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Veille juridique du 22 décembre 2020

SECTION DROIT DU TRAVAIL 

GÉNÉRAL

 

Niobec inc. et Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail et Unifor, section locale 666, Tribunal administratif du travail, 16 décembre 2020

Sur demande seulement

Dans ce dossier, l’employeur exploite une mine de ferroniobium à partir du processus d’extraction jusqu’à la commercialisation du minerai. Entre les mois d’octobre et de décembre 2019, il effectue des travaux sur la machine d’extraction. Le 28 janvier 2020, lors d’une visite d’intervention dans les mines souterraines, un inspecteur de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (ci-après la « CNESST ») émet un avis de correction à l’effet que la machine d’extraction de production n’est pas munie d’un dispositif de surveillance de la charge transportée. L’inspecteur accorde jusqu’au 1er juillet 2020 pour que la problématique soit corrigée. L’employeur conteste cet avis devant le Tribunal administratif du travail (ci-après « TAT ») et une prolongation du délai est accordée jusqu’à ce qu’une décision finale soit rendue sur le bien-fondé de l’avis.

Dans sa contestation, l’employeur demande au TAT d’annuler une dérogation prévue dans l’avis de correction afin de déclarer que les travaux effectués sur la machine d’extraction ne correspondent pas à la notion d’installation au sens de l’article 253.2 du Règlement sur la santé et la sécurité du travail dans les mines (ci-après le « Règlement »). La CNESST et Unifor section locale 666 (ci-après le « syndicat »), intervenante dans le dossier, prétendent pour leur part que les travaux réalisés à l’automne 2019 correspondent effectivement à l’installation d’une machine d’extraction et, ce faisant, l’employeur a l’obligation de munir la machine d’un dispositif de surveillance de la charge transportée, conformément à l’article 253.2 du Règlement.

[8] L’article 253.2 du règlement prévoit, notamment, que « toute machine d’extraction automatisée installée à compter du 26 novembre 2015 doit être munie d’un dispositif de surveillance de la charge transportée ».

Le Tribunal mentionne que le règlement ne prévoit pas de définition de ce qu’est une machine d’extraction ni de la notion d’installation. Par conséquent, son analyse se base sur les principes d’interprétation des lois ayant évolué à travers la jurisprudence

[13] Par ailleurs, lorsqu’il est question d’interprétation, la Cour suprême du Canada enseigne qu’il faut dorénavant privilégier la méthode moderne d’interprétation, suivant laquelle les termes d’une loi ou d’un règlement doivent être lus dans leur contexte global, en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, son objet et l’intention du législateur. Dans l’affaire Lonardi, référant plus particulièrement à la Loi d’interprétation, la Cour ajoute que le législateur québécois précise que les lois doivent généralement recevoir une interprétation large et libérale, qui assure la cohérence, l’effet utile de leurs dispositions ainsi que l’accomplissement de leur objet.

Conformément à ces principes, il faut interpréter la loi et les règlements en matière de santé et sécurité du travail selon la nature et l’objectif de la législation, à savoir une loi à caractère social dont l’objectif est la protection de la santé, de la sécurité et de l’intégrité physique des travailleurs. Ainsi, l’employeur a l’obligation de respecter les normes et de prendre les mesures nécessaires pour assurer l’atteinte de ces objectifs.

Ceci dit, le Tribunal s’interroge sur la définition de ce qu’est une machine d’extraction au sens du Règlement. Après analyse des témoignages d’experts et de l’étude des définitions offertes notamment dans les dictionnaires, la juge administrative retient la thèse de la CNESST et du syndicat, pour qui, la définition d’une machine renvoie nécessairement à la transformation d’énergie et ne peut être limitée à une simple énumération de pièces réunies solidairement comme le prétend l’employeur. Le TAT se questionne par la suite pour déterminer si les travaux réalisés entre les mois d’octobre à décembre 2019 constituent l’installation d’une machine d’extraction au sens du Règlement. Pour ce faire, il entreprend un examen des définitions qu’il considère incontournable et y conclut que la machine d’extraction en place à l’automne 2019 diffère de celle qui était là auparavant.

De plus, le Tribunal admet en preuve les travaux préparatoires du sous-comité consultatif, constitué de membres des milieux patronal et syndical de l’industrie minière et de la CNESST, sur les machines d’extraction lors de l’adoption de l’article 253.2 du Règlement en novembre 2015. En vertu des principes d’interprétation voulant que les termes d’un règlement soient lus dans leur contexte global, le Tribunal tient compte de la situation au moment de l’adoption de la disposition puisqu’elle entraîne deux catégories de machines d’extraction, celles installées avant et celles après le 26 novembre 2015. Toutes les machines d’extraction installées après cette date doivent être pourvues d’un dispositif de surveillance de la charge transportée. Conséquemment, les travaux du comité consultatif sont pertinents puisqu’ils traitent de la disposition à interpréter. La juge administrative conclut que l’employeur a effectivement installé une machine d’extraction à l’automne 2019.

[125] Après analyse, le Tribunal estime que, lors des travaux effectués sur la machine d’extraction à l’automne 2019, alors qu’il a démantelé la machine d’extraction existante pour ensuite rassembler les composantes anciennes, reconditionnées et nouvelles, l’employeur a procédé à l’installation d’une machine d’extraction.

Néanmoins, l’employeur soutient qu’il s’agit d’une mise à niveau de sa machine et non d’un remplacement. Cette prétention est rejetée alors qu’autant l’examen des échanges entre l’inspecteur de la CNESST et les représentants de l’employeur, au cours des travaux effectués sur la machine d’extraction, que l’étude interprétative des termes utilisés dans les documents démontrent qu’il s’agissait bien d’un remplacement.

[155] Le Tribunal concluant que l’employeur a procédé à l’installation d’une machine d’extraction après le 26 novembre 2015, l’article 253.2 du règlement s’applique et il doit la munir d’un dispositif de surveillance de la charge transportée.

La contestation de l’employeur est rejetée et le TAT lui accorde jusqu’au plus tard, le 30 juin 2021 pour munir la machine d’extraction d’un dispositif de surveillance de la charge transportée, conformément à l’article 253.2 du Règlement.

Félicitations à Me Élizabeth Perreault pour cette belle victoire !

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Faubert c. Produits chimiques State ltée, 2020 QCTAT 4214

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat4288/2020qctat4288.pdf

Le Tribunal administratif du travail est saisi de quatre plaintes de harcèlement psychologique déposées par un représentant aux ventes à l’égard de son supérieur. Cette affaire s’inscrit dans un contexte difficile entre les parties alors que le plaignant a déposé plus d’une vingtaine de plaintes de harcèlement psychologique au cours des années précédentes.

Pour ce qui est des quatre plaintes entendues, le plaignant formule divers reproches à l’employeur notamment au niveau de ses difficultés informatiques et de l’absence d’aide reçue par son supérieur. Aussi, plusieurs problèmes découlent des commissions sur les ventes auxquelles le plaignant prétend avoir droit. Ce dernier allègue également des ententes signées, en 2014 et 2017, entre les parties pour régler des plaintes de harcèlement psychologique et qui, selon lui, constituent une admission de harcèlement psychologique à son égard. Le tout, malgré la présence dans chacune de ces ententes d’une clause stipulant qu’elles étaient conclues sans admission de responsabilité. Enfin, le plaignant dépose un avis disciplinaire reçu de l’employeur qui l’incitait à cesser de déposer des plaintes de harcèlement psychologique sans fondement puisque cela engendrait un climat négatif de travail.

Dans son analyse, le juge administratif reprend chacun des cinq éléments nécessaires à la démonstration du harcèlement psychologique, soit : (1) une conduite vexatoire; (2) se manifestant par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes répétés; (3) hostiles ou non désirés; (4) qui portent atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique du salarié et (5) qui entraînent, pour ce dernier, un milieu de travail néfaste. Or, il ne retient pas les prétentions du plaignant en raison des déficiences dans la preuve et de crédibilité lors du témoignage. Pour conclure, le Tribunal commente la problématique de la multitude des plaintes déposées par le plaignant durant les années et l’avis disciplinaire qui en a émané.

[76] Certes, il y a l’avertissement à propos des plaintes déposées par le plaignant. Bien que l’on puisse le questionner en regard du droit du plaignant de déposer des plaintes, on doit aussi considérer que le dépôt de plus de 22 plaintes de harcèlement psychologique puisse constituer en soi du harcèlement psychologique et que l’employeur ait l’obligation de le faire cesser à un moment donné.

Les plaintes sont rejetées.

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Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail c. 8653631 Canada inc., 2020 QCCQ 6684

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat4288/2020qctat4288.pdf

Dans ce dossier, la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, est saisie d’une plainte pénale déposée en vertu de l’article 236 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (ci-après « LSST ») par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et la sécurité du travail (ci-après « CNESST »). En fait, au mois de mai 2020, alors que l’état d’urgence sanitaire a été déclaré au Québec, un inspecteur de la CNESST se rend sur un chantier de construction et observe plusieurs défaillances dans les mesures sanitaires prises par l’Employeur. Un constat lui est donc remis pour avoir contrevenu à l’article 51 (5) de la LSST en exposant ses travailleurs à un risque de contamination à la COVID-19 et, ce faisant, mettant en péril leur santé et sécurité. Le tout, constituant une infraction à l’article 236 de la LSST.

Le Tribunal doit donc déterminer si le non-respect des recommandations de l’Institut national de santé publique du Québec (ci-après « INSPQ ») par un employeur enfreint l’article 51 (5) de la LSST. Les reproches faits à l’Employeur quant aux mesures sanitaires concernent notamment les aires communes qui ne sont ni nettoyées ni désinfectées correctement et l’absence de contrôle quant au nettoyage de mains des travailleurs à l’entrée et à la sortie du chantier.

Dans son analyse, la Cour reprend les recommandations intérimaires émises par l’INSPQ concernant le secteur de la construction. Celles-ci visent principalement la nécessité de désinfecter fréquemment les aires communes, telles que les aires de repas et les installations sanitaires. Or, la preuve non-contredite démontre que l’Employeur n’a pas suivi ces mesures. De plus, la juge Turcot rappelle que l’interprétation à donner à l’article 51 (5) de la LSST est conditionnée par l’objectif poursuivi par la loi, soit l’élimination à la source des dangers pour la santé, la sécurité et l’intégrité physique des travailleurs. Ainsi, l’Employeur est obligé non seulement de respecter les différentes normes et règlements en la matière, mais aussi le bon sens et les règles de l’art.

Par conséquent, dans un contexte aussi sérieux et particulier que celui de la pandémie liée à la COVID-19, les recommandations de l’INSPQ constituent les règles  de l’art et doivent être respectées par l’ensemble des acteurs dans leur milieu de travail. D’autant plus, lorsqu’il s’agit de l’Employeur. La juge est d’ailleurs catégorique sur la question.

[37] Il faut être sans vergogne pour ne pas suivre les recommandations de l’INSPQ puisqu’en ne les respectant pas, l’employeur met en péril la santé de ses employés. Les recommandations de l’INSPQ ne sont que le reflet du gros bon sens à adopter dans la situation épidémiologique actuelle.

[38] Ces recommandations sont loin d’être excessives et n’exigent pas de l’employeur la prise de mesures coûteuses ou abusives. Elles deviennent impératives dans le contexte actuel.

[39] Le défaut de respecter ces recommandations minimales constitue de la négligence, ou à tout le moins de l’insouciance marquée, dans la mesure où leur but ultime est de prévenir davantage de décès tout en permettant aux travailleurs de se remettre au travail de façon sécuritaire.

La Cour du Québec conclut à une contravention de  l’employeur de l’article 51 (5) de la LSST et le condamne à payer une amende de 1 752 $.

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Teamsters Québec, local 931 et Brasseries Sleeman ltée (Benoit Bouchard), 2020 QCTA 542

https://soquij.qc.ca/portail/recherchejuridique/ConsulterExtExpress/49C10080FA103995F8C046A01EC04C9F?source=EXPTRAV

Dans cette affaire, l’arbitre Massicotte est saisie d’un grief contestant le refus de l’employeur de rémunérer un congé pris afin de remplir une obligation familiale. Le syndicat soutient qu’il s’agit d’une contravention de l’article 79.7 de la Loi sur les normes du travail (ci-après « L.n.t. ») donnant droit à deux journées de congé rémunérées par année pour des obligations familiales. Pour l’employeur, le travailleur n’a pas le droit à la rémunération pour cette journée parce qu’il s’agit du troisième congé rémunéré demandé depuis le début de l’année et, donc, ni la convention collective ni la L.n.t. ne prévoient de rémunération dans de telles circonstances.

Dans les faits, la convention collective accorde une banque de 64 heures (ou l’équivalent de 8 journées) de congés de maladie par année. De plus, les congés pour maladie et ceux pour raisons familiales sont visés par des articles distincts dans la convention. Au moment du congé litigieux, le travailleur s’était déjà absenté à trois reprises pour cause de maladie, pour un total de 17 heures. Le 17 janvier 2019, celui-ci s’absente pour agir à titre de proche aidant et informe son superviseur à l’effet qu’il prend un congé pour raisons familiales.

Le Tribunal est donc appelé à déterminer si l’employeur peut traiter indistinctement les congés de maladie et les congés familiaux aux fins de la rémunération prévue par la L.n.t.. Pour ce faire, l’arbitre fait une revue jurisprudentielle des décisions rendues depuis le changement législatif apporté aux articles 79.7 et 79.16 de la L.n.t. en 2019 et conclut en faveur de la thèse patronale. En effet, l’état du droit actuel sur la question veut qu’employeur n’est pas tenu de rémunérer plus de deux journées d’absence au cours d’une année lorsque le salarié s’absente pour l’un ou l’autre des motifs prévus aux articles 79.1 et 79.7 de la L.n.t., ce qui inclut autant les absences pour maladie que celles pour obligations familiales.

[19] Contrairement à la prétention du syndicat, selon laquelle seules les absences pour obligations familiales sont considérées dans l’application de l’article 79.7, l’article 79.16 vient préciser que pour les fins de la rémunération, les congés pour maladie ou obligations familiales sont traités indistinctement. Peu importe, que ce soit pour obligations familiales ou pour maladie, le droit au congé rémunéré se limite à deux jours.

Le grief est rejeté.

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POLICIERS ET POLICIÈRES

 

Association des policiers de la ville de Thetford Mines et Ville de Thetford Mines, 2020 QCTA 597

https://soquij.qc.ca/portail/recherchejuridique/Selection/4119466

Le Tribunal d’arbitrage est saisi de griefs déposés par l’Association des policiers de la Ville de Thetford Mines (ci-après le « syndicat ») alléguant que l’application d’une clause de la convention collective relative au versement rétroactif des augmentations salariales créée une distinction fondée sur l’âge et sur le statut d’emploi et, ce faisant, est discriminatoire et illégale à l’égard des salariés temporaires. En fait, le 23 mai 2019, une nouvelle convention collective entre en vigueur, selon laquelle l’employeur doit verser rétroactivement des augmentations de salaire aux policiers, ayant le statut de salarié régulier, qui ont quitté le service depuis le 1er janvier 2016. Cela a donc pour effet d’exclure de ce bénéfice les salariés temporaires qui ont également quitté depuis cette date.

Selon le syndicat, les plaignants font l’objet d’une discrimination fondée sur l’âge et sur le statut d’emploi ayant pour effet de leur accorder un traitement salarial différent des autres salariés, malgré qu’ils accomplissent un travail équivalent. Par conséquent, il s’agit d’une contravention aux articles 10 et 19 de la Charte des droits et libertés de la personne (ci-après la « Charte québécoise »), de l’article 15 (1) de la Charte canadienne des droits et libertés (ci-après la « Charte canadienne ») et de l’article 41.1 de la Loi sur les normes du travail (ci-après la « L.n.t. »). Pour sa part, l’employeur soulève l’absence de compétence de l’arbitre puisque ces salariés temporaires ne font plus partie de l’accréditation syndicale. Sur le fond, il prétend que l’exclusion des salariés temporaires est causée par l’absence de lien d’emploi et non leur âge. Aussi, si l’arbitre concluait à une disparité, celle-ci est basée sur les règles de l’ancienneté, ce qui est permis par la Charte québécoise. Enfin, si sa responsabilité est engagée, celle-ci doit être partagée avec le syndicat puisque les deux parties ont consenti à ladite clause.

En premier lieu, le Tribunal rejette le moyen préliminaire concernant l’absence de compétence. Il est vrai qu’en principe une convention collective n’a aucun effet pour des salariés qui ne sont plus à l’emploi. Or, les parties ont prévu dans la convention un élargissement du champ d’application à des salariés ayant quitté le service depuis le 1er janvier 2016. Ce faisant, l’arbitre a compétence pour juger la conformité des dispositions applicables aux ex-salariés avec les chartes ou les lois d’ordre public.

En second lieu, l’arbitre entreprend l’analyse de l’argument principal du syndicat, soit la discrimination fondée sur l’âge qui cause préjudice à des salariés temporaires et à leur droit à l’égalité de traitement salarial lorsqu’ils accomplissent un travail équivalent au même endroit. Pour ce faire, il analyse chacun des éléments constitutifs de la discrimination. L’arbitre rappelle également que le caractère discriminatoire d’une clause dépend de ses effets et, donc, l’intention ou la bonne foi importent peu.

  1. Existence d’une distinction ou exclusion qui consiste en une décision ou mesure qui touche la personne ou un groupe de personnes d’une manière différente ; 
  2. Le traitement différent doit être fondé sur un des motifs prohibés par les chartes ;
  3. Le traitement différent a pour effet de détruire ou de compromettre le droit à la pleine égalité dans les circonstances et l’exercice d’un droit.

D’abord, la clause entraîne effectivement une distinction et exclusion pour la rétroactivité salariale, alors que parmi les personnes ayant quitté le service depuis le 1er janvier 2016, seulement les salariés détenant le statut de régulier bénéficient des augmentations salariales rétroactives. Les temporaires se trouvant dans la même situation sont exclus. Ensuite, le motif prohibé en cause est l’âge (prévu aux articles 10 de la Charte québécoise et 15(1) de la Charte canadienne). Pour le Tribunal, la preuve démontre de façon prépondérante un lien entre l’âge des plaignants et le traitement distinct dont ils font l’objet. En effet, les salariés temporaires sont majoritairement plus jeunes que les réguliers. Les plus jeunes sont affectés par une règle d’exclusion sur la base de leur statut d’emploi. Il y a donc un lien entre l’âge et la distinction litigieuse. Enfin, la distinction impacte le droit des salariés temporaires à la pleine égalité du droit à un traitement salarial égal pour des salariés accomplissant un travail équivalent au même endroit.

[55] Les salariés à l’emploi du service à la signature de la convention collective et les salariés réguliers ayant quitté le service ont tous obtenu la rétroactivité salariale alors que les salariés temporaires qui ont quitté le service depuis le 1er janvier 2016, les plus jeunes, ont effectué le même travail sans avoir le même salaire. Il s’agit d’une disparité salariale fondée sur l’âge, ce qui est spécifiquement visé à l’article 19 de la Charte québécoise.

En quatrième lieu, l’arbitre rejette les arguments de l’employeur autant sur l’ancienneté que concernant le partage de responsabilité avec le syndicat. Conformément à la jurisprudence en la matière, la disparité salariale régie par l’article 19 de la Charte québécoise est une responsabilité qui incombe uniquement à l’employeur.

En dernier lieu, le Tribunal conclut à la contravention par l’employeur de l’article 41.1 de la L.n.t.. Cette disposition interdit des taux de salaires différents uniquement en raison du statut d’emploi, ce qui est le cas en l’espèce.

L’arbitre Garneau résume ainsi son analyse.

[5] Le Tribunal se déclare compétent et accueille le grief. La clause de rétroactivité a pour effet une surreprésentation de salariés dont le jeune âge est une caractéristique commune et qui n’ont pas droit au même traitement salarial que les salariés plus âgés. Cette différence de traitement ne repose pas sur l’ancienneté, de sorte qu’elle est discriminatoire. Les plaignants font également l’objet d’une disparité salariale fondée uniquement sur leur statut, ce qui contrevient à l’article 41.4 LNT. L’exclusion étant sans effet, les plaignants ont droit aux augmentations salariales. L’obligation d’accorder un salaire égal aux membres de son personnel repose uniquement sur l’employeur, ce qui a pour conséquence que la responsabilité du syndicat ne peut être retenue.

Les griefs sont accueillis.

Félicitations à Me Laurence Lorion pour cette belle victoire !

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Fraternité des policiers de la Ville de Mont-Tremblant et Ville de Mont-Tremblant, Tribunal d’arbitrage, 16 décembre 2020

Sur demande seulement.

Dans ce dossier, la Fraternité des policiers de la Ville de Mont-Tremblant (ci-après le « syndicat ») dépose des griefs en raison du refus systématique de l’employeur d’accorder tout congé mobile ou flottant si la demande du policier n’est pas faite au moins sept jours avant le début de son cycle de travail. Cette façon de faire découle d’une nouvelle directive interne adoptée par la Ville de Mont-Tremblant, au mois de février 2019, interdisant tout congé mobile ou flottant demandé à moins de sept jours précédant le début du cycle de travail. Or, le syndicat prétend que cela est contraire à la convention collective, puisqu’elle prévoit que lorsqu’une demande de congé est formulée dans ces délais, l’employeur se doit d’exercer sa discrétion.

Les parties conviennent que lorsqu’un policier soumet sa demande au minimum sept jours avant le début de son cycle de travail, l’employeur doit l’accorder, sous réserve que les ratios d’effectifs respectent les dispositions de la convention collective. À ce sujet, le syndicat allègue que toutes les demandes formulées dans un délai de sept jours ou moins, depuis le mois de février 2019, ont été refusées et, ce, malgré qu’elles n’affectaient pas les ratios minimum d’effectif requis. La convention collective octroie une discrétion à l’employeur qui l’oblige à, à tout le moins, analyser les demandes de congé. Toutefois, il refuse de le faire depuis l’adoption de la directive. Agir ainsi, selon le syndicat, constitue un exercice déraisonnable de son pouvoir discrétionnaire puisqu’il ne peut refuser les demandes sur cette simple base, les policiers ont droit à l’analyse de leur demande et aux motifs du refus, le cas échéant.

L’arbitre Massicotte donne raison aux arguments syndicaux. En effet, l’employeur, à travers sa directive, créé une nouvelle condition de travail contraire aux stipulations de la convention collective, puisque dans celle-ci on n’y prévoit pas de délai strict. Il s’agit plutôt d’une disposition qui accorde un pouvoir discrétionnaire à l’employeur, lequel doit l’exercer. Néanmoins, ce dernier instaure depuis février 2019 une interdiction formelle de recevoir et traiter les demandes de congé ne respectant pas le délai de sept jours avant le début du cycle de travail. Par conséquent, la directive n’est pas valide.

[49] En conclusion, j’estime que l’employeur ne peut instaurer une directive par laquelle il refuse systématiquement d’examiner les demandes de congés flottants ou mobiles simplement parce qu’elles sont déposées dans un délai inférieur à 7 jours précédant le début du cycle de travail du policier réclamant. En établissant une telle règle générale, il crée une interdiction qui ajoute aux conditions de travail prévues à la convention collective. Pour cette raison, sa directive interne émise en février 2019 est invalide.

Les griefs sont accueillis.

Félicitations à Me Andrew Charbonneau pour cette belle victoire !

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TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER

 

Rien à signaler. 


POMPIERS ET POMPIÈRES

 

Rien à signaler. 


ARTISTES

 

Rien à signaler. 


SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

 

R. c. Huynh, 2020 QCCQ 4545

https://www.canlii.org/fr/qc/qccq/doc/2020/2020qccq4545/2020qccq4545.pdf

Dans cette affaire, un policier du Service de police de la ville de Longueuil a plaidé coupable à l’infraction d’avoir volé pour plus de 5 000$ le contenu d’un sac à main retrouvé dans un cinéma. Il a également plaidé coupable d’avoir rédigé deux faux rapports. Le policier répondait à un appel d’un cinéma, qui rapportait avoir retrouvé un sac à main contenant entre 8 000 et 9 000$ en argent comptant. Le policier a par la suite rédigé un rapport indiquant qu’il avait remis le contenu du sac à la propriétaire, alors que ce n’était pas le cas. Le policier a par la suite reconnu sa culpabilité.

La juge Provost identifie les facteurs aggravants, soit la commission des deux actes criminels alors que l’accusé était dans l’exercice de ses fonctions comme policier, les actes de camouflage au moyen de deux faux rapports commis lors de deux journées distinctes afin de cacher son vol, l’abus de confiance en vertu de l’article 718.2 a) iii), la perte de plusieurs cartes bancaires et objets personnels accentuant le risque associé au vol d’identité et de fraudes bancaires et les manquements à son serment comme policier relativement à sa mission et à son code de déontologie.

La juge Provost énumère ensuite les facteurs atténuants, soit le plaidoyer de culpabilité aux deux chefs d’accusation ainsi que l’absence d’antécédents judiciaires. Elle retient également comme facteur atténuant les remords sincères exprimés par l’accusé lors de son témoignage. Enfin, le risque de récidive très faible, voire nul, est également considéré.

La juge Provost écarte l’octroi de l’absolution, puisqu’elle estime que cela serait contraire à l’intérêt public. Elle impose une peine d’emprisonnement discontinue de 60 jours sur le premier chef et de 30 jours sur le second chef, pour une peine globale discontinue de 90 jours d’emprisonnement.

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Tebourbi c. R., 2020 QCCA 1576

https://www.canlii.org/en/qc/qcca/doc/2020/2020qcca1576/2020qcca1576.pdf

Dans cet arrêt, l’appelant se pourvoit contre deux déclarations de culpabilité sur des chefs d’agression sexuelle.

Lors du procès de l’appelant, la poursuite invoque son intention de produire en preuve trois déclarations extrajudiciaires antérieures de la plaignante faites à trois personnes.  La poursuite annonce que dans l’éventualité où les déclarations extrajudiciaires sont admises, la preuve présentée lors du voir-dire sera également admise quant au fond. La juge se déclare satisfaite de cette manière de procéder, mais la défense ne manifeste pas son consentement. Suite au jugement prononçant l’admissibilité des déclarations antérieures de la plaignante, la juge admet également la preuve présentée lors du voir-dire.

Le juge Healy de la Cour d’appel est d’avis que la juge de première instance a erré en admettant la preuve présentée lors du voir-dire. En effet, le consentement explicite de la défense était nécessaire et la juge ne pouvait exercer son pouvoir discrétionnaire à cet égard. Un nouveau procès est ordonné.

Appel accueilli. Verdicts de culpabilité annulés. Ordonnance de nouveau procès.

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