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Un organisme public peut-il cacher le montant des honoraires professionnels qu’il débourse dans le cadre d’un litige ?

Me Amélie Soulez

 

Cette question a fait l’objet d’un long débat judiciaire dans le cadre de l’affaire Kalogerakis[1]. Dans ce dossier, qui a fait l’objet d’un arrêt de la Cour d’appel, monsieur Kalogerakis demande à deux (2) commissions scolaires de l’informer de la somme totale des honoraires d’avocats engagés en défense relativement à une action collective. Il demande également à une ville de divulguer le montant total des honoraires encourus relativement à des actions intentées par un citoyen contre celle-ci, plus particulièrement en déontologie policière et en responsabilité civile. 

La Cour d’appel devait se prononcer sur la question suivante : est-ce que les honoraires engagés par les intimés se situent dans la sphère du secret professionnel ? La Cour d’appel énonce que la divulgation du montant total des honoraires ne viole pas le secret professionnel en ce qu’elle ne permet pas de révéler la nature des services rendus, les conseils ou les avis donnés. La Cour d’appel tient également compte du fait que les dossiers et les décisions rendues dans ces litiges sont de nature publique. Ainsi, le total des honoraires ne révèle rien de confidentiel. La Cour d’appel applique également un test en deux (2) étapes qui sera probablement repris dans des causes futures :  

La première étape du test consiste à se demander si l’information recherchée par le demandeur d’accès est couverte par le secret professionnel;

Advenant que la réponse à la première question soit positive, il y a lieu de répondre à la question suivante : S’agit-il de l’un des rares cas où il est justifié d’écarter le secret professionnel ?

Dans l’affaire Kalogerakis, la Cour d’appel met un terme à son analyse à la première étape du test en concluant que le privilège avocat/client ne s’applique pas au montant total des honoraires d’avocats. Dès lors, la seconde question ne se pose pas.

Il est intéressant de noter que, dans cette affaire, les intimées plaidaient que la divulgation des montants permettrait de révéler l’ampleur des moyens mis en œuvre dans le cadre de leur défense. La ville prétendait qu’elle pourrait être dans l’obligation de renoncer au secret professionnel si, dans le cadre d’un débat public sur le montant des honoraires, elle désirait remettre en contexte le montant astronomique des honoraires engagés afin de les justifier aux citoyens. La Cour d’appel rejette les arguments de la ville en signalant que le secret professionnel permet à une ville de se défendre contre ceux qui la poursuivent en justice, mais ce droit ne saurait la dégager de son imputabilité à l’égard de ses administrés.

Les impacts d’une telle décision n’ont pas encore été ressentis en jurisprudence. Il aurait été intéressant de voir les impacts d’une telle décision dans le cadre du projet de loi 179 modifiant la Loi sur l’accès[2], présenté par la députée Kathleen Weil. Ce projet de loi visait notamment à favoriser l’accès et la transparence. Or, avec le changement de gouvernement, le projet est mort au feuilleton.

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[1] Kalogerakis c. Commission scolaire des patriotes, 2017 QCCA 1253.

[2] PL 179, Loi modifiant la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, 1er session, 41e légis. Québec.