, Robert Côté.
Sur demande seulement

L’association dépose un grief suivant lequel elle conteste le fait que l’employeur n’a pas suivi les procédures prévues à la convention collective à l’occasion de la mise à pied de certains salariés. L’employeur demande le rejet préliminaire du grief au motif qu’une décision arbitrale rendue par l’arbitre François Hamelin en 1988 a déjà tranché les questions que soulève le grief syndical. La convention a ensuite été reconduite à plusieurs reprises sans que la disposition litigieuse ait été modifiée par les parties et donc l’employeur plaide que la décision de l’arbitre Hamelin a acquis l’autorité de la chose jugée et donc que le Tribunal doit déclarer le grief irrecevable. L’employeur est également d’avis que le grief est irrecevable sous le couvert d’un grief syndical, il se veut une collection de griefs individuels et la convention exige en pareil cas la signature des employés visés, ce qui n’est pas le cas. L’employeur exige également des précisions en regard des employés visés par le grief et des reproches quant au non-respect de la convention qu’allègue l’association.

Le Tribunal refuse de se prononcer de façon préliminaire sur l’argument de la chose jugée en se basant sur les principesédictés dans l’affaire Cégep de Valleyfield c. Gauthier-Cashman. Le Tribunal reporte également à sa décision sur le fond l’impact de l’absence de signature des salariés concernés par le grief. Le Tribunal énonce qu’une décision de la nature que celle que recherche l’employeur ne doit être rendue que dans les seuls cas manifeste d’irrecevabilité, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Tout d’abord, l’association allègue que la convention a été modifiée depuis la décision de l’arbitre Hamelin et que l’environnement juridique des parties a évolué, il faudra donc que l’association puisse en faire la preuve. De plus, les allégations du syndicat vont au-delà de la décision rendue par Me Hamelin. Par ailleurs, l’autorité de la chose jugée est un principe qui est questionnable en matière d’arbitrage. Dans ce cadre, le Tribunal détermine qu’il est plus prudent de trancher ces questions dans le cadre d’un environnement factuel concret que d’en disposer dans l’abstrait. Le Tribunal termine sa décision en ordonnant des mesures propres à faciliter le déroulement de l’instance dans le respect du principe de la proportionnalité prévu à l’article 18 du Code de procédure civile et dont doivent également s’inspirer les tribunaux d’arbitrage.

Nous tenons à souligner le travail de Me Alexandre Grenier dans ce dossier !

.

L’Heureux et Commission scolaire de Montréal, 2020 QCTAT 2157
https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat2157/2020qctat2157.pdf

Dans cette affaire la CNESST demande la révision d’une décision du Tribunal administratif du travail (ci-après : « TAT-1 »). Elle soutient que le TAT-1 commet une erreur de droit assimilable à un vice de fond de nature à invalider la décision rendue en concluant que la travailleuse n’est redevenue que partiellement capable d’exercer son emploi. Selon l’employeur et la CNESST, la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (ci-après : « la loi ») ne prévoit pas de capacité partielle. Il est plutôt question de capacité ou d’incapacité. Le CNESST soutient également que la décision du TAT-1 a pour effet de créer un droit perpétuel à l’indemnité de remplacement du revenu, ce qui va à l’encontre de l’intention du législateur.

Les faits sont essentiellement les suivants : les lésions d’ordre psychologique de la travailleuse sont consolidées en date du 27 octobre 2015, mais la travailleuse conserve une limitation fonctionnelle l’empêchant de travailler plus de quatre jours par semaine ce qui constitue le cœur du présent litige. En effet, la Commission rend une décision déterminant que la travailleuse a la capacité d’exercer son emploi malgré la limitation fonctionnelle et que son droit à l’indemnité de remplacement du revenu prend fin le 22 août 2013. La travailleuse demande la révision de cette décision et demande au Tribunal (TAT-1) de déclarer qu’elle a droit à l’indemnité de remplacement du revenu pour la cinquième journée de la semaine où elle ne peut travailler. Le TAT-1 accueille la contestation de la travailleuse et conclut que la travailleuse est partiellement capable d’occuper son emploi et reconnaît son droit au versement de l’indemnité de remplacement du revenu à compter du 22 août 2013, pour la cinquième journée de la semaine où elle ne peut travailler. La CNESST dépose une requête en révision ou en révocation à l’encontre de cette décision.

Le Tribunal en révision estime que le TAT-1 en concluant que la travailleuse a droit à une indemnité de remplacement du revenu en raison de sa capacité partielle de faire son emploi commet une erreur ayant un effet déterminant sur le présent litige. La notion de capacité partielle n’est pas prévue par le législateur, un travailleur est capable ou il ne l’est pas. Selon le Tribunal, le droit à l’indemnité de remplacement du revenu est intimement lié à la capacité du travailleur d’exercer son emploi ou un emploi convenable, il n’est pas un droit autonome.

Le TAT-2 indique que le TAT-1 ne pouvait arriver qu’à une conclusion, soit que la travailleuse n’avait pas été traitée de façon inéquitable par la CNESST lorsqu’elle a décidé qu’elle n’avait plus droit à l’indemnité de remplacement du revenu en application de l’article 52 de la loi. De plus, le revenu de la travailleuse a considérablement augmenté depuis la survenance de sa lésion professionnelle, ce qui a eu pour effet de compenser la perte de revenu subie.

Requête en révision ou en révocation déposée par la CNESST accueillie.

Déclare que la travailleuse a la capacité de faire son emploi prélésionnel selon un horaire de travail réduit de quatre jours semaine et qu’elle n’a pas droit au versement d’une indemnité de remplacement du revenu à compter du 22 août 2013.

.

Association accréditée SPGQ et Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail, 2020 QCTAT 1789
https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat1789/2020qctat1789.pdf

Le SPGQ est une association accréditée qui représente les conseillers et les conseillères en réadaptation qui travaillent à la direction de l’indemnisation des victimes d’actes criminels (ci-après : « IVAC ») étant l’employeur. Depuis plusieurs années, le syndicat reçoit de ses membres des plaintes en regard de la charge de travail, les membres considèrent que la charge de travail des conseillers en réadaptation est en progression constante et qu’il en résulte des risques de détresse psychologique. Le syndicat adresse une plainte à la direction de la prévention et inspection de la CNESST afin que cette dernière dépêche un inspecteur sur les lieux afin d’évaluer la situation et forcer l’employeur à apporter les correctifs appropriés.

Dans le présent dossier, les inspecteurs ont émis des dérogations que l’employeur n’a pas contestées. Subséquemment, à la suite des actions entreprises par l’employeur, les inspecteurs ont levé les dérogations jugeant que la situation était corrigée. Le syndicat est d’avis que l’employeur ne s’est pas déchargé de ses obligations en regard des dérogations émises. Selon le syndicat, les obligations de l’employeur en sont une de quasi-résultat. L’employeur n’a pas analysé les risques s’attardant plutôt à évaluer les composantes de la charge de travail. L’employeur soutient que son obligation en est une de moyens et qu’il a pris les moyens en engageant un expert pour évaluer les éléments de la charge de travail qui peuvent présenter un risque de détresse psychologique.

Le Tribunal en arrive à la conclusion que l’employeur s’est affranchi de son obligation qui en est une de moyens dans les présentes circonstances. Il a pris des mesures raisonnables pour influer immédiatement sur la charge de travail dans l’attente de l’analyse des risques. L’expert qu’il a retenu s’est attardé à examiner les composantes de la charge globale de travail qui pouvaient entraîner un risque pour la santé des travailleurs de l’IVAC. L’employeur a utilisé les méthodes nécessaires et raisonnables dans les circonstances. Il s’est acquitté de ses obligations. Selon le Tribunal, ce n’est pas le moyen adopté qui pose problème, c’est le résultat obtenu. Or l’obligation de l’employeur en est une de moyen, pas de résultat.

Contestation rejetée.

.


POLICIERS ET POLICIÈRES

Fraternité des policiers et policières de Montréal c. Montréal (Ville), 2020 CanLII 45993 (QC SAT)
https://www.canlii.org/fr/qc/qcsat/doc/2020/2020canlii45993/2020canlii45993.pdf

Dans cette affaire, la Fraternité conteste la décision de l’employeur de refuser au plaignant, un lieutenant, 2 des 4 semaines de vacances additionnelles qu’il avait demandées pour la période du 20 juillet au 16 août 2020. La Fraternité plaide qu’en vertu de l’article 17.07 b) de la convention collective, l’employeur ne bénéficie d’aucune discrétion et doit automatiquement accorder le congé demandé dès lors que le quota minimal de 25% des effectifs est respecté. De façon subsidiaire, si l’arbitre juge que l’article 17.07 a) est applicable, la Fraternité plaide que la discrétion que confère cette clause à l’employeur en matière d’octroi de congés annuels a été exercée de façon déraisonnable, arbitraire et abusive. Selon la Fraternité, l’employeur s’est limité à refuser la demande telle que présentée au motif qu’il la trouvait déraisonnable, et ce, sans même avoir tenté d’arriver à une entente avec le plaignant.

Le litige consiste donc à savoir si le plaignant a droit à la période additionnelle de vacances qu’il a demandée. Selon l’arbitre, l’article 17.07 b) ne s’applique pas au lieutenant. Selon l’arbitre, il paraît raisonnable et logique que les parties aient plutôt voulu subordonner le choix de vacance du lieutenant à un mécanisme comportant une dose de rationalité, en l’occurrence une entente entre le lieutenant et son supérieur. L’arbitre conclut que le lieutenant est visé par l’alinéa a) de la clause 17.07 et que suivant les circonstances la décision de retrancher 2 des 4 semaines additionnelles de congés annuels demandées par le plaignant ne saurait être qualifiée dans les circonstances de déraisonnable, arbitraire ou abusive. La décision de l’employeur se basait sur les besoins opérationnels durant une période particulièrement intense pour un PDQ déjà fort sollicité en temps normal ainsi que sur la difficulté de remplacer efficacement le lieutenant durant cette période. Selon la preuve prépondérante, l’absence du lieutenant en outre de ses conséquences financières provoque un effet « domino » dont à terme, il résulte une baisse d’effectif et une perte d’expertise. De plus, l’absence du lieutenant l’empêchait en définitive de participer aux services d’ordre comme le voulait l’orientation adoptée par le Service de police.

Grief rejeté.

.


TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER

Rien à signaler.


POMPIERS ET POMPIÈRES

Rien à signaler.


ARTISTES

Rien à signaler.


SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

R. c. Thanabalasingham 2020 CSC 18
https://decisions.scc-csc.ca/scc-csc/scc-csc/fr/item/18421/index.do

En 2012, l’intimé Thanabalasingham a été accusé du meurtre au deuxième degré de sa conjointe. Avant que la date de son procès ne soit fixée, le Ministère public a décidé de l’accuser plutôt de meurtre au premier degré. L’enquête préliminaire a duré plus d’un an. Il y a également eu d’autres délais. Le procès devait se dérouler en 2017, durant l’année qui a suivi l’arrêt Jordan. Avant le début de son procès, Thanabalasingham a demandé un arrêt des procédures en vertu de l’arrêt Jordan.

Le juge du procès lui donne raison et a ordonné l’arrêt des procédures. Les juges majoritaires de la Cour d’appel ont rejeté l’appel du Ministère public et confirmé l’arrêt des procédures.

Dans un jugement unanime, la Cour suprême conclut que le droit de M. Thanabalasingham d’être jugé dans un délai raisonnable a été violé et elle confirme l’arrêt des procédures. Selon le calcul des délais, la cause de Thanabalasingham durait depuis 45 mois, et il avait passé toute cette période en prison. Cette période dépassait de 15 mois le plafond maximal de 30 mois fixé dans l’arrêt Jordan. La Cour affirme que le Ministère public a le pouvoir de changer changer l’accusation pour meurtre au premier degré, mais qu’elle doit assumer les délais inhérents à ce changement. De plus, l’enquête préliminaire n’a pas constitué un événement distinct et exceptionnel, et sa durée n’était pas une circonstance indépendante de la volonté du Ministère public.

Appel du Ministère public rejeté. Arrêt des procédures confirmé.

.

R. c. Boily-Afriat, 2020 QCCS 1869
https://www.canlii.org/fr/qc/qccs/doc/2020/2020qccs1869/2020qccs1869.pdf

Dans cette affaire, Les policiers reçoivent un appel pour se rendre chez l’accusé en raison de la présence d’une femme ayant des idées suicidaires. Dans le salon où se trouve l’accusé, les policiers constatent la présence de plusieurs armes à feu sur une table et sur un sac placé au sol. De plus, dans la chambre où se trouve la copine de l’accusé qui semble en détresse, d’autres armes à feu sont trouvées.

Après vérifications, les policiers concluent que les armes trouvées au salon ne sont pas entreposées correctement et mettent l’accusé en état d’arrestation. Une fouille subséquente à l’obtention d’une autorisation judiciaire permet de saisir également des munitions. Au procès, l’intimé témoigne à l’effet qu’il s’apprêtait à quitter pour aller au club de tir et qu’il préparait ses armes à cette fin, en les nettoyant notamment.

La juge l’acquitte en constatant l’absence de commission de l’actus reus, en l’occurrence la question de l’entreposage, ce qui entraîne l’absence de commission de l’infraction. Constatant qu’il n’existe pas de définition du terme « entreposer », elle s’appuie sur le sens commun du dictionnaire et réfère à l’arrêt R. v. Carlos qui enseigne « qu’il existe des circonstances manifestes où une brève interruption de l’utilisation ou de la manipulation d’armes à feu constitue néanmoins une utilisation ou manipulation et non un entreposage ».

Le juge Marc-André Blanchard de la Cour supérieure confirme l’absence d’erreur de droit révisable de la part de la juge. Elle a conclu que l’accusé manipulait les armes se trouvant au salon au moment de l’arrivée des policiers. Il ne s’agit pas là d’une détermination déraisonnable aux termes de la définition énoncée plus haut, car elle pouvait assurément conclure qu’on se trouvait dans un continuum temporel de manipulation « immédiate ou présente » des quatre armes se trouvant au plancher du salon. Ce faisant, elle ne commet pas d’erreur révisable par un tribunal d’appel. En effet, sa conclusion que l’accusé se trouve à manipuler toutes ses armes parce qu’il les vérifie ou les nettoie avant de se rendre au club de tir, alors qu’il se trouve seul dans son appartement avant l’arrivée de sa copine, et, par la suite de façon immédiate, se justifie aux termes de l’arrêt Carlos.

Appel rejeté. Acquittement confirmé.