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Veille juridique du 14 mai 2019

GÉNÉRAL

Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Ouest et Leduc, 2019 QCTAT 1562

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2019/2019qctat1562/2019qctat1562.html?autocompleteStr=2019%20qctat%201562&autocompletePos=1

Une assistante en réadaptation est libérée à temps plein par son employeur parce qu’elle occupe la fonction de présidente de son syndicat depuis 2012. Le 26 décembre 2016, suite à un diagnostic psychologique, la travailleuse subit une lésion professionnelle.  L’employeur allègue qu’aux termes de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (ci-après « L.A.T.M.P. »), ce n’est pas le véritable employeur, mais bien le syndicat, parce qu’il ne contrôle ni ne dirige la travailleuse dans l’exercice de ses fonctions de présidente du syndicat.

Le Tribunal n’est pas de cet avis et mentionne que l’on doit interpréter largement la notion de contrôle de l’employeur sur sa salariée prévue à l’article 2085 du Code civil du Québec. En l’instance, la libération syndicale de la travailleuse est balisée par une procédure de demande de libération syndicale que l’employeur peut refuser s’il en a les motifs et ce, tel que le prévoit par la convention collective.

Quant aux conditions de travail de la travailleuse, comme la rémunération, les vacances, les congés ou l’accumulation de son ancienneté, celles-ci sont encore du ressort de l’employeur et non du syndicat. De plus, il ne s’agit pas d’une libération permanente, mais d’une entente entre le syndicat et l’employeur qui est en quelque sorte renouvelable chaque année, et que, de surplus, l’employeur peut mettre fin moyennant un avis de 30 jours. Sa libération syndicale est de surcroît intimement liée à son emploi auprès de l’employeur : si le lien d’emploi est rompu entre la travailleuse et l’employeur, elle ne pourra pas poursuivre ses fonctions syndicales.

Contestation de l’employeur rejetée.

Directeur général des élections du Québec (DGEQ) c. Confédération des syndicats nationaux (CSN), 2019 QCCQ 1881

https://www.canlii.org/fr/qc/qccq/doc/2019/2019qccq1881/2019qccq1881.html?autocompleteStr=2019%20qccq%201881&autocompletePos=1

Lors d’une réunion extraordinaire du conseil confédéral de la CSN tenue le 24 août 2012, celle-ci prend position en vue des prochaines élections provinciales québécoises qui devaient se tenir le 4 septembre suivant. Devant la Cour du Québec, la CSN répond à une infraction de la Loi électorale (ci-après « L.E. ») et conteste le fait que selon l’article 402 L.E., les dépenses associées à cette réunion extraordinaire sont assimilées à des dépenses électorales. Or, selon l’article 413 L.E., seuls les partis politiques ou leurs candidats peuvent faire ou autoriser des dépenses électorales.

De plus, selon la CSN, les articles 402 et 413 L.E. seraient inconstitutionnels puisqu’ils porteraient indument atteinte aux libertés d’association et d’expression inscrites autant à l’alinéa 2d) de la Charte canadienne des droits et libertés (ci-après « Charte canadienne ») qu’à l’article 3 de la Charte des droits et libertés de la personne (ci-après « Charte québécoise »).

La Cour répond tout d’abord que les dépenses effectuées par la CSN lors du conseil sont bel et bien des dépenses électorales. La CSN arguait que ses dépenses étaient engagées à des fins légitimes, soit soutenir une réunion d’une instance décisionnelle de son organisation comme le lui permet en quelque sorte le but d’une association de salariés selon l’article 1a) du Code du travail, soit « l’étude, la sauvegarde et le développement des intérêts économiques, sociaux et éducatifs de ses membres ». La Cour répond plutôt qu’au regard des éléments factuels, ceux-ci :

« Ne peuvent mener qu’à un seul constat : ils défavorisent l’élection de candidats de deux des partis politiques en liste : en combattant leur programme ou leur politique; en désapprouvant les mesures préconisées et les actes accomplis ou proposés par eux. Conséquemment, il s’agit d’une dépense électorale. ».

Sur l’atteinte au droit d’association, la Cour considère que la L.E. n’enfreint pas le droit à la liberté d’association. La L.E. n’interdit pas la tenue d’instance décisionnelle ni de prendre une décision, mais de faire une dépense électorale pendant une période maximale n’excédant pas 39 jours aux termes de la L.E. Dans les circonstances, on ne peut pas raisonnablement soutenir que la L.E. constitue une entrave substantielle à la liberté d’association.

Sur l’atteinte à la liberté d’expression, la Cour considère que la L.E., bien qu’elle la brime, constitue une limite justifiable dans le cadre d’une société libre et démocratique. Il est légitime, pour protéger le système électoral québécois qui se veut transparent et équitable (dans sa vision du financement électoral), que la L.E. fixe des balises pour encadrer le nerf de la guerre, l’argent. Une association puissante comme la CSN n’y échappe pas.

Contestation de la CSN rejetée et déclaration de culpabilité.

Leduc et Commission scolaire au Coeur-des-Vallées, 2019 QCTAT 1550

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2019/2019qctat1550/2019qctat1550.html?autocompleteStr=2019%20qctat%201550%20&autocompletePos=1

Un travailleur, concierge et homme à tout faire, se blesse à son travail et subit une fracture au doigt le 25 février 2016. Il subit une lésion professionnelle et est indemnisé au terme de la L.A.T.M.P. Il commence ensuite à ressentir des problèmes pulmonaires et cardiaques.

Après diverses consultations médicales se poursuivant sur plusieurs mois, les médecins du travailleur en viennent à la conclusion qu’il est atteint d’une maladie auto-immune, la DM-SAS. Le travailleur allègue que l’élément déclencheur de cette maladie ne peut qu’être le trauma subi lors de son accident où il a subi une fracture de son doigt.

À la lumière de la preuve, le Tribunal en vient à la conclusion que des faits graves, précis et concordants l’amènent à croire que la seule cause possible en l’instance du déclenchement de cette maladie chez le travailleur est bel et bien le traumatisme dont il a été victime le 25 février 2016. Aucun autre facteur possible de déclenchement de la maladie reconnu par la médecine ne s’était développé chez le travailleur.

Contestation accueillie.


POLICIERS

Fraternité des policiers et policières de Longueuil et Ville de Longueuil (grief collectif, grief syndical et Mahalia Bryant), 2019 QCTA 105

https://soquij.qc.ca/portail/recherchejuridique/ConsulterExtExpress/BD9634852328BDA2221F3E7769EA75BE?source=EXPTRAV

La Fraternité des policiers et policières de Longueuil (ci-après « le syndicat ») conteste la légalité d’une directive de l’employeur interdisant certains tatouages visibles portés par les policiers de la Ville de Longueuil (ci-après « la Ville ») ainsi que l’interdiction totale du port de bijoux de type « piercing ».

L’interdiction des tatouages visait dans l’ensemble ceux ayant une connotation violente, dégradante, associée à la criminalité, raciste, discriminatoire, blasphématoire ou encore ayant une image ou un symbole qui blesse la dignité et l’honneur de la personne.

Selon le syndicat, la directive serait invalide en raison de l’exercice déraisonnable du droit de gérance et de l’atteinte illégale aux droits fondamentaux. La Ville plaide que l’uniforme est une composante essentielle du travail et qu’un policier se doit d’avoir une apparence soignée et respectable. Se faisant, la directive serait justifiée dans le cadre d’une société libre et démocratique.

Le Tribunal retient l’argumentation de la Ville. En effet, il est légitime que la Ville interdise certains types de tatouage, puisque non seulement le Code de déontologie des policiers du Québec prévoit qu’un policier doit respecter un grand nombre de lignes de conduite et de règles de civilité, mais également parce que la Loi sur la police prévoit qu’un policier doit être de bonnes mœurs (article 115 de la loi).

Cependant, la directive de la Ville s’avère imprécise sur quelques points. L’interdiction des tatouages à connotation violente ou comportant une caractéristique allant à l’encontre de l’une des valeurs du service de police (à savoir le service à la population, le professionnalisme, le respect, l’intégrité et la loyauté) sont trop vagues. De plus, l’interdiction totale du port de bijoux de type « piercing » ne respecte pas les critères de l’article 9.1 de la Charte québécoise, puisque cette interdiction totale est imprécise et floue. Aucun lien rationnel n’est démontré entre le seul fait de porter un bijou de type « piercing » et l’objectif de l’employeur de maintenir le lien de confiance entre le service de police et la population. Le Tribunal, sur ce dernier point, donne cependant un délai à la Ville pour revoir sa directive.

Grief accueilli en partie.


POMPIERS

Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce, section locale 501 et Ville de Rosemère (grief collectif), 2019 QCTA 130

https://www.canlii.org/fr/qc/qcsat/doc/2019/2019canlii25483/2019canlii25483.html?searchUrlHash=AAAAAQAqInNlY3Rpb24gbG9jYWxlIDUwMSBldCB2aWxsZSBkZSByb3NlbcOocmUiAAAAAAE&resultIndex=3

Le syndicat des pompiers de la Ville de Rosemère conteste le licenciement collectif de ses membres survenu le 7 mars 2016. Se fondant sur les enseignements de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt T.U.A.C., section locale 503 c. Walmart ayant interprété l’effet du gel relatif des conditions de travail édicté à l’article 59 du Code du travail (ci-après « C.t. »), le syndicat allègue que la décision de la Ville n’est pas celle qu’aurait prise un employeur raisonnable placé dans les mêmes circonstances.

En l’instance, le Tribunal constate qu’après le retrait de la Ville de Lorraine (auquel la Ville de Rosemère fournissait la desserte du Service des incendies sur son territoire moyennant une contrepartie financière), la marge de manœuvre de la Rosemère s’était considérablement réduite. Selon le Tribunal, il est légitime que, pour maintenir une bonne gestion financière de la municipalité, celle-ci se tourne vers d’autres villes environnantes pour conclure une entente semblable à celle liant autrefois la Ville de Lorraine à la Ville de Rosemère. Ce sera finalement avec Blainville qu’aura lieu cette entente. Même si les négociations pour mettre fin au service des incendies se sont tenues à l’insu du syndicat, cette décision relève tout de même du pouvoir de gestion de l’employeur.

Au strict point de vue financier et budgétaire, la rationalité de l’entente conclue entre la Ville de Rosemère et la Ville de Blainville sautait effectivement aux yeux.

Cette décision qu’a prise l’employeur n’est notamment pas contraire à la « clause de pont » que contenait la convention collective liant le syndicat à la Ville de Rosemère., puisqu’une clause de pont, aux yeux du Tribunal, vise les mêmes objectifs que ceux énoncés à 59 C.t.

Grief rejeté.


PARAMÉDICS

Syndicat du préhospitalier et Corporation d’Urgences-santé (Jean-François Vachon), 2019 QCTA 109

https://soquij.qc.ca/portail/recherchejuridique/ConsulterExtExpress/362BAF05CC836F2323E4FD904247FC5B?source=EXPTRAV

Le soir du 31 mai 2016, le technicien ambulancier-paramédic Jean-François Vachon et son collègue Guillaume Jacques se rendent au secours d’un adolescent ayant été battu, KP. Devant son état de santé troublant, il est décidé d’emmener le patient à l’hôpital. Le centre de répartition indique à l’équipe d’ambulanciers que l’hôpital prêt à les accueillir est l’hôpital Notre-Dame, l’hôpital Fleury ayant déjà excédé sa capacité d’accueillir des patients de 20% ce soir-là. Devant les obstinations de KP de se rendre à l’hôpital, Vachon y va de subterfuge et amène le patient non pas à l’hôpital Notre-Dame, mais à l’hôpital Fleury pour des raisons qui se contredisent à l’écoute du témoignage du salarié.

Vachon falsifie et subtilise des documents requis par les protocoles et directives de l’employeur, omet de donner au personnel de l’hôpital Fleury des documents sur l’état de santé du patient et sur le protocole qu’ils ont suivi et omet également de remplir des documents permettant à son employeur de réclamer des frais de transport relativement à l’incident.

Qualifiant de graves les agissements de Vachon cette journée-là, le Tribunal qualifie de plus le comportement du salarié de hautement répréhensible. En ayant de la sorte omis de suivre les protocoles applicables, le patient aurait bien pu s’en sortir avec des séquelles permanentes. De plus, il est assez difficile de concevoir que de reconduire un patient à l’urgence d’un hôpital, sachant qu’elle déborde et détourne les transports ambulanciers ailleurs, soit une action dictée par le bien-être du patient.

Finalement, devant le fait que le salarié a délibérément menti à son employeur sur ces agissements ce soir-là et face à l’absence totale de remords ou d’excuse de la part de celui-ci, le Tribunal arrive à la conclusion que le principe de la gradation des sanctions ne s’appliquait pas en l’espèce et qu’il y a lieu de confirmer le congédiement de l’ambulancier.

Griefs rejetés.


ARTISTES

Rien à signaler.


SECTION CRIMINEL – GÉNÉRAL

Bibeau c. La Presse ltée, 2019 QCCA 756

https://www.canlii.org/fr/qc/qcca/doc/2019/2019qcca756/2019qcca756.html?autocompleteStr=bibeau%20c.%20la%20presse&autocompletePos=3

L’appelant est Marc Bibeau, l’une des personnes ciblées par l’enquête Mâchurer, menée par l’UPAQ et ayant pour objet le financement du Parti libéral du Québec. Dans le cadre de cette enquête, des mandats généraux ont été décernés relativement à des lieux qui lui étaient liés. Ces mandats n’ont mené à aucune saisie et aucune accusation n’a été portée contre l’appelant. Ce dernier ainsi que les médias ont obtenu l’accès aux mandats et aux dénonciations ayant servi à les décerner. La Cour du Québec a refusé de rendre des ordonnances de non-publication quant au contenu des déclarations, estimant que leur publication ne causerait aucun préjudice à l’appelant en raison de l’hypermédiatisation du dossier et du fait que le contenu des déclarations était déjà largement connu du public. La Cour supérieure a ensuite refusé de décerner un bref de certiorari pour casser ce jugement.

Décision

La Cour supérieure a estimé que la Cour du Québec avait bien appliqué le test Dagenais-Mentuck, des arrêts de la Cour suprême du même nom, pour déterminer si l’ordonnance de non-publication devait être rendue. Les informations contenues dans les dénonciations en l’espèce avaient fait l’objet de témoignages dans le cadre de la Commission Charbonneau ou de procès antérieurs.

Selon le test applicable, l’ordonnance de non-publication doit être nécessaire afin d’écarter un risque sérieux pour la bonne administration de la justice, et que ses effets bénéfiques doivent être plus importants que ses effets préjudiciables sur les droits et les intérêts des parties et du public. Or, comme la juge de la Cour du Québec avait déterminé que l’appelant n’avait présenté aucune preuve permettant d’appuyer sa demande à cet égard, il n’était pas nécessaire qu’elle s’attarde aux effets du traitement médiatique de l’affaire.

Enfin, l’absence de saisie et le fait qu’aucune accusation n’a été portée ne sont que des facteurs à prendre en considération dans l’application du test Dagenais-Mentuck, et la protection de la personne innocente énoncée dans P.G. de la Nouvelle-Écosse c. MacIntyre n’a pas la portée que l’appelant lui prête à cet égard.

L’appel est rejeté, et la décision de refuser de prononcer des ordonnances de non-publication à l’égard du contenu des mandats généraux et des dénonciations au soutien de leur émission est maintenue.

La Cour d’appel a par ailleurs suspendu les conséquences de son arrêt pour une période de 60 jours afin de permettre un appel à la Cour suprême du Canada.