Veille juridique du 21 mars 2023

21 mars 2023

SECTION DROIT DU TRAVAIL

GÉNÉRAL

 

Syndicat national du lait inc. (CSD) et Agropur coopérative (usine de Québec) (grief syndical), 2023 QCTA 64 

Disponible sur SOQUIJ

Le syndicat conteste la Politique d’absentéisme adoptée par l’employeur. Il soutient que celle-ci est invalide notamment parce que les concepts fondamentaux sur lesquels elle repose ne sont pas définis, donnant ainsi lieu à des décisions discriminatoires, arbitraires ou déraisonnables, voire contraires aux lois d’ordre public. Notamment, le syndicat explique que la Politique est silencieuse quant aux paramètres déterminant ce qu’est une absence.

L’arbitre, faisant un rappel du droit applicable, souligne que l’adoption d’une telle Politique constitue pour l’employeur l’exercice de ses droits de direction. Pour obtenir gain de cause, le syndicat doit démontrer que la politique adoptée par l’employeur contrevient à la convention collective (ou à une loi) ou encore, qu’elle est abusive, déraisonnable ou discriminatoire.

Dans ses motifs, l’arbitre constate d’abord que le syndicat n’a pas réussi à démontrer que la Politique contrevient à la convention collective ou à la Loi sur les normes du travail. Ensuite, le Tribunal conclut que la Politique est claire, contrairement à ce que prétend le syndicat. Le fait d’annoncer qu’un taux d’absence sera établi en fonction de la moyenne globale de l’usine ne rend pas la Politique imprécise ou équivoque. Tel que le précise le Tribunal : « Pour le moment, la Politique comporte essentiellement des énoncés de principe qui sont ni plus ni moins que l’affirmation de certains pouvoirs de direction que l’employeur peut exercer avant ou sans une telle politique d’absentéisme ». Finalement, l’arbitre juge que la Politique est raisonnable. Elle permet de comprendre que l’employeur va intervenir en cas d’absentéisme au-dessus de la « moyenne ». C’est dans l’application de la Politique que la raisonnabilité́ de celle-ci pourra être appréciée.

Le grief est rejeté.

 

Syndicat des employé(e)s de métiers d’Hydro-Québec, section locale 1500, SCFP FTQ et Hydro-Québec, 2023 QCTA 50 

Disponible sur SOQUIJ

Dans cette affaire, le plaignant, un chef monteur chez Hydro-Québec, allègue qu’il aurait dû être désigné pour effectuer un déploiement en lien avec le passage d’un ouragan aux États-Unis. Le syndicat prétend que l’employeur ne s’est pas efforcé de répartir le travail supplémentaire de façon équitable, tel que le prescrit l’article 24.01 de la convention collective liant les parties. Le syndicat explique que le document utilisé par le gestionnaire n’était pas à jour et que l’employeur a été négligent en ne s’assurant pas d’avoir en main toutes les données nécessaires avant de distribuer le mandat.

L’arbitre rejette le grief. Elle rappelle que l’employeur dispose d’une marge de manœuvre certaine selon l’article 24.01. Il ne suffit pas pour le syndicat de démontrer une erreur mathématique dans les calculs de l’employeur. Dans le présent dossier, le gestionnaire a demandé une mise à jour des heures supplémentaires avant de procéder à la désignation requise. Rien ne lui permettait de croire que la liste n’était pas à jour au moment où il l’a reçue. La preuve ne démontre pas que le gestionnaire du plaignant savait que des heures étaient manquantes ni qu’il a délibérément écarté le plaignant du choix. Il s’agit d’une erreur de bonne foi.

Le grief est rejeté.

 


 

POLICIERS ET POLICIÈRES

 

A P-C. et Service de police de la Ville de Montréal, 1237828-64-2107, 14 mars 2023, (j.a. Martine Desroches)

Disponible ici

La travailleuse, une policière au Service de police de la Ville de Montréal, a souffert, en 2015, d’une tendinite à l’épaule droite qu’elle a reliée à l’aménagement de son véhicule de patrouille. La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (ci-après, la « CNESST ») a d’abord refusé de reconnaître une lésion professionnelle, mais le litige s’est réglé par une transaction qui a eu lieu en 2017. En 2019, la travailleuse dépose à nouveau une réclamation pour faire reconnaître une tendinite de la coiffe des rotateurs de l’épaule droite, laquelle est refusée par la CNESST.

À l’audience, de manière préliminaire, le représentant de l’employeur soulève l’irrecevabilité du litige. Il allègue qu’une transaction a été conclue dans le dossier de 2015, empêchant ainsi la travailleuse de déposer une pareille réclamation dans un contexte factuel identique.

Le Tribunal conclut que la réclamation de la travailleuse datant de 2019 est recevable. Tel que le précise le Tribunal : « Une condition peut évoluer, réapparaitre ou s’aggraver en fonction d’une nouvelle exposition, d’une exposition différente impliquant des gestes ou une posture qui sollicitent différemment une articulation ou un groupe musculaire ». En l’espèce, il existe de nouveaux éléments ou des éléments différents qui permettent de distinguer la seconde réclamation de la première. Le délai d’exposition de deux années supplémentaires au même poste constitue un changement dans la trame factuelle. Ainsi, on fait face dans ce dossier à une nouvelle réclamation à traiter. Le Tribunal est d’avis que la question dont il est saisi n’est pas la même que celle qui a été présentée en 2015 et réglée en 2017.

Le Tribunal rejette le moyen préliminaire présenté par l’employeur et déclare recevable la contestation de la travailleuse.

Le cabinet RBD représentait la travailleuse dans le présent dossier

 


 

TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER

 

Association des travailleurs du préhospitalier (ATPH) c. Services préhospitaliers paraxion inc., 2023 CanLII 15951

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jvxr1>

Cette décision opposant l’Association des travailleurs du préhospitalier (ci-après, l’association) et les Services préhospitalier paraxion inc. (ci-après, l’employeur), met en cause l’interprétation des dispositions de la section 4 de la convention collective portant sur les postes réservés, plus précisément sur l’article 4.09 qui se lit ainsi :

4.09 Dans le cas où l’employeur ou son conjoint ou un cadre occupe un poste de paramédic à temps complet, les parties s’entendent pour que ce dernier effectue le même travail que les paramédics et tel que le font normalement les autres paramédics de l’entreprise, sous peine d’être obligé de réafficher le poste.

L’association allègue que l’employeur enfreint cette disposition en permettant à un cadre de travailler moins d’heures que prévu pour le poste à temps complet qui lui est réservé (40 heures par semaine). À titre de correctif, elle demande le réaffichage du poste dans l’unité d’accréditation.

L’employeur explique que le titulaire d’un poste réservé peut avoir des libérations pour accomplir ces tâches administratives. Ce faisant, ces cadres ne disposent pas toujours de 40 heures par semaine pour accomplir des tâches de technicien ambulancier paramédic. Ainsi, interpréter la clause 4.09 comme signifiant que le cadre titulaire d’un poste réservé à temps complet doit faire pendant 40 heures par semaine exactement le même travail qu’un technicien ambulancier paramédic dénature cette disposition et la clause 4.01 qui reconnaît à l’employeur l’exercice de toutes ses fonctions de direction, d’administration et de gestion, ce que le cadre titulaire d’un poste réservé ne peut faire s’il doit consacrer toutes ses heures de travail exclusivement à des tâches de technicien paramédic.

L’arbitre rejette le grief de l’association. Elle juge que la clause 4.09 de la convention collective n’est pas claire et qu’elle doit donc rechercher la commune intention des parties afin de résoudre l’ambiguïté apparente de cette disposition.  Interprétant les clauses de la section 4 les unes par rapport aux autres, l’arbitre conclut qu’il convient d’exclure l’interprétation proposée par l’association et de privilégier celle de l’employeur. Qui plus est, selon la preuve, l’arbitre constate que les conditions requises pour que la pratique passée puisse être invoquée et avoir une valeur probante sont présentes. En l’espèce, cette preuve favorise la position de l’employeur.

Le grief est rejeté.

 


 

POMPIERS ET POMPIÈRES

Rien à signaler.

 


 

ARTISTES

Association québécoise de la production médiatique (AQPM) c. Association québécoise des techniciens et techniciennes de l’image et du son, section locale 514 de l’Alliance internationale des employés de scène, de théâtre, techniciens de l’image, artistes et métiers connexes des États-Unis, ses territoires et du Canada, 2022 QCTAT 5837

Disponible ici : <https://canlii.ca/t/jv12c>

Cette décision soulève une question sur la portée du domaine de la scène prévu à la Loi sur le statut professionnel des artistes des arts visuels, du cinéma, du disque, de la littérature, des métiers d’art et de la scène (ci-après, la « LSA »). Prenant appui sur l’article 58 de la LSA (l’équivalent de l’article 39 du Code du travail), l’Association québécoise de la production médiatique (ci-après, l’ « AQPM ») et Productions Duvernay inc. demandent au Tribunal de déclarer que six sonorisateurs et un coordonnateur audio embauchés pour le « Grand spectacle de la fête nationale 2019 » présenté devant public, capté puis télédiffusé, ne sont pas compris dans une reconnaissance détenue par l’Association québécoise des techniciens et techniciennes de l’image et du son, section locale 514 de l’Alliance internationale des employés de scène, de théâtre, techniciens de l’image, artistes et métiers connexes des États-Unis, ses territoires et du Canada (ci-après, l’ « AQTIS-514 ») pour représenter un secteur de négociation groupant des techniciens de productions télévisuelles.

Le Tribunal est appelé à déterminer si, dans le cas présent, le spectacle devant public consiste en une production du domaine de la scène distincte de la captation destinée à la télévision. En effet, la reconnaissance en cause de l’AQTIS-514 vise les fonctions visées à l’article 1.2 de la LSA. Or, cet article ne concerne que les fonctions accomplies dans le cadre des productions audiovisuelles des domaines du film et de l’enregistrement d’annonces publicitaires définies à l’annexe 1 de la loi. En outre, la reconnaissance de l’ACTIS-514 vise plus spécifiquement les productions télévisuelles.

La preuve présentée devant le Tribunal le convainc que le spectacle sur scène présenté le 23 juin 2019 est une production en soi qui relève du domaine de la scène au sens de la LSA. Elle est distincte de sa captation destinée à sa télédiffusion qui elle, consiste en une production télévisuelle du domaine du film. Il ne s’agit pas, comme le prétend l’AQTIS-514, d’une « émission enregistrée devant public », notion qui n’est pas utilisée à la LSA, ni dans le libellé du secteur de négociation.

Le Tribunal conclut que les six (6) sonorisateurs ne sont pas compris dans la reconnaissance de l’AQTIS-514, car ils rendent leurs services pour la production du spectacle, lequel relève du domaine de la scène qui n’est pas visé par cette reconnaissance. La situation est différente pour le coordonnateur audio, dont les principales fonctions apparaissent inextricablement liées à la production télévisuelle et dont les services sont d’ailleurs aussi retenus par Productions Duvernay inc à cette fin. Le coordonnateur est donc compris dans la reconnaissance de l’AQTIS-514.

La requête est accueillie en partie.

 


 

SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

Rien à signaler.

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