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Veille juridique du 11 avril 2023

PAR ME BÉATRICE PROULX ET ME GENESIS R. DIAZ

 

SECTION DROIT DU TRAVAIL

GÉNÉRAL

 

Syndicat des débardeurs, SCFP, section locale 375 c. Association des employeurs maritimes, 2023 QCCA 391 (CanLII) 

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jwd74

Le requérant (« le Syndicat ») demande la permission d’appeler d’un jugement rendu par la Cour supérieure accueillant le pourvoi en contrôle judiciaire de l’intimé (« l’Employeur ») et qui annule la sentence arbitrale rendue par Me Denis Provençal (« l’Arbitre »), le mis en cause. Le juge de la Cour supérieure avait ordonné qu’un autre arbitre entende de nouveau le grief en question.

Initialement, l’Arbitre avait accueilli le grief déposé par le Syndicat et lui donnait raison quant au fait que l’Employeur a l’obligation de former les candidats amarreurs. À ce titre, l’Arbitre a ordonné à l’Employeur de mettre en place une formation d’amarreurs avec un formateur dument formé, et non par les chefs d’équipe. Le juge de la Cour supérieure a considéré que la sentence arbitrale manquait de cohérence et d’intelligibilité relativement au rôle des chefs d’équipe dans la formation.

Devant la Cour d’appel, le Syndicat fait valoir trois moyens d’appels. Essentiellement, ce dernier soumet que le juge commet des erreurs de fait ainsi qu’une erreur de droit en substituant sa compréhension de la preuve et sa lecture de la convention collective pour celle de l’Arbitre à l’encontre de l’enseignement de la Cour suprême dans l’arrêt Vavilov.

La Cour d’appel rejette la demande du Syndicat sur la base de l’article 30 du Code de procédure civile. Le juge Mark Schrager considère que si un juge de la Cour supérieure siégeant en contrôle judiciaire se méprend sur les faits ou, comme il est soumis en l’espèce, sur l’interprétation de la preuve et l’application de la convention collective, ceux-ci ne satisfont pas en soi les critères pour l’octroi de la permission.

La demande pour permission d’appeler est rejetée. Le dossier est retourné devant l’arbitre.

 

 

Syndicat professionnel des ingénieurs d’Hydro-Québec inc. et Hydro-Québec (grief collectif), 2023 QCTA 91 

Disponible sur SOQUIJ

Le syndicat dépose un grief collectif contestant la décision de l’employeur de ne pas verser aux salariés en télétravail une indemnité minimale de cinq (5) heures lorsqu’ils sont rappelés au travail de façon urgente ou planifiée. Dans la nouvelle convention collective, les parties ont ajouté une indemnité, moins élevée que la première, pour les rappels n’exigeant pas que la personne salariée revienne sur les lieux du travail. L’employeur considère donc que les rappels exécutés en télétravail sont assujettis à cette indemnité élevée puisque l’ingénieur n’est pas requis de se déplacer dans les locaux de l’employeur. Le syndicat soutient plutôt qu’il faut tenir compte de l’intégration du télétravail dans la nouvelle convention et qu’il faut appliquer l’indemnité de cinq (5) heures comme auparavant.

L’arbitre, Me Francine Lamy, considère que la nouvelle clause de la convention collective encadrant le versement de l’indemnité souffre d’ambiguïté et décide donc de procéder à un exercice d’interprétation. Elle est d’avis que l’interprétation stricte et libérale proposée par l’employeur heurte l’essence même de l’intégration du télétravail chez Hydro-Québec. L’indemnité a été insérée à la convention collective avant la pandémie de la Covid-19, alors que le télétravail était encore exceptionnel. Elle tire son origine d’une demande syndicale visant à limiter les consultations téléphoniques. Elle n’a donc pas été conçue pour couvrir les rappels en télétravail spécifiquement. Voilà l’intention des parties.

Le tribunal analyse ensuite les concepts de rappel au travail, issus du milieu de la santé et la notion de lieu de travail. Le domicile peut être un lieu normal de travail selon l’arbitre, étant donné que le télétravail n’est pas « exceptionnel ». Quant au déplacement vers le lieu de travail, la jurisprudence enseigne que le rappel au travail ne nécessite pas nécessairement de retour sur les lieux du travail.

L’arbitre conclut que le fait que les salariés exécutent leur prestation en télétravail n’empêche pas, en soi, l’application de l’indemnité minimale de cinq (5) heures prévue dans les cas de rappels au travail. Les ingénieurs sont dérangés dans leur vie personnelle lorsqu’ils sont rappelés et doivent réintégrer leur poste de travail, même s’il est dans leur domicile.

Le grief est accueilli en partie et l’arbitre ordonne à l’employeur de verser l’indemnité minimale de cinq (5) heures aux salariés.

  

 

A. et Promutuel Horizon Ouest, 2023 QCTAT 1027 

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jw04t>

La travailleuse, dans cette affaire, est une agente au service à la clientèle chez Promutuel Horizon Ouest, l’employeur. Depuis le mois de mars 2020, elle exerce ses fonctions en télétravail, à partir de son domicile. Le 15 juin 2020, durant sa pause repas, elle chute dans les escaliers extérieurs de son domicile. Elle s’inflige une entorse et une fracture à la cheville droite. La travailleuse dépose donc une réclamation à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail (« CNESST »), laquelle est refusée. La travailleuse conteste la décision de la révision administrative qui maintient le refus.

Le Tribunal administratif du travail (« le TAT ») reconnait qu’il s’agit effectivement d’un événement imprévu et soudain. Les parties admettent également qu’il ne s’agit pas d’un accident survenu par le fait du travail, puisque la chute est survenue durant le diner. La question était alors de savoir si la travailleuse avait subi un accident à l’occasion du travail.

Le TAT conclut que la chute est survenue dans la sphère d’activés personnelles de la travailleuse. Le juge administratif Me Gaétan Guérard se livre à une analyse des critères développés par la jurisprudence. Il porte une attention particulière au geste posé au moment de la chute. Il soulève, en effet, que la travailleuse a chuté en voulant ramasser son téléphone cellulaire tombé dans les escaliers. Le lieu de l’événement est l’escalier extérieur menant à la cour arrière et non l’escalier menant au sous-sol où est aménagé le bureau de la travailleuse. La preuve révèle également que la pause repas n’est pas rémunérée et que l’employeur n’exige aucune disponibilité.

La contestation est rejetée, l’événement n’étant pas survenu à l’occasion du travail.

 

 


 

POLICIERS ET POLICIÈRES

Rien à signaler.

 


 

TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER

Rien à signaler.

 


 

POMPIERS ET POMPIÈRES

Rien à signaler.

 


 

ARTISTES

A. c. Alliance internationale des employés de scène, de théâtre, techniciens de l’image, artistes et métiers connexes des États-Unis, ses territoires et du Canada (IATSE), section locale 56, 2023 QCTAT 1460 (CanLII)

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jwgdb>

Le Tribunal administratif du travail (« le TAT ») était saisi d’une plainte en vertu de l’article 47.2 du Code du travaildéposée par le plaignant, un technicien de scène. Il se plaignait de comportements arbitraires et discriminatoires du syndicat à son égard relativement au paiement des primes d’assurance collective.

En effet, à titre de preneur de la police d’assurance, le syndicat est responsable de payer la totalité des primes mensuelles pour l’ensemble des membres qui s’élève à environ 42 000 $. Les primes d’assurance payables sont calculées pour chaque membre selon le plan de protection qu’il choisit et les employeurs y contribuent en en versant au syndicat un pourcentage du salaire payé à chaque membre qui effectue du travail pour eux.

Durant la pandémie de la Covid-19, les membres ne travaillaient plus et les employeurs ne versaient plus de contribution mensuelle au syndicat pour participer au paiement des primes. Or, le syndicat devait continuer à assumer le coût des primes pendant ce temps afin de maintenir la couverture pour ses membres. De plus, plus de 50 membres accumulaient des retards de paiement pour leurs primes de l’année 2019.

C’est ainsi que ce dernier a pris la décision de demander une avance de paiement mensuelle aux membres, face à son encaisse éminemment déficitaire. De plus, le syndicat a informé les membres qu’ils pouvaient opter temporairement pour un plan protection réduit à moindre coût, ce à quoi a adhéré le plaignant.

Le plaignant formule quatre reproches à l’endroit du syndicat. Les deux premiers reprochaient au syndicat d’avoir : (1) agi de manière arbitraire en réclamant directement au plaignant le paiement de ses primes, alors qu’elles auraient dû être prélevées à la source par ses employeurs et, (2) fait preuve de négligence grave en maintenant les primes d’assurance collective en vigueur durant la pandémie de Covid-19, sans tenter de trouver d’autres solutions. Le TAT a déclaré irrecevables ces deux manquements, au motif que les décisions prises par le syndicat relèvent de sa régie interne.

Par les deux autres reproches, le plaignant alléguait que le syndicat s’est comporté de façon discriminatoire et arbitraire à son égard en le plaçant à la fin des listes de rappel et, ensuite, en l’expulsant de ses rangs. Il est à noter que le plaignant n’avait pas payé ses primes, contrevenant ainsi aux statuts et règlements qu’il connaissait depuis 20 ans. Dans un contexte d’atelier fermé, l’expulsion d’un membre peut empêcher le membre d’obtenir du travail. Le TAT conclut néanmoins que le plaignant ne s’est pas déchargé de son fardeau de preuve de démontrer une mesure discriminatoire ou arbitraire. Le plaignant avait reçu des préavis pour chacun des retards de paiement et il était informé des conséquences de son défaut. Le syndicat applique ses statuts en toute transparence.

La plainte est rejetée.

 


 

SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

Camara. c. R., 2023 QCCS 806

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jw7vd>

L’appelant conteste le verdict de culpabilité porté contre lui au terme d’un procès d’agression sexuelle. Les événements ont eu lieu lors d’une fête d’étudiants de Cégep, où l’appelant aurait initié des contacts sexuels alors que la plaignante était ivre. L’appelant avance que le jugement d’instance est entaché d’erreurs dans l’analyse de la preuve.  La Cour est d’avis que les griefs de l’appelant sont en grande partie mal fondés considérant la déférence en appel envers les conclusions sur la crédibilité. Le juge d’appel doit se garder de scruter l’analyse d’un juge du procès, ce dernier étant le mieux placé pour évaluer les témoignages présentés.

La Cour estime toutefois que le juge a erré en concluant que la plaignante ne pouvait consentir en raison de son état d’ébriété. La preuve n’indiquait aucunement que la plaignante était incapable de consentir. La plaignante a plutôt témoigné ne pas avoir consenti à des activités sexuelles, d’abord parce ce qu’elle croyait qu’il s’agissait d’un autre jeune homme et ensuite parce qu’elle ne voulait pas subjectivement se livrer à des activités sexuelles avec l’appelant. Elle n’a pas prétendu qu’elle avait atteint un niveau d’ivresse qui l’empêchait de consentir à des activités sexuelles.

En conséquence, le jugement d’instance est entaché d’une erreur sur l’essence de la preuve portant sur un aspect substantiel et essentiel du raisonnement ayant mené au verdict de culpabilité. L’erreur est évidente et le fait qu’il aurait été possible de trouver l’appelant coupable, ne remédie pas à l’erreur qui vicie le raisonnement menant au verdict.

L’appel est accueilli. Un nouveau procès est ordonné.

 

 

Nguyen c. R., 2023 QCCA 406

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jwfx6>

L’appelant porte en appel deux jugements, dont le premier portant sur la déclaration de culpabilité liée à la découverte de plants de cannabis et le deuxième portant sur la confiscation d’un bien infractionnel, l’immeuble dont il est copropriétaire.

L’appel sur la culpabilité porte uniquement sur l’identification de l’appelant. Or, l’appelant n’a jamais plaidé que l’identification était une question en litige au procès. Il plaidait davantage sa présence légitime sur les lieux en sa qualité de propriétaire, et que rien, par ailleurs, ne prouvait qu’il aidait ou participait à la production de cannabis. Bien qu’il faille convenir que l’identification doit toujours être prouvée hors de tout doute raisonnable, la Cour estime que le déroulement du procès peut expliquer pourquoi la juge, dans sa décision, insiste avant tout sur deux éléments des infractions, la connaissance et le contrôle, semblant exclure que l’identification soit litigieuse. Pour ce motif, il n’y a pas lieu d’intervenir.

Quant à l’appel relatif à la confiscation du bien, le moyen porte donc sur une erreur dans la proportion de l’immeuble dédiée à la production de cannabis. En l’espèce, la juge conclut que les deux tiers de l’immeuble y sont consacrés alors que, dans les faits, deux étages sur quatre le sont, soit la moitié. La Cour conclut ainsi :

[17]      L’appelant démontre une erreur qui doit être corrigée. Il n’existe aucune raison de modifier la décision d’ordonner la confiscation partielle de l’immeuble, et ce, dans les bonnes proportions déterminées par la juge. Il y a donc lieu de modifier la formule pour y insérer les bons chiffres aux fins du calcul, tel qu’ils sont révélés par la preuve. Puisque les parts de l’appelant et de son fils représentent 75 % des parts de l’immeuble, 37,5 % de l’immeuble doit être confisqué.

L’appel sur la culpabilité est rejeté. L’appel sur l’ordonnance de confiscation est accueilli afin de corriger les proportions inscrites au jugement de première instance.