PAR MILIA LANGEVIN ET ME LYLIA BENABID
SECTION DROIT DU TRAVAIL
GÉNÉRAL
Roberge et Sport Maska inc., 2023 QCTAT 2250
Disponible ici : https://canlii.ca/t/jx9fv
La travailleuse, ayant uniquement occupé des emplois manuels dans le domaine de la couture et du patron, subit une lésion professionnelle dont le diagnostic est une tendinite de De Quervain au pouce et poignet droit. La lésion est consolidée avec des limitations fonctionnelles qui la rendent incapable de retourner à son emploi. La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (ci-après, la Commission) détermine ainsi un autre emploi que la travailleuse pourra exercer sur le marché du travail; l’emploi de réceptionniste est déclaré convenable.
La travailleuse saisit le Tribunal afin d’infirmer cette décision. Elle considère que l’emploi de réceptionniste n’est pas convenable, notamment parce qu’elle souffre de dyslexie et d’une lourde condition dépressive.
Le Tribunal souscrit au courant jurisprudentiel selon lequel le fardeau de démontrer qu’un emploi est convenable pour un travailleur incombe à la Commission. Celle-ci ne s’est pas déchargée de ce fardeau. L’emploi de réceptionniste n’est pas convenable pour la travailleuse. En effet, les limitations fonctionnelles sévères de celle-ci, conjuguées à son problème de dyslexie, ne lui permettent pas d’utiliser sa capacité résiduelle. Ainsi, même si les limitations de la travailleuse avaient été considérées suffisamment compatibles avec l’emploi de réceptionniste, celui-ci ne présenterait pas de possibilités raisonnables d’embauche.
Pour ces motifs, la contestation de la travailleuse est accueillie.
Popa c. Syndicat des chargées et chargés de cours de l’Université de Sherbrooke (CSQ), 2023 QCTAT 2490
Disponible ici : https://canlii.ca/t/jxkv6
Le plaignant dépose une plainte en vertu de l’article 47.2 du Code du travail (ci-après, le Code), contre le Syndicat des chargées et chargés de cours de l’Université de Sherbrooke (CSQ) (ci-après, le Syndicat) puisqu’il considère que celui-ci a manqué à son devoir de représentation en refusant de déférer ses griefs à l’arbitrage.
Le Syndicat fait valoir que la prescription des griefs les rendait voués à l’échec, le délai prévu étant de rigueur.
Le Tribunal conclut que le Syndicat n’a pas manqué à son devoir de représentation en refusant de déférer les griefs du plaignant à l’arbitrage puisqu’il n’a pas commis de faute lourde, grossière, impardonnable ou inexcusable. Il base son analyse sur les comportements prohibés de l’article 47.2 du Code énumérés dans l’affaire Noël c. Société d’énergie de la Baie James et résumés dans l’affaire Barrouk c. Union des employés d’hôtels, restaurant et commis de bars, local 31 :
[55] […] La mauvaise foi « suppose une intention de nuire, un comportement malicieux, frauduleux, malveillant ou hostile ». Le comportement discriminatoire comprend « toutes les tentatives de défavoriser un individu ou un groupe sans que le contexte des relations de travail dans l’entreprise ne le justifie ». La mauvaise foi et la discrimination impliquent un comportement vexatoire de la part du syndicat.
[56] Dans le cas de l’arbitraire et de la négligence grave, même sans intention malicieuse, les actes de l’association ne doivent pas dépasser « les limites de la discrétion raisonnablement exercée ». Au sujet de l’arbitraire, une association ne peut pas traiter une plainte d’un salarié « de façon superficielle ou inattentive ». L’association doit faire une enquête. Elle doit « examiner les faits pertinents ou obtenir les consultations indispensables, le cas échéant, mais aussi tenir compte des ressources de l’association, ainsi que des intérêts de l’ensemble de l’unité de négociation ». L’association jouit d’une discrétion importante au sujet de la forme et de l’intensité de ses démarches.
[57] La négligence grave comprend « [u]ne faute grossière dans le traitement d’un grief ». Cependant, l’article 47.2 n’impose pas une norme de perfection. L’analyse du comportement syndical peut tenir compte des facteurs suivants : les ressources disponibles; l’expérience et la formation des représentants syndicaux, le plus souvent des non-juristes; les priorités reliées au fonctionnement de l’unité de négociation; l’importance du grief pour le salarié; les chances de succès du grief; l’intérêt concurrent des autres salariés dans l’unité de négociation.
Pour ces motifs, la plainte est rejetée.
Breton c. Groupe Immotion inc., 2023 QCTAT 1974
Disponible ici :https://canlii.ca/t/jx1bk
La travailleuse, une préposée aux bénéficiaires dans une résidence pour personnes âgées, dépose une plainte contre son employeur en vertu de l’article 124 de la Loi sur les normes du travail (ci-après, la Loi) puisqu’elle allègue avoir fait l’objet d’un congédiement sans cause juste et suffisante. En effet, elle soutient que l’employeur a failli à la règle de la gradation des sanctions et que son congédiement constitue une double sanction puisqu’elle a déjà purgé une suspension pour les mêmes motifs.
La preuve administrée à l’audience favorise la position de la travailleuse. L’employeur prétend l’avoir congédiée notamment en raison de discussions conflictuelles avec ses collègues et les résidents. Or, le congédiement de la travailleuse constitue une double sanction, puisqu’elle avait déjà été suspendue pour une période de 15 jours pour avoir adopté un comportement brutal envers un collègue.
Le Tribunal est d’avis que la travailleuse n’a pas été congédiée pour une cause juste et suffisante, l’employeur n’ayant pas réussi à démontrer les manquements reprochés. La réintégration n’est cependant pas le remède approprié. Une indemnité de 4 676, 40 $ pour perte de salaire et autres avantages lui est octroyée.
La plainte est accueillie.
Syndicat démocratique des employés de garage Saguenay Lac-Saint-Jean (CSD) c. Blackburn, 2023 QCCA 817
Disponible ici : https://canlii.ca/t/jxswg
Le syndicat appelant tentait d’obtenir remboursement d’un important prêt (à hauteur de 7 000 000$) contracté durant un long conflit de travail par l’entremise duquel le syndicat avait pu verser des aides financières aux employés pendant le long lock-out les ayant affectés de 2013 à 2016.
Après leur retour au travail, les intimés ont décidé de joindre un syndicat concurrent affilié à la FTQ et le syndicat appelant avait alors été incapable de rembourser le prêt ne recevant plus les cotisations syndicales de leurs ex-membres.
Le syndicat prétendait que de futures contributions avaient été promises (au sens des articles 2275 et 2276 du C.c.Q) par les anciens membres du syndicat qui avaient pu bénéficier de versements durant le conflit de travail.
La Cour d’appel rejette l’appel du syndicat considérant que le procès-verbal de l’assemblée générale qui invoque des contributions promises a été produit au moment où le litige entre les parties était déjà matérialisé, soit près de deux ans après ladite assemblée générale, ce qui confère au procès-verbal une faible valeur probante. Ainsi, le juge de première instance n’a pas erré de manière manifeste et déterminante en concluant que les intimés n’ont pas convenu de rembourser la marge de crédit au moyen de « contributions promises ».
La Cour d’appel rejette le moyen d’appel subsidiaire fondé sur la restitution des prestations et l’enrichissement sans cause considérant que les intimés ne se sont pas engagés à une contribution promise pour rembourser l’emprunt et du fait que la dette de l’appelant a été remboursée complètement le 30 juillet 2019 grâce à la hausse des cotisations syndicales des employés qui sont retournés au travail et aux cotisations des nouveaux membres de l’appelant.
POLICIERS ET POLICIÈRES
Commissaire à la déontologie policière c. Côté-Joncas., 2023 QCCDP 46
Disponible ici : https://canlii.ca/t/jxgnv
Le Comité de déontologie policière (ci-après, le Comité) reconnait que les agents ont commis des inconduites contrevenant au Code de déontologie des policiers (ci-après, le Code), notamment en s’immisçant dans un litige civil contrevenant à leur obligation de respecter l’autorité de la loi et des tribunaux et de collaborer à l’administration de la justice, en n’exerçant pas leurs fonctions avec désintéressement et impartialité et en abusant de leur autorité dans leurs rapports avec une citoyenne en l’intimidant.
Le Comité rappelle les pouvoirs considérables dont jouissent les policiers et leur rôle de gardien du respect des normes et des conduites prescrites à l’ensemble des policiers du Québec. Il fait également énumération des facteurs subjectifs qui devront être pris en compte lors de l’imposition des sanctions aux manquements reprochés :
a) leur situation professionnelle, à savoir leur expérience, leur statut en regard de l’exercice de la fonction et le contexte dans lequel le policier est appelé à exercer ses fonctions dont son grade;
b) le risque de récidive en tenant compte notamment du profil déontologique du policier, de sa conduite postérieure à la citation et des mesures de prévention proposées;
c) dans certains cas spécifiques, il pourra aussi être tenu compte des conséquences subies par le policier.
Le Tribunal impose respectivement une suspension de 4 jours au premier policier et de 3 jours pour le second, ce dernier n’ayant pas été reconnu coupable du dernier chef reproché à son collègue.
TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER
Rien à signaler.
POMPIERS ET POMPIÈRES
Rien à signaler.
ARTISTES
Rien à signaler.
SECTION DROIT CRIMINEL
GÉNÉRAL
Abel c. R., 2023 QCCA 824
Disponible ici : https://canlii.ca/t/jxswn
La Cour d’appel rejette l’appel du contrevenant reconnu coupable d’avoir possédé et distribué de la pornographie juvénile.
Le poursuivant n’a pas restreint indûment l’accès à la preuve, considérant qu’il détient un pouvoir discrétionnaire de choisir « le moment et la forme de la divulgation ». Par ailleurs, considérant la nature hautement sensible du matériel pédopornographique et afin de restreindre la possibilité de diffusion et dans l’objectif de ne pas revictimiser les enfants victimes de cette violence sexuelle, les contraintes imposées pour la consultation de la preuve au sein des bureaux de la Sûreté du Québec n’ont pas restreint les droits à une défense pleine et entière de l’accusé.
Le fait que l’accusé se sentait contraint de collaborer à l’enquête par son employeur (les Forces armées canadiennes) n’a pas teint le caractère libre et volontaire de sa déclaration à la police.
De plus, l’appelant ne pouvait exiger une nouvelle consultation de son avocat, car au moment de sa demande, il n’y avait aucun changement significatif dans les circonstances ni d’aggravation des risques encourus par l’appelant qui aurait pu faire en sorte que les conseils reçus ne suffisaient plus ou n’étaient plus valides.
Finalement, la Cour d’appel conclut qu’il n’y a pas eu d’erreur quant aux directives finales soumises au jury. Le juge a longuement abordé la défense de possession innocente et a correctement expliqué aux jurés comment considérer ce moyen de défense. Le juge a légitimement avancé au jury que l’appelant savait comment cacher, retrouver et effacer des fichiers informatiques considérant que l’appelant est informaticien.
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