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Veille juridique du 27 octobre 2020

SECTION DROIT DU TRAVAIL 

GÉNÉRAL

 

Hamdan et Banque Nationale du Canada, 2020 QCTA 437

https://www.canlii.org/fr/ca/csc/doc/2020/2020csc26/2020csc26.pdf

Dans ce dossier, le Tribunal est saisi d’une plainte de congédiement injuste en vertu du Code canadien du travail. Dans un premier temps, l’arbitre avait décidé que l’audience au fond se tiendrait en personne. Toutefois, le 15 juillet 2020, le Décret 810-2020 est adopté par le Gouvernement du Québec imposant notamment le port obligatoire du couvre-visage. L’arbitre demande donc aux parties si elles souhaitent toujours tenir l’audience de manière « présentielle ».

Face à cette situation, l’employeur dépose une requête formelle pour que l’audience soit tenue en personne. Au soutien de sa requête, il prétend que le litige soulève des enjeux centraux de crédibilité du plaignant. Or, l’audience virtuelle entrave directement l’évaluation de sa crédibilité et pose problème pour le contre-interrogatoire.

16. En effet, la vidéoconférence ou tout autre moyen technologique semblable ne permet pas de voir clairement le visage, de regarder dans les yeux, de voir les réactions du visage, nuances du comportement ou tout autre signe usuel de la crédibilité;

L’arbitre entreprend une analyse des pouvoirs qui lui sont délégués par la législation. Ainsi, le Tribunal est maître de la procédure à deux conditions. D’abord, il doit donner aux parties la possibilité de se faire entendre en déposant des éléments de preuve et en faisant des représentations. Ensuite, il doit tenir compte des informations contenues au dossier de la plainte.

De plus, l’arbitre exprime son désaccord avec la prétention patronale au motif qu’elle n’est soutenue par aucune preuve technique ou scientifique. Il est d’avis que le recours à la technologie ne pose aucun obstacle à l’évaluation de la crédibilité, alors qu’il est possible de voir et entendre le témoin en direct, d’observer son langage corporel et ses réactions. D’ailleurs, le Tribunal considère qu’il est avantageux pour les parties de procéder par voie technologique, puisque l’enregistrement audio-vidéo peut leur être d’une grande utilité en cas de révision judiciaire.

L’arbitre Cloutier retient également des éléments de comparaison entre les audiences virtuelles et celles en personne qui permettent d’affirmer, conformément au Protocole de la Conférence des arbitres du Québec, que dans le contexte de l’urgence sanitaire, les moyens alternatifs pour la tenue de l’audience à distance deviennent la règle et l’audience en personne l’exception.

Notamment, le nombre de participants est limité à six personnes en salle d’audience, alors que par voie technologique, ce nombre est quasiment illimité. Le partage de la preuve documentaire est restreint alors que le Protocole prévoit de limiter au strict minimum le partage d’objets.  Le Tribunal est catégorique quant à l’ensemble d’avantages offerts par la tenue des audiences par visioconférence, soit l’absence de risque au niveau sanitaire, la rapidité du processus, l’efficacité et souplesse, l’économie des coûts et l’évolution du droit par la « cyberjustice » dont la pandémie n’a fait qu’accélérer l’utilisation.

[91] Dans l’avenir, même après la pandémie actuelle, il est raisonnable de penser que l’utilisation maximale des technologies de l’information dans l’administration de la justice et en particulier dans le domaine de l’arbitrage des griefs deviendra la règle générale et les audiences physiques traditionnelles, l’exception et uniquement dans la mesure où une partie qui s’y oppose aura le fardeau de démontrer qu’elle n’a pas les outils pour y participer.

[92] Il serait déraisonnable de penser que ces nouveaux outils technologiques seront une panacée à tous les maux et résoudront tous les problèmes inhérents à l’administration de la justice, mais vouloir maintenir le statut quo à la moindre petite embûche serait, à mon humble avis, une grave erreur qui ne ferait que retarder l’évolution du droit et de l’administration de la justice.

Le Tribunal rejette la requête et ordonne la tenue de l’audience au fond par visioconférence.

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Charlebois c. Teamsters Québec, local 1999, 2020 QCTAT 3301

https://www.canlii.org/fr/ca/csc/doc/2020/2020csc28/2020csc28.pdf

Dans cette affaire, le Tribunal administratif du travail (TAT) est saisi d’une plainte en vertu de l’article 47.2 du Code du travail. Le plaignant reproche au syndicat d’avoir manqué à son devoir de juste représentation en retirant son grief. Par ce grief, il contestait la décision de l’employeur de ne pas lui confier du travail à taux majoré pendant la période des Fêtes de décembre 2019. En réponse à la plainte, le syndicat soutient que le grief n’avait aucune chance de succès puisque le plaignant était en congé annuel à la période visée et qu’il s’agit plutôt d’une interprétation erronée de la convention collective.

Le Tribunal explique que le devoir de juste représentation n’exige pas du syndicat de déférer tous les griefs à l’arbitrage. Le monopole de la représentation syndicale accorde un pouvoir de discrétion lui permettant de retirer un grief sans manquer à ses obligations. L’analyse lors d’une plainte en 47.2 C.tr. doit porter sur la démarche du syndicat afin de déterminer si un examen honnête et sérieux a été effectué, ou au contraire, s’il a agi de mauvaise foi, de manière arbitraire, discriminatoire ou s’il a fait preuve de négligence grave.

La juge administrative conclut que la décision de retirer le grief est fondée sur une analyse sérieuse et une interprétation constante de la convention collective, confirmées par un avis juridique obtenu sur la question. D’ailleurs, le syndicat a déposé initialement le grief afin de protéger les droits du plaignant en attendant les résultats de son enquête.

[21] Le devoir de juste représentation ne va pas jusqu’à obliger un syndicat à remettre en question devant un arbitre des dispositions de la convention collective qui ont fait l’objet d’une interprétation constante entre l’employeur et lui parce que l’un de ses membres s’y oppose.

La plainte est rejetée.

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Syndicat des copropriétaires des Tours de la Rivière – Phase II c. Tribunal administratif du travail, 2020 QCCS 3004

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat3365/2020qctat3365.pdf

La Cour supérieure du Québec entend un pourvoi en contrôle judiciaire à l’encontre de la décision rendue en cours d’instance par le Tribunal administratif du travail (TAT). Dans sa décision, le TAT reconnaît Mariana Trohanel (la plaignante) à titre de salariée du syndicat, par opposition à celui d’entrepreneuse indépendante. Dans les faits, le syndicat confie à la plaignante l’exécution de l’entretien ménager et de conciergerie. Par la suite, celle-ci dépose une plainte pour harcèlement psychologique contre le syndicat. Lors de l’audience sur la plainte, le TAT rejette le moyen préliminaire du syndicat alléguant l’absence de compétence puisque la plaignante n’est pas une salariée au sens de la Loi sur les normes du travail.

La Cour décide d’intervenir en raison des lacunes fondamentales et déraisonnables que contient la décision interlocutoire du TAT. D’abord, la décision réfère à plusieurs reprises aux tâches effectuées par le « couple » (la plaignante et son conjoint) et reconnaît que c’est l’entreprise d’entretien qui recevait la rémunération. Or, cela va à l’encontre d’une jurisprudence constante réservant le statut de salarié aux personnes physiques. De plus, l’importance de la subordination juridique dans une relation entre l’employeur et le salarié ne permet pas un tel partage de tâches. Enfin, l’état du droit en matière de contrat d’entreprise est applicable aux faits du dossier, puisque la plaignante bénéficiait d’une grande marge de manœuvre dans l’exécution de son travail et elle n’était pas personnellement obligée de fournir la prestation de travail. Donc, il est déraisonnable et illogique de conclure que la plaignante est une salariée au sens de la L.n.t.

Le pourvoi est accueilli.

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Recy-Récolte inc. et Bourget, 2020 QCTAT 3292

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat3292/2020qctat3292.pdf

Dans ce dossier, l’employeur conteste la décision rendue par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) ayant accepté la réclamation du travailleur et reconnu sa lésion professionnelle. L’employeur allègue que l’article 27 de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (L.a.t.m.p.) s’applique, car la blessure serait survenue uniquement à cause de la négligence grossière et volontaire du travailleur. En fait, l’accident est survenu alors que son collègue travaillait avec une masse qui lui a glissé des mains et a atteint le travailleur à la tête. Or, l’employeur prétend que son collègue et lui auraient emprunté la masse à un client sans autorisation et sans prendre les précautions nécessaires.

Le Tribunal retient certains éléments factuels pertinents pour rendre sa décision. D’abord, le travailleur, un chauffeur-ramasseur de débris, est un employé nouvellement embauché qui a été jumelé à un autre nouvel employé ne cumulant que quelques mois d’ancienneté. Ensuite, avant l’accident, le travailleur a appelé l’employeur pour recevoir des conseils sur la démarche à suivre et ce dernier lui indique de trouver lui-même la solution. À ce sujet, l’employeur qui met de la pression sur un travailleur pour régler une situation problématique sans lui offrir de l’aide peut difficilement lui reprocher son comportement par la suite. Enfin, la maladresse du collègue a joué un rôle déterminant dans la survenance de l’accident.

Ainsi, tous ces éléments doivent être analysés en fonction de la spécificité du régime d’indemnisation en matière d’accidents du travail. Le niveau de négligence nécessaire pour donner ouverture à l’application de l’article 27 L.a.t.m.p. doit être supérieur à la simple imprudence.

[9] Cette disposition doit s’interpréter en gardant à l’esprit l’objectif général de la Loi, soit de favoriser la réparation des lésions professionnelles et des conséquences qu’elles entraînent. Par ailleurs, l’article 25 prévoit que les droits conférés par la Loi le sont sans égard à la responsabilité de quiconque. Conséquemment, l’article 27 est une mesure d’exception à ces principes généraux qui doit s’appliquer de façon restrictive.

Par conséquent, la contestation de l’employeur est rejetée.

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POLICIERS ET POLICIÈRES

Rien à signaler.

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TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER

 

Syndicat des paramédics Saguenay-Lac-St-Jean-Nord FSSS-CSN et Ambulance Chicoutimi inc. (Robert Junior Gravel), 2020 QCTA 452

https://soquij.qc.ca/portail/recherchejuridique/AZ/51710912

Le syndicat conteste la décision de l’employeur, datée du 27 mars 2018, de mettre fin à l’emploi du plaignant en raison de son absence et incapacité de travailler comme technicien paramédic depuis son accident du travail survenu le 13 janvier 2014. Le syndicat demande au Tribunal de rétablir le lien d’emploi jusqu’à la retraite du plaignant, sans en réclamer l’intégration sur son poste. Cette demande est basée sur la lettre d’entente prévue dans la convention collective prévoyant une allocation de départ pour les techniciens ambulanciers paramédics qui sont actifs à l’âge de 55 ans.

La partie syndicale soutient qu’il n’y a pas de preuve à l’effet qu’il existe des contraintes excessives justifiant la fin de l’accommodement du salarié. Au contraire, le lien d’emploi a été maintenu pour plus de quatre ans après l’accident de travail. L’employeur prétend, pour sa part, qu’il est justifié de rompre le lien d’emploi puisqu’aucun retour au travail n’est prévu dans un avenir prévisible. D’ailleurs, la CNESST a décidé que le plaignant n’est plus en mesure d’occuper un emploi, même un emploi convenable dans l’entreprise, et il n’a pas contesté cette décision, le débat est donc clos. Au sujet de la lettre d’entente, l’employeur s’objecte au motif que le plaignant n’est pas actif au sens des dispositions conventionnées et il ne peut donc bénéficier de l’allocation de départ.

L’arbitre retient la thèse syndicale. Il note que le salarié a 51 ans au moment du congédiement et que la lettre d’entente a pris effet quatre ans avant l’accident de travail. Également, il se base sur l »arrêt Caron, de la Cour suprême du Canada, ayant confirmé la nécessité de vérifier si l’employeur a respecté son obligation d’accommodement découlant de la Charte des droits et libertés de la personne (Charte).

En effet, les articles 10 et 16 de la Charte imposent une obligation d’accommodement qui n’est pas illimitée. Elle doit s’évaluer par la juxtaposition des concepts d’accommodement raisonnable et de contraintes excessives. Cela signifie que l’accommodement d’un salarié peut effectivement causer des contraintes à l’employeur, mais à moins qu’il n’en résulte un fardeau excessif ou déraisonnable, la nécessité d’accommoder prime sur ces contraintes. L’arbitre conclut que le plaignant est discriminé en raison de son handicap, causé par un accident de travail reconnu, en comparaison des autres techniciens ambulanciers paramédics qui peuvent travailler jusqu’à 55 ans. Donc, le plaignant a le droit de bénéficier de la lettre d’entente.

[58] Dans les circonstances précédemment exposées, nous décidons que l’employeur n’était pas justifié de procéder à la fin d’emploi administrative le 27 mars 2018 et qu’il est équitable de permette au salarié de pouvoir bénéficier des avantages prévus à la lettre d’entente n° 1 à l’âge de 55 ans.

[59] Le délai de 4 ans supplémentaire à la date du congédiement pour atteindre 55 ans est raisonnable, équitable et comparable au délai de plus de 4 ans entre l’accident de travail du 13 janvier 2014 et le congédiement du 22 mai 2018.

[60] Notre décision ne crée pas de contrainte excessive pour l’employeur. Le motif de saine gestion des fonds publics invoqué par l’employeur est louable. Nous ne créons pas un lien d’emploi fictif. Notre décision est équitable et découle des dispositions de la convention collective et de l’obligation d’accommodement de l’employeur envers son salarié victime d’un accident de travail.

Le grief est accueilli.

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POMPIERS ET POMPIÈRES

Rien à signaler.

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ARTISTES

Société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC) et Solofilms inc. (3620425 Canada inc.), (grief syndical), 2020 QCTA 481

https://www.canlii.org/fr/qc/qctaa/doc/2020/2020canlii77902/2020canlii77902.pdf

La SARTEC (association d’artistes) dépose un grief alléguant que Solofilms inc. (producteur) a conclu des contrats d’écriture avec les auteurs Louis-Philippe Tremblay et Vincent Wilson pour le scénario d’une œuvre cinématographique. Le producteur a déposé le scénario écrit par les auteurs en financement de la production mais le tournage n’a jamais débuté. Les auteurs sont d’ailleurs demeurés sans nouvelles du producteur. Ce faisant, l’association d’artistes réclame la rétrocession des droits sur le texte écrit par les auteurs et le versement des sommes dues.

Or, le producteur informe l’association d’artistes qu’il n’entend pas participer à l’audience, malgré sa reconnaissance de dette, en raison d’un manque de liquidité. Avant l’audience, le producteur consent tout de même à l’acte de rétrocession demandé afin de retourner les droits sur le texte aux auteurs. Disposant ainsi de l’une des conclusions de la réclamation.

Le grief est donc accueilli pour ordonner le paiement de la somme de 2 484 $ à l’association d’artistes.

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SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

Rien à signaler.

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