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Veille juridique du 3 décembre 2019

SECTION DROIT DU TRAVAIL

Général

 

Marillanca Gonzales et Sushi Shop Campus inc. 2019 QCTAT 4849

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2019/2019qctat4849/2019qctat4849.pdf

Le travailleur, d’origine chilienne, est détenteur d’un permis de travail des autorités compétentes afin de travailler comme cuisinier chez Sushi shop. N’ayant pas procédé au renouvellement de son permis de travail en juillet 2017, le travailleur continue d’exercer son emploi sans statut officiel, se fiant à son employeur pour la gestion de son dossier avec l’immigration.

Le 7 décembre 2017, le demandeur dépose une réclamation à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (la Commission) alléguant être atteint d’une maladie professionnelle, soit une tendinite de l’épaule droite, résultant des répétitions de mouvements accomplis dans le cadre de son travail.

La Commission rend une décision sur admissibilité favorable au travailleur. Or, le 3 avril 2018, la Commission reconsidère sa décision du 20 décembre 2017. Elle avise le travailleur que « le 6 novembre 2017 date de l’accident de travail vous n’étiez pas un travailleur en règle » et que « votre réclamation est maintenant refusée ». Ainsi, considérant que le permis de travail du plaignant n’est pas à jour et en règle, la Commission décide que celui-ci n’est pas un plaignant au sens de la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles.

Le Tribunal infirme cette décision. En raison du caractère social de cette loi, on doit interpréter les protections de la loi de manière large et libérale. Ne doutant pas de la croyance sincère du travailleur, le Tribunal est d’avis que la législation en matière d’immigration n’affecte pas l’étendue de la loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles.

[47] Dans les circonstances révélées par la preuve, le fait que le demandeur n’ait pas été détenteur d’un permis de travail valide en vertu des lois et règlements applicables en matière d’immigration au moment où sa maladie s’est manifestée, le 6 novembre 2017, ne le prive pas du statut de travailleur au sens de la Loi.

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FCM Recyclage inc. et Demers 2019 QCTAT 4755

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2019/2019qctat4755/2019qctat4755.pdf

La travailleuse est à l’emploi de FCM Recyclage depuis 2010, au poste d’ouvrière de plancher niveau 1. En mars 2016, elle a commencé à ressentir graduellement des douleurs aux poignets et des engourdissements aux mains sur une période d’environ 3 semaines. Le 7 avril 2016, elle consulte un médecin qui retient un diagnostic de syndrome du tunnel carpien bilatéral et cesse de travailler. La Commission refuse sa réclamation.

L’employeur estime que la travailleuse n’a pas subi de maladie professionnelle, puisqu’elle n’est pas exposée aux facteurs de risque pouvant causer un diagnostic de syndrome du tunnel carpien et qu’elle n’a pas non plus démontré que ce diagnostic est caractéristique du travail exercé. La question soulevée dans cette affaire est de déterminer si les tâches de la travailleuse comportent des facteurs de risque suffisants pour entrainer un syndrome de tunnel carpien bilatéral.

[16] Pour être considérée comme un facteur de risque, la force exercée par les mains doit, selon les études invoquées, être un effort puissant de plus de 3 kg, 4 kg ou de 4.5 kg et une posture du poignet est considérée contraignante à plus de 45 degrés de flexion, et à partir de 32 degrés pour certains auteurs, mais plus généralement à partir de 45 degrés d’extension du poignet sans nécessité d’évaluer la déviation cubitale ou radiale. Pour les auteurs qui considèrent nécessaire de considérer les déviations radiales et cubitales, les postures extrêmes se situent respectivement autour de 22 degrés et de 20 degrés. La force en pince de plus de 0,9 kg, qui était considérée à risque pour le développement du syndrome du tunnel carpien, semble ne plus faire consensus selon les diverses études recensées par l’AMA. Pour les fins de notre dossier, nous prendrons quand même ce facteur en considération.

[17] Pour que la répétitivité soit considérée à risque, il faut une fréquence de mouvements supérieure à 20 par minute pour les poignets et supérieure à 200 par minute au niveau des doigts11 sur des cycles de 10 secondes et durant plus de 50 % du cycle de travail.

Suite à l’analyse de ces critères, le Tribunal en arrive à la conclusion que les répétitions de la travailleuse ne sont pas suffisantes pour engendre le diagnostic soumis à la Commission.

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Alakozai c. Procureur général du Canada 2019 CF 550

https://www.canlii.org/fr/ca/cfpi/doc/2019/2019cf550/2019cf550.pdf

Dans cette affaire, le demandeur, un employé de la GRC, demande un statut de confidentialité « très secret », ce qui a pour effet de modifier son poste. Au sein de la GRC, on peut acquérir une cote de fiabilité approfondie (CFA). Le demandeur a la double citoyenneté canadienne et afghane. Il est né en Afghanistan, mais il a quitté son pays en 1999 pour venir au Canada. Il est actuellement établi à Ottawa avec son épouse afghane et leurs enfants, tandis que la plupart des membres de sa famille immédiate, y compris ses frères, résident en Afghanistan. En septembre 2015, le demandeur a présenté une demande pour devenir un membre régulier de la GRC, ce qui exige l’obtention d’une autorisation de sécurité de niveau « très secret » pour pouvoir travailler dans les installations de la GRC. S’en suit un processus de filtrage par lequel les candidats sont questionnés et enquêtés. Au cours de cette enquête, on manifeste certaines inquiétudes par rapport aux relations entretenues par le demandeur sur les réseaux sociaux. À la fin du processus, la candidature du demandeur est rejetée. La GRC considère que celui-ci a manqué de jugement en raison de ce qu’il affiche sur son compte Facebook.

En l’espèce, la principale question en litige consiste à déterminer s’il était raisonnable pour le directeur de rejeter la demande de CFA du demandeur à la lumière des éléments de preuve dont il disposait. La Cour a fait remarquer que le demandeur a bénéficié d’une procédure équitable tout au long du processus de filtrage de sécurité, étant donné qu’il a eu l’occasion de réagir aux préoccupations de l’enquêteur. Après sa deuxième entrevue avec celui-ci, le demandeur a également eu l’occasion de corriger ses erreurs, ce qu’il n’a pas fait. Par conséquent, il n’a pas été en mesure de convaincre la GRC qu’il n’y avait aucune raison de douter de sa fiabilité ou de sa loyauté dans le cadre du traitement de renseignements de nature délicate au sein de l’organisation.

Ainsi, en vertu du pouvoir discrétionnaire dont possède le Directeur et en l’absence de preuve que le comportement de l’enquêteur était déraisonnable dans les circonstances, la Cour rejette la demande de pourvoir du demandeur.

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Policiers

Gamache Khoukaz c. Dowd 2019 QCCQ, 2 décembre 2019

Sur demande seulement

Dans cette affaire, une policière et son sergent exercent leurs fonctions pendant les manifestations étudiantes de 2012. Le commissaire leur reproche leur interaction avec deux citoyens pendant cette manifestation. À la suite des plaintes déposées par les plaignants, le commissaire retient deux chefs, soit d’avoir refusé de s’identifier et d’avoir tenu des propos injurieux à l’endroit d’un des plaignants.

Le Comité de déontologie policière a donné raison au commissaire à la déontologie policière dans une décision du 28 mars 2018. Les policiers ont contesté cette décision devant la Cour du Québec. Le juge maintient la décision du Comité sur tous les chefs et les sanctions applicables. Notamment, le tribunal précise que le fait de pointer avec une pièce d’équipement son matricule peut ne pas être suffisant en certaines occasions. Lors de son intervention, l’agente Gamache-Khoukaz a pointé à deux reprises avec son bâton télescopique son casque sur lequel était identifié son numéro de matricule. Croyant que ce mouvement répété était amplement suffisant pour s’identifier, elle n’a pas verbalisé son numéro de matricule à la plaignante. Le tribunal est d’avis qu’en raison de la position de sa visière, il était impossible pour la plaignante de bien voir le numéro de matricule. Malgré l’absence d’intention malveillante ou malicieuse de la policière, la Cour du Québec juge qu’un policier a un devoir objectif de s’identifier, c’est-à-dire que l’intention de celui-ci n’est pas prise en compte. Du moment où un citoyen manifeste une demande d’identification, le policier doit prendre les moyens pour s’assurer de bien s’identifier.

En ce qui a trait au deuxième policier, le tribunal retient qu’il a induit le citoyen en erreur en mentionnant un autre numéro que son numéro de matricule. La Cour ne retient pas la version policière.

Appel rejeté.

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Pompiers

Rien à signaler.

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Paramédics

Rien à signaler.

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Artistes

 Rien à signaler.

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SECTION DROIT CRIMINEL

Général

R. c. Deschesnes, 2019 QCCQ 6429

https://www.canlii.org/fr/qc/qccq/doc/2019/2019qccq6429/2019qccq6429.html?autocompleteStr=R.%20c.%20Deschesnes%2C%202019%20QCCQ%206429%20(CanLII)&autocompletePos=1

Procès conjoint de Deschêsnes, Chabot et Tremblay, trois hauts gradés de la Sûreté du Québec, pour des accusations de fraude et d’abus de confiance. Les faits reprochés portent sur des ententes de terminaison d’emploi de Chabot et Tremblay moyennant une contrepartie financière. La poursuite allègue que ces ententes ont été conclues clandestinement et que les montants ont été versés en utilisant des dépenses secrètes d’opération « DSO » libres d’impôt.  La juge Bélanger conclut que les ententes sont le résultat de l’exercice du pouvoir discrétionnaire du D.G., tel que le conçoit Deschêsnes, soit des ententes légitimes, et pas nécessairement légales faites dans l’intérêt ultime de la S.Q (par. 649). Ces ententes sont faites pour régler des situations spécifiques non prévues à la loi et qui peuvent parfois dégénérer. Fidèles à la culture de l’organisation et pour éviter la judiciarisation et la confrontation, c’est pour ces raisons que les D.G. les concluent.

 

La juge Bélanger acquitte Deschêsnes au motif que son comportement doit s’analyser selon les normes de conduite applicables au moment des événements, plutôt qu’en fonction des normes actuelles. Son comportement s’inscrit dans un contexte de mauvaises pratiques administratives qui régnaient à la S.Q. Au surplus, la poursuivante n’a pas démontré hors de tout doute raisonnable la mens rea de l’infraction. Le Tribunal a retenu de la preuve que les gestes posés par Deschêsnes l’ont été dans l’intérêt de la S.Q. (par. 791)

La juge Bélanger acquitte également Chabot car les gestes qu’il a posés n’atteignent pas le degré de gravité requis pour établir l’actus reus de l’abus de confiance. De plus, la mens rea n’est pas prouvée. La preuve démontre que Chabot a agi selon les décisions du D.G. Deschêsnes et qu’il a répondu à ses demandes dans l’intérêt de la S.Q. De plus, il a perçu une indemnité qui selon lui, lui était due aux termes d’une entente légitime. De plus, il n’est pas démontré que Chabot ait usé de sa charge à des fins autres que l’intérêt public.  (par. 840 à 848)

La juge Bélanger acquitte finalement Tremblay. Selon la Cour suprême dans l’arrêt Boulanger, la mens rea a toujours été associée au fait que le fonctionnaire utilisait sa charge dans un objectif de malhonnêteté, de partialité, de corruption ou d’abus, lesquels représentent le motif « non public » visé par l’infraction.   Certes, Tremblay a reçu une indemnité qui peut être qualifiée « d’avantage personnel » mais aussi de dédommagement, selon une entente qui d’après lui était légitime et faite sous l’autorité du D.G. de la S.Q.

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R. c. Robert, 2019 QCCQ 5702

https://www.canlii.org/fr/qc/qccq/doc/2019/2019qccq5702/2019qccq5702.html?autocompleteStr=R.%20c.%20Robert%2C%202019%20QCCQ%205702&autocompletePos=1

Le requérant est accusé d’avoir conduit un véhicule avec les facultés affaiblies. Il a été interpellé par un policier à 8 h après avoir effectué une manœuvre de dépassement dangereuse. Il a été arrêté à 8 h 10 après avoir échoué au test administré à l’aide de l’appareil de détection approuvé. Le policier, estimant que le véhicule du requérant était immobilisé de manière à provoquer une congestion de la circulation, a demandé l’assistance d’une remorqueuse, laquelle est arrivée à 8 h 45. Le requérant a alors été conduit au poste de la Sûreté du Québec (SQ), situé à 1 kilomètre des lieux de l’interception, où il a pu communiquer avec un avocat. Les échantillons d’haleine ont été prélevés à 9 h 13 et 9 h 32. L’accusé demande l’exclusion de la preuve sous le paragraphe 24(2) de la Charte.

 

Le juge Lacoursière conclut que les policiers n’avaient pas l’obligation de permettre à l’accusé d’avoir accès aux conseils d’un avocat au bord de la route pendant l’attente de la remorqueuse. Toutefois, rien n’empêchait les policiers d’adopter des mesures afin d’abréger les délais de l’intervention, qui s’annonçait inutilement longue. En effet, la preuve démontre que le véhicule du requérant pouvait être garé sur l’accotement sans nuire à la circulation. Par ailleurs, aucune vérification n’a été effectuée pour savoir si un autre agent était disponible afin de surveiller le remorquage du véhicule et ainsi permettre de conduire rapidement le requérant au poste de la SQ. Plutôt que d’être proactifs, les agents ont fait preuve d’attentisme, de telle sorte qu’un délai de 46 minutes s’est écoulé avant que le requérant ne soit en mesure d’exercer son droit de consulter un avocat, portant à 63 minutes le délai entre son arrestation et la prise du premier échantillon d’haleine. Ce délai est inexplicable et déraisonnable dans les circonstances, d’autant plus que le poste de la SQ est situé à moins de 1 kilomètre des lieux de l’interception. Ainsi, force est de conclure que la démarche des policiers en l’espèce constitue une violation des droits constitutionnels du requérant protégés par la Charte.

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R. c. Paulin, 2019 QCCQ 6030

https://www.canlii.org/fr/qc/qccq/doc/2019/2019qccq6030/2019qccq6030.html?resultIndex=1

Les policiers sont arrivés sur les lieux d’un accident impliquant 2 véhicules automobiles, dont celui du requérant. Ce dernier a échoué au test effectué au moyen de l’ADA à 0 h 25. Il a été mis en état d’arrestation après avoir été informé de son droit à l’assistance d’un avocat, puis il a été menotté et placé à l’arrière du véhicule de patrouille à 0 h 32. Les policiers ont ensuite administré le test de l’ADA à l’autre conducteur impliqué dans l’accident avant d’appeler 2 remorqueuses à 0 h 49, lesquelles sont arrivées à 1 h 19. L’accusé s’est vu offrir de communiquer avec un avocat peu après son arrivée au poste de police. Il était alors détenu depuis 83 minutes. Le policier a appelé l’avocat choisi par le requérant 1 seule fois et il n’a pas laissé de message.

La juge Desaulniers estime que rien ne justifie le fait que les policiers ont attendu 25 minutes après l’arrestation du requérant pour requérir la présence de remorqueuses. Le droit du requérant à l’assistance de l’avocat de son choix a été enfreint en raison de l’insuffisance des explications des policiers quant à la possibilité de laisser un message à un avocat en particulier et de bénéficier d’un délai raisonnable pour permettre à ce dernier de rappeler. Ainsi, si le requérant a accepté de parler à un avocat de l’aide juridique, ce n’est pas parce qu’il a renoncé à son droit de communiquer avec celui de son choix, mais plutôt parce que le policier ne lui a pas offert d’autres options. La preuve est exclue.

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