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Veille juridique du 16 novembre 2021

SECTION DROIT DU TRAVAIL 

GÉNÉRAL

 

Mouvement Laïque Québécois c. English Montreal School of Board, 2021 QCCA 1675
https://www.canlii.org/fr/qc/qcca/doc/2021/2021qcca1675/2021qcca1675.pdf

L’Association, le Mouvement Laïque Québécois, demande à la Cour d’appel d’accorder l’exécution provisoire de certaines conclusions du jugement rendu le 20 avril 2021 par la Cour supérieure dans l’affaire Hak c. Procureur général du Québec, 2021 QCCS 1466.

Retour sur le jugement de la Cour supérieure

Dans l’affaire Hak, la Cour supérieure déclare inopérantes certaines dispositions de la Loi sur la laïcité de l’état sur la base de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés (ci-après : « la Charte »). Plus précisément, le juge Blanchard est d’avis que le fait pour la minorité anglophone du Québec de réclamer la protection de l’article 23 de la Charte pour faire son choix quant à l’embauche de son personnel enseignant par exemple, ne constitue pas une affirmation ou une reconnaissance d’une attitude négative différente à l’égard des questions de laïcité, de diversité, d’ouverture ou de tolérance que l’on retrouvent dans la majorité francophone, mais simplement que la minorité anglophone décide de faire ce choix pour des raisons qui lui appartiennent légitimement. Selon le juge Blanchard, la preuve démontre clairement que les commissions scolaires anglophones désirent intégrer les minorités culturelles qui portent des signes religieux afin de faciliter cette même intégration et la réussite scolaire de ses élèves issues de groupes religieux minoritaires qui portent des signes religieux, en assurant une représentativité de ces minorités dans le corps enseignant et les dirigeants d’établissement scolaire. Pour ces raisons, le juge déclare que le premier alinéa de l’article 4, les articles 6, 7, 8, 10, le premier et le deuxième alinéa de l’article 12, les articles 13, 14 et 16 lus en conjonction avec le paragraphe 7 de l’annexe I, le paragraphe 10 de l’annexe II et le paragraphe 4 de l’annexe III de la Loi 21, violent l’article 23 de la Charte.

Demande d’exécution provisoire à la Cour d’appel

Le Procureur général du Québec se pourvoit en appel de la décision rendue par le juge Blanchard. L’article 355 du Code de procédure civile prévoit que l’appel régulièrement formé suspend l’exécution du jugement, sauf dans les cas où l’exécution provisoire est ordonnée et ceux où la loi y pourvoit. Ainsi, les requérants, membres de l’Association, déposent une demande d’exécution provisoire à la Cour d’appel. L’article 661 du Code de procédure civile prévoit que les requérants doivent démontrer que le fait de porter l’affaire en appel risque de causer un préjudice sérieux ou irréparable à ces derniers. La Cour d’appel indique que de manière générale, une mesure qui interfère avec la capacité d’une commission ou d’un centre de service scolaire de pourvoi à des postes vacants en embauchant des enseignants dûment qualifiés est en soi préjudiciable à l’intérêt public, l’éducation des jeunes étant primordiale dans notre société. Cela dit, la Cour d’appel rejette la demande des requérants, notamment en raison du fait que la preuve ne démontre pas que l’appel risque d’avoir un impact significatif sur la capacité du English Montreal School Board de combler des positions vacantes. Selon la Cour d’appel, les requérants n’ont pas démontré que le préjudice allégué en relation avec leur demande est suffisamment précis, clair et concret afin de justifier l’ordonnant qu’ils recherchent.

Demande d’exécution provisoire rejetée.

 

Université du Québec à Montréal c. Syndicat des professeurs de l’Université du Québec à Montréal – SPUQ, 2021 QCCA 1565

https://www.canlii.org/fr/qc/qcca/doc/2021/2021qcca1565/2021qcca1565.pdf

Le litige dans cette affaire concerne le non-renouvellement du contrat d’un professeur (ci-après « le plaignant ») à la suite de deux évaluations négatives du comité d’évaluation et du comité de révision chargés d’examiner son dossier. Le plaignant dépose un grief qui est rejeté par l’arbitre. L’arbitre indique que les règles imposées par les parties en matière d’évaluation limitent sa juridiction ce que le syndicat ne conteste pas. Le syndicat invoque plutôt cinq vices à la procédure d’évaluation. L’arbitre conclut qu’aucun d’entre eux ne constitue un vice de fond justifiant son intervention. Au moment de l’audience, le syndicat tente d’introduire en preuve le dossier d’évaluation de quatre autres professeurs, dont l’évaluation s’est déroulée la même journée que le plaignant. L’employeur s’oppose au dépôt des documents. L’arbitre accepte la preuve sous réserve d’avoir permis aux parties de faire valoir tous leurs arguments à ce sujet. Dans la sentence arbitrale, l’arbitre accueille l’objection de l’employeur au motif que cette preuve n’est pas pertinente.

Le syndicat demande le contrôle judiciaire de la décision rendue par l’arbitre devant la Cour supérieure. Le juge Marc St-Pierre annule la sentence arbitrale et retourne le dossier devant un autre arbitre. Il estime que l’arbitre a commis une erreur en refusant d’admettre en preuve le dossier d’évaluation des quatre professeurs évalués au cours de la même journée que le plaignant. L’employeur se pourvoit en appel de la décision rendue par la Cour supérieure, ce qui fait l’objet de la présente décision.

La Cour d’appel accueille l’appel et indique que le juge de la Cour supérieure n’a jamais analysé la raisonnabilité de la sentence arbitrale. Il a, sous le couvert d’une soi-disant violation de la règle audi alteram partem, substitué son opinion à celle de l’arbitre, et a appliqué la norme de la décision correcte. Selon la Cour d’appel, le raisonnement de l’arbitre et le résultat auquel elle parvient se tiennent.

Appel accueilli.

 


 

POLICIERS ET POLICIÈRES

 

Association des policiers et policières de la Ville de Sherbrooke c. Ville de Sherbrooke, Conseil de règlement des différends, 5 novembre 2021.

Sur demande seulement.

Le Conseil de règlement des différends (ci-après, «le CRD») constitué dans le cadre des négociations pour le renouvellement de la convention collective entre l’Association des policiers et policières de la Ville de Sherbrooke et la Ville de Sherbrooke rend une décision interlocutoire. Cette décision fait notamment suite à la décision rendue par l’honorable juge Lukasz Granosik, le 5 octobre 2021, par laquelle la Cour supérieure déclare que les articles 10,11,12,25 et 26 de la Loi concernant le régime de négociation des conventions collectives et de règlement des différends dans le secteur municipal (ci-après : « la loi 24 ») sont inconstitutionnels. Ces dispositions visaient notamment la nomination des membres du Conseil de règlement des différends. Il importe de souligner que le juge Granosik suspend la déclaration d’invalidité des articles jugés inconstitutionnels pour une période de douze (12) mois.

L’Association des policiers et policières de la Ville de Sherbooke (ci-après : « l’Association » avait déjà soumis des questions préliminaires devant le CRD, soit une demande de récusation basée sur le défaut d’acceptabilité des membres du CRD et une demande de suspension des audiences dans l’attente de la décision des tribunaux supérieurs concernant la constitutionnalité de la loi constitutive du CRD. Lors de l’audience, l’Association soumet que, considérant la décision de la Cour supérieure qui invalide tous les articles de la Loi 24 portant sur le processus de nomination d’un CRD, le Tribunal n’a aucune existence. Par conséquent, l’Association soumet que le CRD ne peut rendre une décision et doit plutôt suspendre complètement toute audience dans le dossier. Selon l’Association, la suspension du redressement approprié pendant la période de douze (12) mois a pour but de permettre au législateur de corriger sa législation, mais que cette suspension ne permet pas au législateur de redonner une légitimité au CRD.

Le CRD rejette les prétentions de l’Association en se basant sur les propos de la Cour d’appel dans l’arrêt Syndicat des professionnels et professionnels municipaux de Montréal c. Ville de Montréal, 2018 QCCA 859 dans lequel l’honorable juge Mainville affirme que la décision de « suspendre ou non un arbitrage relève du pouvoir discrétionnaire d’un arbitre et que dans la mesure où ce pouvoir est exercé judiciairement, c’est-à-dire selon les critères juridiques pertinents, la cour de révision ne peut intervenir dans la décision de l’arbitre à moins que celle-ci ne soit déraisonnable ». Le CRD retient également la prétention du Procureur général du Québec qui indique que la décision de la Cour supérieure n’invalide pas les articles de la Loi 24 qui concernent la décision qui doit être rendue par le CRD et les délais. Ainsi, le CRD conclut qu’il doit respecter les obligations de sa loi constitutive et poursuivre son mandat et insister pour procéder aux dates prévues.

Malgré cette conclusion, le CRD convient tout de même d’annuler les dates prévues, et ce, jusqu’au 22 novembre 2021. Cette décision est prise dans le contexte où l’Association a annoncé lors de l’audience que peu importe la décision du CRD, elle ferait une requête en sursis devant la Cour supérieure si le CRD insiste pour procéder avant l’expiration des délais d’appel ou devant la Cour d’appel si le CRD insiste pour procéder alors qu’un appel aurait été logé par l’une ou l’autre des parties. Le CRD est d’avis qu’il n’est pas dans l’intérêt public de rendre une décision qui pourrait avoir conséquence de multiplier les recours judiciaires.

Audiences prévues pour les 12,15,16 et 22 novembre 2021 annulées.

Conserve juridiction pour entendre les parties.

 

Dowd c. Binette, 2021 QCCA 1663

https://canlii.ca/t/jk6p7

Appel d’un jugement de la Cour supérieure ayant accueilli un pourvoi en contrôle judiciaire à l’encontre d’un jugement de la Cour du Québec qui avait rejeté l’appel de décisions du Comité de déontologie policière.

En première instance, le Comité a déclaré les policiers intimés coupables d’avoir commis un acte dérogatoire en effectuant une enquête incomplète à la suite d’un accident, leur imposant une suspension de 25 jours pour deux d’entre eux et de 30 jours pour la policière chargée de relève. La Cour du Québec a rejeté l’appel de ces décisions. La Cour supérieure a accueilli le pourvoi en contrôle judiciaire, renvoyant le dossier à la Cour du Québec pour que l’appel y soit réentendu.

Lorsqu’une décision en matière de contrôle judiciaire est portée devant la Cour d’appel, cette dernière doit s’assurer que la Cour supérieure a choisi la norme de contrôle adéquate et qu’elle l’a appliquée correctement. Son rôle ne se limite pas à déterminer si le juge a commis une erreur manifeste et déterminante. En l’espèce, il existe deux paliers de contrôle: celui de l’appel de la décision du Comité à la Cour du Québec, soumis aux normes applicables en appel; et celui du pourvoi en contrôle judiciaire par la Cour supérieure de la décision de la Cour du Québec siégeant en appel, soumis à la norme de la décision raisonnable en raison de l’absence d’exception justifiant l’imposition de la norme de la décision correcte. L’article 83.1 de la Loi sur les tribunaux judiciaires prévoit l’application de la norme de la décision correcte aux questions de droit tranchées lors de l’exercice d’une fonction juridictionnelle, alors que la norme de l’erreur manifeste et déterminante s’applique aux questions de fait et aux questions mixtes de fait et de droit. La norme de la décision correcte s’applique pour toutes les questions tranchées dans l’exercice d’une fonction administrative.

En l’espèce, le juge de la Cour supérieure a commis une erreur en déterminant qu’il n’y a plus de déférence envers les décisions des tribunaux administratifs lorsqu’un droit d’appel est prévu. L’arrêt Vavilov a écarté l’obligation de déférence lorsqu’il y a un appel d’une décision d’un tribunal administratif sur une question de droit. Pour les questions de fait ou les questions mixtes de fait et de droit, la déférence demeure, celle-ci étant fondée sur la position privilégiée du décideur qui entend la preuve et l’apprécie. Dans ce cas, il ne peut y avoir d’intervention qu’en présence d’une erreur manifeste et déterminante.

Le juge de la Cour supérieure a également commis une erreur de droit en affirmant que la Cour suprême avait totalement écarté la notion d’expertise dans l’arrêt Vavilov. Elle a plutôt tenu pour acquise l’expertise du décideur en établissant qu’il existe maintenant une présomption que la norme de contrôle est celle de la décision raisonnable.

Quant aux changements apportés par Vavilov sur la conclusion de la Cour du Québec de rejeter l’appel des intimés, ces derniers s’attaquaient notamment à l’appréciation de la preuve par le Comité et à des questions mixtes de fait et de droit. Ces questions étant maintenant soumises à la norme de l’erreur manifeste et déterminante, les intimés n’ont établi aucune erreur de cette nature dans leurs moyens d’appel. Par conséquent, même si le juge de la Cour du Québec a rendu sa décision avant le nouveau cadre d’analyse, sa conclusion aurait été la même s’il avait appliqué les normes des tribunaux d’appel et elle est donc raisonnable.

L’appel est accueilli.

 


 

TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER

 

Rien à signaler.

 


 

POMPIERS ET POMPIÈRES

 

Rien à signaler.

 


 

ARTISTES

 

Rien à signaler.

 


 

SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

 

R c. Chabot et als., 2021 QCCA 1697

https://canlii.ca/t/jkdpt 

Appel d’un jugement concernant l’acquittement des policiers hauts-gradés pour des chefs d’accusations de fraude et d’abus de confiance.

Les faits découlent d’ententes conclues par le directeur général de la Sûreté du Québec Deschênes, intimé, et les autres intimés, le directeur général adjoint Chabot et l’inspecteur-chef Tremblay, du même corps de police. Ces ententes prévoyaient notamment le versement de sommes assez substantielles aux intimés Chabot et Tremblay, à titre d’indemnité de départ, pour le premier, et de règlement à l’amiable d’un différend pour le second. Les chèques avaient été versés aux intimés à même le fonds « des dépenses secrètes d’opérations ».

Selon l’appelante, la juge en première instance aurait indûment tenu compte de la croyance subjective des accusés quant au caractère malhonnête des actes commis par les intimés et elle aurait adopté une contextualisation erronée en droit de la personne raisonnable, pour ce qui est de l’accusation de fraude. Quant au chef d’abus de confiance, la juge se serait trompée en ignorant les principes de droit issus dans l’affaire Boulanger et en concluant que les gestes des intimés, tous fonctionnaires de l’État ne constituaient pas des écarts graves et importants au sens de l’art. 122 du Code criminel.

La juge de première instance a à bon droit jugé, malgré ses interrogations sur la légalité des ententes, qu’au vu des conditions et critères de droit applicables, le ministère public ne s’est pas déchargé de son fardeau de prouver que les actes en cause étaient malhonnêtes au sens de l’arrêt Théroux. Également, elle n’a pas démontré l’existence d’une conduite dénotant un écart grave et marqué par rapport aux normes que serait censé observer quiconque occuperait un poste de confiance. La Cour rappelle que toute violation, même grave, civile ou administrative ne constitue pas nécessairement une infraction criminelle. Enfin, elle estime que les prétendues erreurs ciblées par l’appelante ne soulèvent pas de question de droit, mais qu’elles ont au contraire un fort contenu factuel. Or, le ministère public ne peut interjeter l’appel d’un jugement d’acquittement que pour des motifs d’appel comportant une question de droit seulement.

L’appel est donc rejeté.