SECTION DROIT DU TRAVAIL
GÉNÉRAL
Syndicat des fonctionnaires municipaux de Québec et Ville de Québec, 2021 CANLII 62594 (QC SAT)
https://www.canlii.org/fr/qc/qcsat/doc/2021/2021canlii62594/2021canlii62594.pdf
Cette décision s’intéresse à l’effet des décrets gouvernementaux sur les conditions de travail dans le contexte de la crise sanitaire liée à la COVID-19. Le Tribunal est saisi d’un grief syndical portant sur l’application du décret 2020-105, du 17 décembre 2020, et visant à obliger l’employeur à offrir l’exécution de la prestation de travail par télétravail aux agents du service à la clientèle. Auparavant, le Tribunal avait rejeté une requête pour ordonnance de sauvegarde puisque la décision recherchée aurait nécessairement décidé le fond du litige. Ensuite, un premier grief avait été rejeté concernant le décret 689-2020, du 25 juin 2020, au motif qu’il ne modifiait en rien les conventions collectives et le droit de gérance de l’employeur, il ne faisait qu’ordonner que le télétravail soit « privilégié ».
Dans le cadre du second grief, le passage pertinent du décret 2020-105 du 17 décembre 2020 se lit comme ainsi :
QUE tous les employés des entreprises, des organismes ou de l’administration publique qui effectuent des tâches administratives ou du travail de bureau continuent ces tâches en télétravail, dans leur résidence privée ou ce qui en tient lieu, à l’exception des employés dont la présence est essentielle à la poursuite des activités de l’entreprise, de l’organisme ou de l’administration publique.
D’abord, le Tribunal rejette les prétentions de l’employeur à l’effet que le second grief est frivole ou qu’il constitue « un deuxième essai » visant le même objectif. Notamment, la rédaction du décret 2020-105 diffère. Alors que le décret antérieur mentionnait l’obligation de privilégier le télétravail, celui-ci est davantage spécifique et limite le travail présentiel aux salariés dont la présence est essentielle à la poursuite des activités de l’entreprise. L’arbitre retient que la notion d’essentiel est ce qui est absolument nécessaire à la poursuite des activités et à l’accomplissement de la finalité de l’entreprise, sans incidence sur les opérations.
Néanmoins, malgré cette nouvelle formulation, la conclusion du Tribunal ne change pas. L’effet du décret demeure le même par rapport au droit de gérance de l’employeur et celui-ci ne vient pas modifier la convention collective en vigueur. En l’absence de dispositions spécifiques dans le contrat collectif de travail, la décision relève du droit de gérance. Cela limite grandement le pouvoir d’intervention de l’arbitre, lequel consiste uniquement à vérifier si la décision est abusive, discriminatoire ou de mauvaise foi. En l’absence de preuve à cet effet, l’exigence du travail présentiel est justifiée. Le Tribunal écrit :
[60] Il s’agit donc de vérifier la conformité des actes de l’employeur à ses obligations découlant du décret. Autrement dit, c’est à l’employeur de déterminer quels sont les employés qui sont essentiels à la poursuite de ses activités. Les faits amènent au même constat que la décision précédente :
[73] L’on ne peut pas conclure que la position est sans motif et que sa décision est de mauvaise foi ou abusive. Il a dû composer avec le télétravail au tout début de la pandémie et il retient de cette expérience des problèmes de connexion VPN, une dépendance à des réseaux internet faibles ou non fiables et à des problèmes de téléphonie. Il ne peut pas enregistrer les appels, ce qui est un irritant qu’il décrit comme étant majeur parce que l’absence d’enregistrement rend les agents vulnérables et prive l’employeur d’un outil de formation. Il a fait des démarches, infructueuses, pour tenter de résoudre ce problème.
Le grief est rejeté.
Grenier et Constructions LJP inc., 2021 QCTAT 2221 (CanLII)
https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2021/2021qctat2221/2021qctat2221.pdf
Ce dossier s’inscrit dans la foulée des décisions rendues par le Tribunal administratif du travail concernant le droit au retrait préventif pour les travailleurs immunosupprimés dans le contexte de la COVID-19. Le travailleur, un charpentier-menuisier dans le domaine de la construction, conteste la décision de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail ayant déclaré qu’il n’avait pas droit au retrait préventif.
Dans les faits, le travailleur souffre de la maladie de Crohn, laquelle lui a causé une polyathrite rhumatoïde. Sa condition nécessite la prise d’un médicament le rendant immunosupprimé. Ce faisant, il a demandé un retrait préventif en raison de son exposition à la COVID-19, sans succès.
Dès lors, le Tribunal doit déterminer si le travailleur a droit au retrait préventif en vertu de l’article 32 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (ci-après « LSST »). Selon cet article, un certificat médical attestant l’exposition à un contaminant comportant pour le travailleur des dangers doit être fourni à l’employeur. Ledit certificat peut être délivré par un autre médecin que le médecin responsable du service de santé de l’établissement consulté, pourvu que le directeur de la santé publique de la région soit avisé au préalable. Néanmoins, dans certaines circonstances, cette consultation peut ne pas être nécessaire. Le non-respect de cette exigence n’est pas une fin de non-recevoir au droit du travailleur au retrait préventif.
Il est à noter que, dans ce dossier, il n’y a pas de litige concernant le fait que la COVID-19 est un contaminant au sens de la LSST. La CNESST et la jurisprudence récente en cette matière le confirment.
Ensuite, le Tribunal se questionne à savoir si le travailleur est exposé à ce contaminant dans le cadre de son travail. Il y répond par l’affirmative. En effet, l’Institut national de santé publique du Québec a émis une série de règles sanitaires à respecter. La preuve est à l’effet que dans le milieu de travail, un grand chantier fortement peuplé, les règles de distanciation sociale, de lavage de mains et de désinfection des outils n’étaient pas respectées ou difficilement pouvaient l’être. Ces éléments confirment l’exposition du travailleur à la COVID-19.
Le Tribunal se prononce également sur une question qui ne fait pas l’unanimité auprès des juges administratifs, à savoir la notion d’altération de l’état de santé. Pour le travailleur, cette notion signifie toute altération à son état de santé et non uniquement une altération de son état de santé causée par le contaminant. Toute autre interprétation vide de son sens l’article 32 de la LSST et donne le résultat absurde que le travailleur doive se retrouver déjà en danger, pour pouvoir bénéficier du retrait préventif qui, au départ, a pour but d’éviter cette exposition. Cette exigence a pour effet de créer un vide juridique.
Pour trancher le débat existant, le Tribunal analyse les mots utilisés dans la LSST pour leur donner plein effet :
[95] Le mot « préventif » est défini dans le Larousse en ligne comme suit : « Qui est destiné à prévenir, à empêcher un mal, une maladie, etc., de se produire ; Traitement préventif ». Dans le dictionnaire Robert en ligne, « préventif » signifie : « Qui tend à empêcher (une chose fâcheuse) de se produire ».
[96] Prévenir, selon le dictionnaire Robert en ligne signifie : « Empêcher par ses précautions (un mal, un abus) ».
[97] Empêcher, selon le dictionnaire Robert en ligne signifie : « Empêcher qqch. [quelque chose] faire en sorte que cela ne se produise pas; rendre impossible en s’opposant (interdire). [Nos soulignements]
[98] Les mots sont clairs pour le Tribunal, un retrait préventif consiste à retirer quelqu’un pour éviter qu’un mal ne se produise.
[99] Quant à l’expression « eu égard », selon le Larousse, elle signifie : « en tenant compte ».
[100] En grammaire française, on met entre deux virgules une expression que l’on peut enlever ou déplacer ailleurs dans le texte, sans changer le sens de la phrase. De l’avis du Tribunal, d’ainsi placer l’expression « eu égard au fait que sa santé présente des signes d’altération » soit entre deux virgules, mène à conclure que c’est plutôt de « toute altération de l’état de santé » dont il est question.
[101] De l’avis du Tribunal, si le législateur voulait exiger que les signes d’altération de l’état de santé aient été causés par le contaminant, il était facile de l’écrire autrement et plus clairement, Le législateur choisit donc de ne pas être spécifique, alors qu’il aurait pu l’être.
Pour le Tribunal, l’objectif de l’article 32 de la LSST est d’accorder au travailleur le droit d’être retiré de l’exposition à un contaminant qui constitue un danger pour lui en raison d’une condition de santé, même personnelle. Conséquemment, le travailleur n’a pas à prouver que les signes d’altération à son état de santé ont été causés par l’exposition au contaminant.
[105] Le Tribunal conçoit difficilement que la Loi puisse exiger que le travailleur ait déjà été rendu malade en raison de son exposition à un contaminant avant de pouvoir demander d’en être protégé. N’est-ce pas là l’inverse de l’objet de la Loi ?
[106] De l’avis du Tribunal, est plus logique et s’arrime mieux avec l’objectif de la Loi, l’interprétation voulant que l’article 32 de la Loi prévoit qu’un travailleur peut être retiré de l’exposition à un contaminant qui constitue un danger pour lui, parce qu’il souffre d’une condition de santé qui peut être personnelle, comme dans notre cas, une personne immunosupprimée.
Enfin, la juge administrative conclut que l’exposition à la COVID-19 présente un danger pour le travailleur. Le texte de l’article 32 de la LSST réfère à un danger pour le travailleur tel qu’il est, soit avec une santé altérée, et dans le milieu de travail précis où il œuvre. Dans ce cas-ci, il s’agit d’un milieu qui ne permet pas le respect des règles sanitaires émises par l’INSPQ relatives au secteur de la construction. Compte tenu de l’avis du médecin du travailleur, des recommandations émises par l’INSPQ sur les mesures à prendre sur le plan sanitaire, du vécu du travailleur à son lieu de travail avant l’arrêt des activités, des conditions de travail décrites, dans un milieu supervisé par une personne qui ne croit pas à la pandémie, le Tribunal conclut que le danger était réel pour le travailleur vu son état et que le risque pour lui de contracter la COVID-19 et d’en développer des complications présentait une probabilité de concrétisation non négligeable.
La contestation est accueillie et le retrait préventif est accordé.
Gendarmerie royale du Canada et De L’Étoile, 2021 QCTAT 3492
https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2021/2021qctat3492/2021qctat3492.pdf
Dans ce dossier, la Gendarmerie royale du Canada (ci-après « employeur ») dépose une requête en révision ou en révocation, en vertu de l’article 49 Loi instituant le Tribunal administratif du travail (ci-après « LITAT »), à l’encontre d’une décision par laquelle le TAT accueillait la requête incidente de la travailleuse et ordonna à l’employeur de déposer l’expertise du docteur Paul Beaudry au dossier.
Tout d’abord, le Tribunal rappelle que la requête en révision ou révocation d’une décision au motif qu’elle comporte un vice de fond ou de procédure de nature à l’invalider est exceptionnelle. En effet, cette requête ne doit pas constituer un appel déguisé ou une répétition de la même procédure. Pour y donner droit, il faut que la décision attaquée soit entachée d’une erreur dont la gravité, l’évidence et le caractère déterminant ont été démontrés par la partie qui demande la révision. Cette procédure ne peut pas être l’occasion pour une partie d’inviter le Tribunal à substituer son appréciation de la preuve et son opinion à celles du décideur initial.
Cette requête s’inscrit dans un historique judiciaire de longue date. En 2015, l’employeur conteste la reconnaissance d’un accident de travail devant le Tribunal. Durant la gestion de l’audience, l’employeur décide de faire expertiser la travailleuse. Or, il communique ensuite au Tribunal qu’il n’entend pas déposer ladite expertise, ni la communiquer à la travailleuse, invoquant le privilège relatif au litige. Dès lors, cette dernière dépose une requête incidente pour le contraindre à remettre une copie de l’expertise. Les instances se succèdent et, en 2019, la Cour d’appel entend l’affaire. Celle-ci accueille l’appel déposé par l’employeur au motif que le TAT a erré dans son évaluation du privilège relatif au litige et retourne le dossier au Tribunal.
[28] La Cour d’appel indique :
– que le privilège relatif au litige est considéré comme une exception limitée au principe de la divulgation complète de la preuve;
– que le privilège relatif au litige protège contre la divulgation forcée de documents et de communications dont l’objet principal est la préparation d’un litige;
– que le privilège relatif au litige demeure (1) un privilège générique (2) sujet à des exceptions clairement établies, et non à une mise en balance au cas par cas, et (3) opposable aux tiers, y compris aux tiers enquêteurs ayant une obligation de confidentialité;
– que le privilège relatif au litige (reconnu par la common law) fait naître une présomption d’inadmissibilité pour les communications dont l’objet principal est la préparation d’un litige;
– que l’on doit présumer qu’un législateur n’a pas l’intention de modifier les règles de common law existantes à moins d’une disposition claire à cet effet;
– qu’il est donc déraisonnable, eu égard à l’importance fondamentale du privilège relatif au litige, de conclure que les articles 9 et 10 de la LITAT et 6 et 9 de la Loi sur les commissions d’enquête contiennent des termes suffisamment clairs, explicites et non équivoques pour l’écarter;
– que le privilège relatif au litige ne s’oppose pas à l’impératif de recherche de vérité qui est au cœur des pouvoirs du Tribunal, au contraire;
– que la règle de l’autonomie qui caractérise la justice administrative ne permet pas d’écarter le privilège relatif au litige;
– que bien que le Tribunal jouisse d’une grande autonomie en matière de preuve, il doit s’en tenir aux exceptions déjà reconnues ou à celles pouvant l’être, mais toujours sur la base de catégories restreintes qui s’appliqueront dans des circonstances précises; et
– que le litige devant le Tribunal n’est pas étranger à la mission d’ordre public que la Loi lui confie et qui consiste à « s’assurer, en matière de réparation, que les travailleurs obtiennent ce à quoi ils ont droit, ni plus ni moins ».
C’est dans ce contexte que le Tribunal rend la décision attaquée par la requête en révision ou révocation. Ce dernier concluait qu’une exception au privilège relatif au litige, fondée sur l’objet et l’économie de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (ci-après « LATMP »), trouve application et ordonne à l’employeur de déposer l’expertise.
Or, le Tribunal en révision retient les arguments de l’employeur et conclut que la décision initiale comporte un vice de fond de nature à l’invalider puisque l’exception qu’elle reconnaît au privilège relatif au litige ne cadre pas avec les enseignements jurisprudentiels sur la question. Le privilège relatif au litige jouit d’une importance fondamentale pour l’administration de la justice et joue un rôle essentiel dans le système judiciaire qui, par conséquent, commandent une prudence considérable avant d’en écarter son application :
[68] L’exception reconnue par TAT-1 non seulement implique d’emblée la relégation au second plan du privilège relatif au litige de façon systématique, sans « circonstances précises » et sans considération apparentes pour son importance fondamentale, mais surtout elle porte atteinte directement au droit fondamental à une défense pleine et entière de l’employeur au détriment d’un débat juste et loyal. Ce qui constitue en soi un vice de fond de nature à invalider la décision.
[69] Comme déjà mentionné, en dehors du cadre de la procédure d’évaluation médicale, la Loi ne contient aucun texte suffisamment clair, explicite et non équivoque qui permette d’écarter le privilège relatif au litige. De ce fait, TAT-2 considère que TAT-1 commet une erreur manifeste en prêtant au législateur l’intention voulant que tout examen médical d’un travailleur doive être divulgué sans égard au privilège relatif au litige. D’autant si l’on considère la précision apportée par le législateur à l’article 215 voulant que ce sont copies des rapports obtenus en vertu de la présente section qui doivent être transmis au travailleur.
[70] Avec respect, TAT-2 estime que la décision de TAT-1 comporte aussi un vice de fond de nature à l’invalider parce qu’il n’est pas permis de comprendre en quoi, sans la mise à l’écart du privilège relatif au litige par l’exception reconnue, le Tribunal ne pouvait, et pourrait ainsi accomplir sa mission d’ordre public, jouer son rôle de gardien du régime et remplir son devoir de juste indemnisation. Il n’est pas davantage permis de comprendre en quoi l’exception reconnue permettrait au Tribunal d’y parvenir de meilleure manière.
Ainsi, le Tribunal mentionne que, malgré l’objectif de la LATMP qui consiste à assurer la juste indemnisation des travailleurs, cela ne justifie pas la mise à l’écart automatique du privilège relatif au litige. Ce principe vise à assurer l’efficacité du processus contradictoire en maintenant une zone protégée destinée à faciliter pour l’avocat, l’enquête et la préparation du dossier en vue de l’instruction. Bien que ce privilège ne doive servir de prétexte afin de se soustraire à la divulgation de la preuve, aucune exception reconnue ne trouve application et la décision est révisable.
[98] Cependant, en considération de l’importance fondamentale du privilège relatif au litige dans l’administration de la justice et du rôle essentiel qu’il joue dans le système judiciaire, laquelle se reflète dans la nature des quelques rares exceptions déjà reconnues et du fardeau qu’implique leur mise en application, de l’importance que lui accordent les tribunaux supérieurs ainsi que des pouvoirs dont disposent le Tribunal qui lui permettent déjà d’accomplir pleinement et adéquatement sa mission d’ordre public, jouer son rôle de gardien du régime et remplir son devoir de juste indemnisation, TAT-2 juge que le régime d’indemnisation créé par la Loi ne permet ni ne justifie de reconnaître une nouvelle exception dans le cas d’un rapport obtenu à la suite de l’examen médical d’un travailleur.
La requête en révision ou en révocation est accueillie.
POLICIERS ET POLICIÈRES
Fraternité des policiers et policières de Mascouche et Ville de Mascouche, 2021 CanLII 60688 (QC SAT)
https://www.canlii.org/fr/qc/qcsat/doc/2021/2021canlii60688/2021canlii60688.pdf
Le Tribunal d’arbitrage est saisi de deux griefs visant le même salarié, technicien en identité judiciaire. Dans le premier, le salarié allègue que le comportement de son supérieur immédiat a eu pour effet de l’empêcher de s’exprimer lors d’un rassemblement auquel il participait en soutien à des collègues de travail cités en discipline. Par l’action de l’employeur, il considère que sa liberté d’expression est atteinte et réclame réparation pour le préjudice moral qui en a résulté. Dans le second, le salarié conteste la suspension d’une journée que lui a été imposé pour avoir refusé d’accomplir son travail et d’avoir adopté une attitude irrespectueuse envers son supérieur.
À l’époque des faits litigieux, la convention collective est échue depuis 17 mois. Le syndicat et ses membres exercent des moyens de pression, dont le posage de multiples affiches sur les murs du poste de police, par lesquelles ils manifestent leur mécontentement et il en découle des relations de travail tendues.
Pour ce qui est du premier grief, le salarié prétend que l’employeur l’a brimé dans son droit de s’exprimer librement en ne lui permettant pas de coller une pancarte sur la fenêtre de la salle où se déroulaient des auditions disciplinaires. Devant cette allégation, l’arbitre Massicotte fait une revue de la jurisprudence en matière de liberté d’expression, liberté fondamentale protégée par l’article 3 de la Charte des droits et libertés de la personne (ci-après « Charte »). À cet égard, le Tribunal rappelle que les droits garantis par les Chartes doivent recevoir une interprétation large et libérale et doivent être examinés dans le contexte propre à chaque dossier. L’importance de la liberté d’expression dans le cadre particulier des relations de travail a été confirmée à maintes reprises par la Cour suprême du Canada. Or, celle-ci n’est pas absolue. Ce n’est pas toute activité susceptible de transmettre un message qui est protégée. Ainsi, l’intervention de l’employeur lorsqu’une pancarte est apposée avec du ruban sur la fenêtre d’une salle de conférence pendant qu’une audience disciplinaire est en cours et qu’elle pouvait en perturber le déroulement est permise. Le premier grief est rejeté. Le Tribunal s’exprime ainsi :
[24] On ne parle pas ici d’autocollants ou de macarons apposés sur des vêtements de travail qui ne nuisent d’aucune façon aux activités de l’employeur. Dans la présente affaire, le droit de propriété de l’employeur s’en trouvait troublé de même que ses activités entravées. L’activité expressive de M. Dumouchel était, en l’espèce, incompatible avec les lieux où elle s’exerçait. Dans les circonstances propres à cette affaire, je considère que la balance entre l’objectif du Service de conduire des audiences disciplinaires sans entrave penche en faveur de la restriction du droit à la liberté d’expression.
[26] En l’espèce, je conclus que l’employeur n’a pas enfreint la liberté d’expression de M. Dumouchel, mais il a plutôt usé de son droit de gérance pour permettre le bon déroulement d’une audition disciplinaire qui avait lieu dans son établissement. La liberté d’expression permet de manifester et d’exprimer son mécontentement quant à une situation de travail, mais elle ne permet pas de nuire au déroulement des activités légitimes de l’employeur dans ses propres locaux ou de brimer son droit de propriété.
Pour le second grief, l’arbitre Massicotte ne retient pas la thèse de l’employeur au sujet de l’insubordination du salarié comme justification à l’imposition de la mesure disciplinaire d’une journée de suspension. D’abord, le reproche basé sur le pouvoir de l’employeur de rappeler au travail un policier en tout temps en dehors des heures régulières de travail n’est pas fondé. En effet, le salarié, durant sa journée de congé, s’était simplement déclaré non disponible pour ensuite accepter de faire le travail demandé, soit de couvrir une scène de crime, mais un peu plus tard dans la journée. Le Tribunal considère que, malgré le délai occasionné par le salarié avant d’accomplir le travail, on ne peut lui reprocher de l’insubordination dans un contexte où les relations de travail étaient ardues et que l’employeur n’avait jamais utilisé auparavant le pouvoir conféré par la convention collective afin de rappeler au travail un policier en dehors de ses heures régulières de travail. Conséquemment, le second grief est partiellement accueilli et la sanction imposée est diminuée pour y substituer un avertissement verbal.
TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER
Rien à signaler.
POMPIERS ET POMPIÈRES
Rien à signaler.
ARTISTES
Rien à signaler.
SECTION DROIT CRIMINEL
GÉNÉRAL
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