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Veille juridique du 25 février 2020

SECTION DROIT DU TRAVAIL

GÉNÉRAL

 

Commission scolaire de Montréal c. Racine 2020 QCCS 292

https://www.canlii.org/fr/qc/qccs/doc/2020/2020qccs292/2020qccs292.pdf

Il s’agit d’une demande de pourvoi en contrôle judiciaire d’une sentence arbitrale ayant accueilli un grief et annulé le congédiement d’une enseignante. Pour l’employeur, la Commission scolaire de Montréal, l’arbitre a commis des erreurs déraisonnables en écartant la preuve de surveillance par filature de l’enseignante qui visait à confirmer des soupçons quant à son incapacité à revenir au travail, et a erronément appliqué les enseignements de la jurisprudence dans son analyse du critère de la considération de la justice servant à déterminer l’admission d’une preuve recueillie en violation d’un droit fondamental.

Plus précisément, les questions en litige sont les suivantes :

[34] […]

LES QUESTIONS EN LITIGE

Est-ce que le défendeur pouvait sans commettre une erreur déraisonnable décider que la demanderesse n’avait pas de motifs sérieux pour entreprendre une filature de l’enseignante en cause ?

Est-ce que le défendeur a commis une erreur déraisonnable en opinant que l’acceptation de la vidéo de filature aurait pour effet de déconsidérer l’administration de la justice ?

Le Tribunal répond par la négative à ces deux questions.

Quant à la première question, il conclut en ces termes :

[48] En somme, la conclusion de l’arbitre voulant que l’employeur aurait dû utiliser d’autres moyens de vérifications avant de recourir à la filature dépend d’une appréciation des faits qui n’est pas déraisonnable; la Cour ne siège pas en appel de la décision de l’arbitre.

Puis, concernant la deuxième question, le Tribunal est d’avis que le raisonnement de l’arbitre qui prend en considération l’absence de motif sérieux de recourir à la filature pour évaluer le critère de la considération de la justice est raisonnable. Bien qu’un jugement de la Cour d’appel rendu après la décision de l’arbitre ait qualifié un tel raisonnement de circulaire, le Tribunal est justifié de ne pas intervenir en l’espèce puisque l’arbitre ne s’était pas limité à cette seule considération, se distinguant ainsi de la décision de la Cour d’appel, mais a également pris en considération les séquelles psychologiques permanentes de l’enseignante que lui avait provoquée la filature demandée par la CNESST dans le cadre d’un accident de travail survenu quelques années auparavant. En ce sens, le Tribunal mentionne ce qui suit :

[53] On peut concevoir qu’il pourrait être mal compris qu’un Tribunal accepte une preuve obtenue par le recours a un procédé qui avait déjà occasionné dans le passé des blessures significatives à la personne visée surtout si dans la logique du décideur les motifs justifiant son utilisation ne sont pas sérieux.

Demande de révision judiciaire rejetée.

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Pruneau et McKesson Canada – Drummondville, 2020 QCTAT 180

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat180/2020qctat180.pdf

La présente affaire porte sur une demande incidente soumise au Tribunal par la CNESST voulant qu’il détermine s’il lui est permis de statuer sur l’inaptitude d’un travailleur à exercer tout emploi. La Commission plaide son absence de compétence considérant qu’aucune disposition de la Loi sur les accidents et les maladies professionnelles ne prévoit expressément qu’un travailleur puisse être déclaré inemployable, invalide ou inapte à exercer tout emploi de façon permanente.

D’abord, le Tribunal souligne que la demande incidente qui lui est soumise est une question qui relève du pouvoir du Tribunal que lui confère l’article 9 de la Loi instituant le Tribunal administratif du travail plutôt qu’une question de compétence comme l’argumente la Commission.

Puis, il ressort de son analyse, d’une part, que la Loi ne définit pas les termes « inemployabilité », « incapacité » ou « invalidité » et qu’elle n’accorde aucun droit spécifique dans ces cas et, d’autre part, que l’objet de la loi vise au contraire la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu’elles entraînent pour les travailleurs en favorisant leur retour sur le marché du travail. « Pour atteindre cet objectif, la Loi prévoit un ensemble de mesures de réadaptations professionnelles lorsque la lésion professionnelle d’un travailleur est consolidée avec des limitations fonctionnelles », comme c’est le cas en l’espèce. Au terme de sa réadaptation professionnelle, période pendant laquelle le travailleur a le droit de recevoir une indemnité de remplacement du revenu, le travailleur est soit apte à exercer son emploi prélésionnel ou à exercer un emploi dit de convenable. Tel que défini par la loi, un emploi convenable permet au travailleur d’utiliser sa capacité résiduelle et ses qualifications professionnelles, ne comporte pas de danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique et présente des possibilités raisonnables d’embauche.

En conséquence, le Tribunal conclut que la Loi ne lui permet pas de déclarer qu’un travailleur est inemployable à tout emploi, mais qu’elle lui permet plutôt de statuer sur l’impossibilité de déterminer un emploi convenable. Il recense plusieurs décisions du Tribunal lui reconnaissant explicitement cette dernière possibilité. Le Tribunal est d’avis qu’il s’agit d’une nuance importante « puisque le travailleur pourrait toujours bénéficier à nouveau de la réadaptation professionnelle, si sa condition médicale devait changer. »

La demande incidente est rejetée.

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Pineault et Groupe Marketing International inc., 2020 QCTAT 198

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat198/2020qctat198.pdf

Le Tribunal administratif du travail est saisi de deux plaintes, la première en vertu de l’article 122 L.n.t. en raison de l’exercice d’un droit que lui confère la loi et la seconde selon l’article 124 L.n.t. pour un congédiement sans cause juste en suffisante. Ces deux plaintes sont déposées dans le contexte suivant : L’employeur considère que la salariée a démissionné de son poste de chef d’équipe du centre d’appel qu’il exploite puisque celle-ci n’a pas repris le travail au terme de son congé de maternité, et l’en informe dans une lettre qu’il lui adresse. À l’audience, il prétend que la plaignante a démissionné implicitement de son poste puisque suivant sa publication sur son compte Facebook annonçant son projet d’ouverture d’une garderie en milieu familial, elle avait l’intention de démissionner à un moment indéterminé, et comme argument subsidiaire, l’employeur plaide que la plaignante a été congédiée en raison de son manque de loyauté à son égard.

D’abord, le Tribunal est d’avis que le motif de démission allégué sur la lettre remise à la plaignante ne tient pas la route puisque la preuve démontre que devant les difficultés rencontrées afin de trouver une garderie, elle s’était entendue avec la directrice des projets et du marketing pour prolonger son congé de maternité d’un mois, puis d’une semaine supplémentaire en raison des vacances de cette dernière.

Puis, il ne retient pas la prétention de l’employeur voulant qu’il s’agisse d’une démission implicite. Malgré qu’il reconnaisse que la plaignante est avancée dans son projet d’ouverture de garderie lors de son annoncement public, il considère que sa concrétisation est subordonnée à l’inscription d’au moins deux enfants et cela la rend incertaine. En ce sens, il mentionne ceci :

[40] La volonté de quitter en emploi à la suite de la réalisation de certaines conditions est un projet, une intention, mais pas une démission effective.

Il ajoute que la plaignante continue de poser des gestes visant son retour au travail chez l’employeur, même après son annonce, contrairement à ce que le ferait une personne ayant démissionné.

En terminant, quant à l’argument subsidiaire de l’employeur voulant que la plaignante ait fait preuve de déloyauté envers lui, le Tribunal précise ceci :

[43] Il n’y a aucune faute de vouloir changer d’emploi ou de lancer son entreprise, du moment que cela ne nuise pas à la prestation de travail du salarié envers son employeur.

L’employeur n’a pas rencontré son fardeau en démontrant qu’une cause juste et suffisante justifiait le congédiement de la plaignante.

Plaintes accueillies.

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Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 2118 et Ville de Mascouche (griefs individuel, Rachel Émond et autre), 2020 QCTA 30

https://soquij.qc.ca/portail/recherchejuridique/ConsulterExtExpress/A1AF3A0345E6F91D1A22E21301642391?source=EXPTRAV

Le présent litige prend naissance suivant le rejet des candidatures des deux plaignantes pour le poste d’adjointe administrative nouvellement créé par l’employeur à la suite d’une réorganisation administrative et d’une embauche d’une personne à l’externe pour le combler. Le Syndicat soutient que les plaignantes détiennent les compétences nécessaires à leur nomination, alors que l’employeur considère qu’elles ne possèdent pas l’autonomie, le jugement et la rigueur requis pour occuper ce poste qui revêt un caractère stratégique au sein de la direction générale de la Ville. Le processus d’embauche consiste en deux étapes successives: l’entrevue et le test psychométrique. La candidature des plaignantes a été rejetée dès la première étape.

[39] D’une part, l’employeur a mis beaucoup trop de poids sur les épaules des plaignantes pour que celles-ci fassent la démonstration qu’elles avaient bel et bien les qualités qu’il recherchait, ce qui n’est pas conforme à l’esprit de la convention collective et de la lettre d’entente de 2009, et d’autre part l’employeur n’a pas été suffisamment transparent en omettant d’expliquer clairement aux plaignantes ce qu’il recherchait lorsqu’il leur a fait passer le l’entrevue.

Le Tribunal est donc d’avis qu’il était injuste pour les plaignantes d’exclure leur candidature à la suite de leur entrevue. Toutefois, il ne peut faire droit au remède demandé par le Syndicat, soit celui d’affecter l’une des plaignantes, soit celle ayant le plus d’ancienneté, un poste pour lequel elle avait postulé puisqu’elle n’a pas « réussi l’entrevue » et elle n’a donc pas été appelée à passer la deuxième étape du processus d’embauche, le test psychométrique. Ceci dit, l’arbitre ordonne le seul remède possible dans les circonstances, soit celui d’ordonner à l’employeur de lui refaire passer l’entrevue.

Grief partiellement accueilli.

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Caisse Desjardins du Haut-Richelieu et Elkermi, 2020 QCTAT 460

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat460/2020qctat460.pdf

Dans cette affaire, le Tribunal administratif du travail statue sur une demande de révision d’une décision qu’il a rendue en vertu de l’article 49 de la Loi instituant le Tribunal administratif du travail. La décision attaquée accueille la plainte pour pratique interdite prévue aux articles 15 et suivants du Code du travail, annule le congédiement de la plaignante et ordonne sa réintégration dans son emploi et le paiement d’une indemnité équivalente au salaire et aux autres avantages qu’elle a perdus en raison de la mesure prise par l’employeur à la suite du dépôt d’un grief de harcèlement psychologique.

En plus de ce grief, la plaignante a fait une plainte à l’interne qui s’est soldée par un rapport mentionnant que la plainte était non fondée et a présenté une réclamation en vertu de la Loi sur les accidents et les maladies professionnelles, laquelle lui a été refusée. D’abord, la plaignante se désiste de son recours pour faire reconnaître qu’elle a subi une lésion professionnelle, puis le Syndicat se désiste de son grief. Par la suite, la plaignante est congédiée. Dans la lettre de congédiement remise à la plaignante, l’Employeur justifie expressément son congédiement par le fait qu’elle s’est désisté de ses recours et par le fait même qu’il n’a pas eu l’occasion de réfuter les allégations de harcèlement psychologique qu’il qualifie de faussetés, de propos diffamatoires, et de graves accusations.

Dans la décision contestée, le Tribunal conclut que « l’employeur n’a pas démontré que la plaignante a agi par malveillance, insouciance grossière, mauvaise foi ou que le grief avait un caractère abusif. » Il précise que « le fait que ses allégations aient été jugées non fondées dans le cadre d’une enquête de l’employeur ne rend pas abusifs les recours qu’elle a exercés et ne peut constituer une autre cause juste et suffisante de congédiement. » L’employeur prétend que cette décision est entachée de vices de fond de nature à l’invalider. Dans la présente décision, le Tribunal rappelle qu’une demande en révision d’une décision du TAT n’est pas de la nature d’un appel, et qu’il ne s’agit pas d’une seconde appréciation de la preuve.

Après une analyse de la jurisprudence pertinente et des principes applicables en matière de révision d’une décision du TAT et du recours pour pratiques interdites, le Tribunal en révision conclut qu’en accordant le bénéfice de la présomption prévue à l’article 17 C.t. à la plaignante et en concluant que l’employeur n’a pas réussi à satisfaire son fardeau de preuve par la démonstration que l’autre cause juste et suffisante alléguée était sérieuse et véritable et ne constituait pas un prétexte, le TAT a rendu une décision ne comportant aucun vice de fond.

La demande en révision d’une décision du TAT est rejetée.

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POLICIERS

Rien à signaler.

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POMPIERS

Rien à signaler.

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PARAMÉDICS

Rien à signaler.


ARTISTES

Rien à signaler.

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SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

Bernard c. R., 2019 QCCA 1227

https://www.canlii.org/fr/qc/qcca/doc/2019/2019qcca1227/2019qcca1227.pdf

Le 20 février dernier, la Cour suprême du Canada rejetait la demande pour permission d’appeler du ministère public dans l’arrêt Bernard. Par conséquent, l’arrêt Bernard rendu le 11 juillet 2019 par la Cour d’appel du Québec reflète le droit applicable en matière d’opération Mister Big.

 Dans cette affaire, Alain Bernard, oncle de l’appelant, est retrouvé mort dans sa résidence, assassiné par une balle en 1987. L’appelant fourni une déclaration en 1987. En 2009, une opération de type « Monsieur Big » est mise en place. Au terme de cette opération, un suspect confesse à Monsieur Big que c’est l’appelant qui aurait tiré sur la victime.

 Le 15 mai 2009, le suspect et deux agents d’infiltration interceptent l’appelant au sortir de son lieu de travail. Ils ont alors une conversation d’une durée d’un peu plus d’une heure dans le véhicule de l’appelant. Au cours de l’échange, qui a été enregistré et transcrit, l’appelant s’implique dans la commission du meurtre.

 Le 19 octobre 2015, débute le procès de l’appelant pour meurtre au premier degré. Un premier voir-dire a lieu à cette date au sujet de la déclaration extrajudiciaire de l’appelant en date du 15 mai 2009. L’appelant s’oppose à l’introduction en preuve de cette déclaration au motif qu’elle est présumée inadmissible et qu’il appartenait au ministère public de démontrer que la valeur probante l’emportait sur son effet préjudiciable, conformément à l’arrêt Hart de la Cour suprême. Or, le juge de première instance tranche que le régime de Hart ne s’applique pas à la déclaration de 2009. L’appelant se pourvoit en appel au motif que le juge de première instance a erré en jugeant libre et volontaire la déclaration fournie par l’appelant en 1987 et qu’il aurait dû appliquer le régime de l’arrêt Hart à l’opération de type Mister Big.

Sur le premier moyen d’appel, la juge en chef Duval Hesler donne raison à l’appelant et estime que le juge de première instance a erré en jugeant admissible la déclaration fournie par l’appelant aux autorités en 1987 (par 35). Elle mentionne qu’en vertu de la règle des confessions, il était du fardeau du ministère public d’établir que la déclaration était libre et volontaire, ce qui n’a pas été établi dans le cas en l’espèce, puisque les témoins n’avaient pas un souvenir suffisant (par. 31 à 34)

Sur le deuxième moyen d’appel, la juge en chef Duval Hesler donne également raison à l’appelant. L’appelant n’a pas été la cible d’une opération « Monsieur Big » dans sa forme classique, c’est pourquoi le juge de première instance a eu raison de se demander si l’opération d’infiltration était en l’occurrence susceptible de poser les trois risques identifiés dans l’arrêt Hart, c’est-à-dire un aveu non digne de foi, l’introduction d’une preuve de mauvaise moralité et un abus policier. Cependant, la juge conclut qu’il s’est mépris en concluant qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer la nouvelle règle (par. 52).

Appel accueilli, déclaration de culpabilité annulée et ordonnance de nouveau procès.

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