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Veille juridique du 6 février 2018

GÉNÉRAL

Québec (Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail) c. Caron, 2018 CSC 3
https://www.canlii.org/fr/ca/csc/doc/2018/2018csc3/2018csc3.html?searchUrlHash=AAAAAQAFY2Fyb24AAAAAAQ&resultIndex=1
Cour suprême du Canada

La question en litige dans le présent pourvoi consiste à se demander si l’obligation de l’employeur de prendre des mesures d’accommodement raisonnables en faveur de quelqu’un ayant une invalidité, une obligation constituant un principe central et transcendant en matière de droits de la personne, s’applique aux travailleurs subissant une invalidité à leur lieu de travail.

La LATMP prévoit un régime complet d’indemnisation des accidentés du travail, mais n’impose pas expressément l’obligation de les accommoder. Effectivement, l’obligation d’accommodement découle des articles 10 et 16 de la Charte des droits et libertés de la personne.

L’obligation d’accommodement exige un accommodement tel que l’employeur peut démontrer qu’il n’aurait pu prendre aucune autre mesure raisonnable ou pratique pour éviter les conséquences fâcheuses pour l’individu.

La Cour est d’avis que les droits et avantages qu’accorde la Loi au travailleur victime d’une lésion professionnelle doivent donc être interprétés et mis en œuvre conformément à l’obligation de l’employeur d’accommoder raisonnablement les employés ayant subi une lésion professionnelle, conclusion qui, à son tour, emporte que la CSST et la CLP possèdent le pouvoir de réparation exclusif, dans la mise en œuvre des art. 236 et 239 de la Loi en ce qui concerne le droit à la réintégration, à un emploi équivalent ou à un emploi convenable, d’imposer à l’employeur des mesures d’accommodement raisonnablement possibles à l’égard de la lésion subie par le travailleur invalide et des circonstances qui en découlent.

Néanmoins, contrairement à la Cour d’appel du Québec, la Cour suprême ne tranche pas complètement et de façon définitive la question de la compétence de l’arbitre de grief. Est-ce que le TAT et l’arbitre de grief ont une compétence concurrente pour analyser si l’employeur a rencontré de son obligation d’accommodement dans le cadre d’un retour au travail d’un salarié victime d’une lésion professionnelle ?

Le présent arrêt fera assurément couler encore beaucoup d’encre.

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Larochelle et Gouvernement du Québec, Direction des relations professionnelles, Conseil du Trésor, 2018 QCTAT 207 https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2018/2018qctat207/2018qctat207.html?autocompleteStr=2018%20QCTAT%20207&autocompletePos=1

Plainte en vertu de l’article 15 du Code du travail déposé par le vice-président de la section locale 401 du Syndicat des fonctionnaires du Québec.

L’Employeur reproche au représentant syndical d’avoir discrédité son employeur sur la place publique et d’avoir ainsi contrevenu à son obligation de loyauté. Une suspension de deux semaines a été imposées au plaignant.

En l’espèce, de prime abord, la cause invoquée par l’employeur semble une cause réelle et sérieuse. Le plaignant a bel et bien discrédité son employeur publiquement et a ainsi contrevenu à son obligation de loyauté.

Pour le Tribunal, les propos tenus par le plaignant sont reliés à un enjeu syndical et ils s’inscrivent dans les limites acceptables de la liberté d’expression et de l’immunité relative dont jouit le représentant syndical.

Les représentants syndicaux jouissent d’une immunité relative pour les fautes qu’ils peuvent commettre lorsqu’ils agissent conformément à leur mandat syndical. Cette immunité est censée les placer à l’abri de sanctions disciplinaires lorsque, dans le cadre de leurs fonctions syndicales, ils prennent la parole publiquement pour défendre les intérêts des membres de leur syndicat.

Le plaignant a le droit de s’exprimer publiquement à titre de dirigeant syndical à la radio sur des enjeux syndicaux légitimes et ce, sans qu’une autorisation soit nécessaire. Son droit de parole syndical l’emporte sur l’obligation de loyauté à l’endroit de l’employeur.  

Lorsqu’un plaignant agit strictement à titre de représentant syndical et qu’il commet des erreurs de bonne foi, il est protégé par son immunité, même si cela peut sembler le mettre en conflit de loyauté envers son employeur.

Plainte accueillie.

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Unifor, section locale 160-Q et Duchesne & Fils ltée (grief syndical), 2017 QCTA 868 https://www.canlii.org/fr/qc/qcsat/doc/2017/2017canlii81731/2017canlii81731.html?resultIndex=6

Décision portant une objection patronale à la recevabilité du grief. L’employeur invoque le non-respect par le Syndicat de la procédure impérative prévue aux articles 9 et 10 de la convention collective, lorsqu’il a déposé, au bénéfice des salariés visés par les déplacements, un grief signé par le représentant syndical. Pour l’Employeur, les salariés devaient impérativement « soulever des griefs individuels ».

L’employeur prétend que l’article 69 du Code du travail bien qu’étant d’ordre public, n’empêche pas le Syndicat d’y renoncer puisqu’il s’agit d’ordre public de protection.

« 69.   [Recours] L’association accréditée peut exercer tous les recours que la convention collective accorde à chacun des salariés qu’elle représente sans avoir à justifier d’une cession de créance de l’intéressé. »

Pour l’employeur, étant donné que la convention collective prévoit un droit individuel pour les salariés de déposer un grief, le syndicat a renoncé à la règle générale de l’article 69 du Code.

Cependant, l’arbitre n’est pas de cet avis. Ce n’est pas parce que la convention collective accorde à un salarié le droit de déposer un grief, ce qui est un recours, que l’on doit en déduire que le syndicat a renoncé à le faire en son nom.

Autrement, on viderait totalement de son sens l’article 69 du Code du travail, qui demeure minimalement une disposition d’ordre public, fût-elle de protection.

En fait, cette disposition n’a d’utilité que si la convention collective accorde aux salariés le droit de déposer un grief. En effet, en raison du monopole de représentation dont l’investit l’accréditation et de la réalité juridique découlant du fait que c’est lui (et non les salariés qu’il représente) qui est signataire, avec l’Employeur, du contrat que constitue la convention collective, il n’y a aucun doute que même en l’absence de l’article 69 le syndicat, et lui seul, pourrait déposer un grief.

Selon l’arbitre, c’est précisément pour éviter tout malentendu pouvant découler du fait que la convention collective peut prévoir qu’un salarié peut déposer un grief qu’il était nécessaire de préciser que cela ne portait pas atteinte aux droits de l’association accréditée de déposer un grief en son nom.

Objection patronale rejetée. Le grief est recevable.

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Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce, section locale 501 et Groupe BMTC inc. (grief patronal), 2017 QCTA 903
https://www.canlii.org/fr/qc/qcsat/doc/2017/2017canlii85798/2017canlii85798.html?resultIndex=3

Suite à une audience tenue le 30 novembre 2017 concernant un grief en vertu de l’article 59 Du code du travail, le syndicat s’est désisté de son recours alors que celui-ci était en délibéré par l’arbitre depuis 9 jours.

Suite au désistement, l’employeur a déposé un grief incident en dommage pour abus de procédure suivant l’esprit de l’article 51 du Code de procédure civile :

51. Les tribunaux peuvent à tout moment, sur demande et même d’office, déclarer qu’une demande en justice ou un autre acte de procédure est abusif.

L’abus peut résulter, sans égard à l’intention, d’une demande en justice ou d’un autre acte de procédure manifestement mal fondé, frivole ou dilatoire, ou d’un comportement vexatoire ou quérulent. Il peut aussi résulter de l’utilisation de la procédure de manière excessive ou déraisonnable ou de manière à nuire à autrui ou encore du détournement des fins de la justice, entre autres si cela a pour effet de limiter la liberté d’expression d’autrui dans le contexte de débats publics.

S’il est vrai que selon les enseignements de la jurisprudence et les principes énoncés à l’article 51 du Code de procédure civile, on n’a pas à prouver mauvaise foi de la part du Syndicat et que l’abus peut exister « sans égard à l’intention », si l’on n’a pas à répéter que toute personne, dans l’exercice de ses droits, doit agir de bonne foi, il ne faut pas non plus oublier que ladite de bonne foi se présume.

Pour décider de la présente affaire, l’arbitre n’a pas à se demander si le Syndicat, représenté par son procureur, a agi et a réagi de la façon dont ses membres, le Tribunal et même l’Employeur, devaient s’attendre à ce qu’il le fasse dans le cadre normal des affaires, dans les circonstances propres à une période turbulente et difficile qui caractérise souvent une campagne de syndicalisation.

Jusqu’au désistement de son grief par le Syndicat, en aucune occasion, lors de l’audience ou même lorsque le Tribunal a cru approprié de communiquer avec les procureurs des parties pour leur faire part de ses questionnements et leur demander leur réaction, jamais la partie patronale n’a soulevé ou n’a fait allusion au caractère prétendument abusif de la démarche du Syndicat.

On ne peut pas non plus faire un procès d’intention à une partie qui, selon la preuve prépondérante, a exercé, de façon préventive peut-être, en l’absence des informations qui lui eurent été nécessaires pour se former un meilleur jugement, un recours qui n’est aucunement inhabituel dans les circonstances et m’apparaît s’être inscrit dans le cours normal des affaires dans les circonstances bien précises qui m’ont été présentées.

Grief incident rejeté.

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POLICIERS

Bousquet et Service de police de Longueuil, 2018 QCTAT 447
https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2018/2018qctat447/2018qctat447.html?searchUrlHash=AAAAAQAIcG9saWNpZXIAAAAAAQ&resultIndex=14

Le travailleur, policier à la retraite depuis 2010, demande au Tribunal d’infirmer la décision contestée et de déclarer qu’il est porteur d’une surdité professionnelle.

Le travailleur à été policier au Service de Police de la Ville de Montréal du 21 avril 1980 au 3 novembre 2010, soit 30 ans et sept mois. Tout au long de sa carrière de policier, il a porté une arme à feu et a participé annuellement à des séances d’entraînement au tir. Lors de ces séances d’entraînement, il a été exposé au bruit des coups de feu à répétition. Ces séances se tenaient autant en salle qu’à l’extérieur. Le port du casque et des lunettes est obligatoire pour protéger les oreilles et les yeux lors des séances de tir.

Lors des pratiques de tir, il s’est retrouvé à quelques occasions, accidentellement, à entendre des coups de feu sans porter son casque correctement, entre autres, au moment d’écouter les instructions entre chaque commande de tir, ainsi en déplaçant les écouteurs pour entendre la commande puis oublier de les remettre en place correctement.

Le travailleur demande au Tribunal de conclure que sa surdité a été causée par le travail qu’il a exercé chez l’employeur et ses employeurs antérieurs. C’est donc sous l’angle de la maladie professionnelle que le Tribunal doit analyser la lésion.

Le travailleur tente de relier sa surdité au travail. L’exposition au bruit, si tant est, prend fin en novembre 2010 à son départ à la retraite. Pourtant, il ne constate un problème d’ouïe qu’en 2013. De plus, ce problème d’ouïe ne nécessite pas de consultation médicale avant septembre 2015.

Il semble que la progression de la surdité a continué au-delà des premières années d’exposition et même de la fin de l’exposition au bruit alléguée et que ce n’est que cinq ans après sa retraite que le travailleur a senti le besoin d’une consultation médicale. Dans ce contexte, il est difficile de qualifier la surdité comme étant une atteinte auditive causée par le bruit surtout que l’audiologiste parle plutôt d’une hypoacousie neurosensorielle compatible avec l’âge.

Pour conclure qu’une atteinte auditive est causée par le bruit, cette atteinte doit être neurosensorielle, bilatérale, symétrique et plus sévère dans les hautes fréquences. De plus, une atteinte auditive causée par le bruit se caractérise généralement à l’audiogramme par une chute évidente du seuil d’audition dans les fréquences de 4000 hertz, avec une remontée caractéristique dans les fréquences de 6000 à 8000 hertz, les fréquences les plus basses n’étant que peu ou pas touchées, sauf dans un stade de surdité très avancé. Cette remontée doit être importante dans les fréquences de 6000 à 8000 hertz.

En l’espèce, le travailleur n’a offert aucune preuve établissant la durée du bruit excessif allégué ou son intensité. La preuve de l’exposition à du bruit excessif du travailleur est ténue.

La preuve soumisse ne permet pas de conclure que l’ex-policier est porteur d’une surdité professionnelle.

Réclamation rejetée.

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POMPIERS

Syndicat des pompiers et pompières du Québec, section locale Val-D’Or (temps partiel) c Val-D’Or (ville), 2018 CanLII 2788 (QC SAT)
https://www.canlii.org/fr/qc/qcsat/doc/2018/2018canlii2788/2018canlii2788.html?searchUrlHash=AAAAAQAIcG9saWNpZXIAAAAAAQ&resultIndex=10

Un pompier a été suspendu sans solde et ultérieurement congédié à la suite de sa condamnation pour des voies de fait graves qu’il a commises alors qu’il était dans le cadre de sa vie personnelle. L’application de l’article 18.2 de la Charte des droits et libertés de la personne, invoquée par la partie syndicale, est au centre du présent litige.

Pour que le congédiement soit justifié, l’employeur à le fardeau de démontrer « d’un lien objectif entre l’infraction commise et le poste occupé ou convoité ». L’analyse de la preuve du lien entre l’infraction commise et l’emploi occupé par le salarié concerné ne doit pas être faite in absracto, mais doit forcément tenir compte du « contexte » réel dans lequel s’inscrit le dossier.

La preuve patronale est à l’effet que (1) le rôle d’un pompier est, entre autres fonctions, de porter secours à des sinistrés et victimes d’accident ; (2) le plaignant a blessé un citoyen et ne lui a pas porté assistance ; (3), du coup, le plaignant ne peut donc plus occuper cet emploi de pompier car un lien avec l’emploi existe.

Pour l’arbitre, ce type d’équation automatique me paraît à l’opposé de l’analyse contextuelle suggérée par la Cour suprême dans Maksteel.  Elle fait d’abord abstraction du cadre factuel dans lequel se sont déroulés les événements du 23 novembre 2012, soit une triste bataille, ayant causé de graves blessures à un employé de bar, et ce, alors que le plaignant n’était ni en fonction, ni en uniforme de pompier.

Elle ne tient pas compte, non plus, de l’emploi occupé par le plaignant. Rien à la preuve n’indique, en effet, qu’un pompier, dans l’exécution de son emploi, est appelé à intervenir dans un tel contexte de bataille de ruelle. Le fait que les pompiers de la Ville soient des « premiers intervenants » paraît beaucoup plus de l’ordre d’une vague éventualité que d’une réalité pouvant être associée concrètement à l’emploi du plaignant.

Or, où est le « lien objectif » entre cet emploi, sa nature concrète, son encadrement et sa forme d’organisation structurée et, d’autre part, l’infraction commise par le plaignant ?

Un pompier n’a pas, à l’extérieur de ses fonctions, assujetti, de façon permanente et sans distinction, aux mêmes obligations que lorsqu’il est au travail.

L’arbitre ne partage pas la position patronale consistant à inférer, de la seule preuve d’une condamnation, que la réputation de l’employeur serait affectée et qu’il en découlerait donc illico un lien avec l’emploi. Un tel automatisme, s’il était retenu, reviendrait à annihiler la protection constitutionnelle prévue à l’article 18.2 de la Charte et ce, en faisant totalement fi de « l’analyse contextuelle » requise pour établir le « lien objectif ».

C’est justement ce type d’approche, fondée largement sur des stéréotypes et non sur des faits établis en preuve, que le législateur a écarté en adoptant l’article 18.2 de la Charte. Le lien avec l’emploi requiert plus que des inférences tirées de seules condamnations ou de médiatisation d’un dossier ; il suppose une preuve, des éléments objectifs reliant l’infraction et le poste occupé.

De plus, le travail de pompier en prévention du plaignant ne soulève pas de problème de confiance et qu’il n’y a donc pas lieu d’invoquer, à cet égard, l’existence d’un lien avec l’emploi. Les citoyens qui ne reconnaissent pas le pompier n’ont aucune raison de ne pas avoir confiance en lui, même s’il intervient seul.

Griefs accueillis. Le congédiement et la suspension sans solde sont annulés.

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PARAMÉDICS

Association accréditée et Dessercom inc., 2017 QCTAT 5641
https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2017/2017qctat5641/2017qctat5641.html?resultIndex=1

Le travailleur ambulancier demande au Tribunal de conclure que la dérogation de l’employeur sur la prise des repas soit maintenue.

Les faits sont simples. En effet, la preuve démontre qu’entre les 1er mars et 3 avril 2016, la prise des pauses‑repas pour quatre travailleurs œuvrant sur des quarts de travail de dix et douze heures a été la suivante :

L’employeur précise les informations suivantes :

  • 42 repas ont été pris dans la période médiane de 2 heures;
  • 26 repas n’ont pas été pris durant la période médiane de 2 heures;
  • 4 repas n’ont pas été pris

L’article 171 du Règlement sur la santé et la sécurité du travail prévoit ce qui suit :

171. Période de repas: Lorsque la durée du travail excède 5 heures, au moins 30 minutes d’arrêt doivent être accordées au travailleur pour lui permettre de prendre son repas.

L’employeur argue que cette dérogation ne peut lui être reproché car elle résulte d’obligations contractuelles découlant d’un contrat avec le ministère de la santé et des services sociaux. L’employeur soumet que ses explications sont raisonnables.

Le Tribunal ne peut faire droit à cette prétention.

L’employeur est le responsable de première ligne de la mise en application des dispositions légales le concernant, notamment celles relatives à la santé et sécurité du travail. L’employeur exerce un contrôle sur l’organisation sécuritaire de son entreprise, comme prévu au paragraphe 3 de l’article 51 de la loi.

De plus, les obligations légales priment sur les obligations contractuelles.

Le Tribunal considère qu’il y a eu dérogation à l’article 171 du règlement et que cette dérogation doit être maintenue comme suit :

L’employeur n’accorde pas aux travailleurs paramédics une période de repas d’au moins 30 minutes d’arrêt à l’intérieur d’une plage de 2 heures située dans le milieu de la période de travail des travailleurs.

Le Tribunal tient à formuler un commentaire relativement à l’application de l’article 171 du règlement. Bien qu’il ait été saisi d’une plainte dans le cadre d’un quart de travail de douze heures, il est prévu à cet article qu’après une période de travail d’une durée de cinq heures, un travailleur a droit à une pause-repas de 30 minutes dans la période médiane. Que le quart de travail soit d’une durée de huit, dix ou douze heures, cela ne change rien à l’énoncé de cette disposition.

Contestation accueillie.

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ARTISTES

Cinéplex Divertissement (Cinéma Ste-Foy) c. Lefebvre, 2018 QCCS 145
https://www.canlii.org/fr/qc/qccs/doc/2018/2018qccs145/2018qccs145.html?searchUrlHash=AAAAAQAHYXJ0aXN0ZQAAAAAB&resultIndex=6

Deux entreprises opérant des cinémas demandent l’annulation de certaines parties d’une sentence arbitrale de différend imposant à l’employeur et au syndicat des conditions de travail qu’ils ont été incapables de régler en négociation.

Les demanderesses demandent l’annulation, de l’échelle salariale imposée par l’arbitre de différend, d’une disposition qui traite des congés et absences maladie, de la clause qui détermine la durée de la convention collective et sa rétroactivité, ainsi que, finalement, la conclusion par laquelle l’arbitre se réserve compétence pour compléter sa sentence; le syndicat mis en cause a pris la défense de la sentence arbitrale.

Le Tribunal est d’avis qu’il n’y a pas lieu d’intervenir sauf pour la question des échelles salariales.

Sur la question des échelles salariales se pose un véritable problème en ce sens que si l’arbitre établit le taux  maximal à 13,70 $ l’heure sans expliquer d’où provient ce taux.  L’arbitre ignore la preuve patronale à l’effet qu’il ne serait pas viable pour l’employeur de supporter ce taux horaire.

En arbitrage de grief, l’absence de justification est considérée comme une erreur déraisonnable puisque la conclusion de l’arbitre ne résulte pas d’un raisonnement intelligible.

La question qui reste est si ce raisonnement s’applique en matière d’arbitrage de différends qui n’est pas un exercice d’interprétation d’application d’un texte, que cela soit une loi, un règlement ou un contrat, qu’il soit individuel ou collectif, le tribunal croit néanmoins que oui. Ici, la raisonnabilité de la décision est attaquée sous l’angle de la justification ou de l’intelligibilité du processus décisionnel en tant que moyens distincts pour évaluer le caractère raisonnable ou pas du résultat.

Dans les circonstances, le Tribunal est d’avis que l’arbitre se devait de justifier pourquoi il rejetait la preuve et l’argumentation patronale relative à la non-viabilité d’un taux horaire de 13,70$/heure.

Le défaut de se prononcer sur une question dont un décideur est valablement saisi donne ouverture à une intervention judiciaire sur la base d’une violation à une règle de justice naturelle.

Pourvoi accueilli en partie. Dossier retourné à l’arbitre.

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