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Veille juridique du 6 mars 2018

Général

 Zadorohna c. Ethica Clinical Research Inc., 2018 QCCA 229

https://www.canlii.org/fr/qc/qcca/doc/2018/2018qcca229/2018qcca229.html?autocompleteStr=2018%20QCCA%20229&autocompletePos=1

Dans cet arrêt l’appelante se pourvoit contre un jugement rendu par la Cour supérieure du Québec qui accueille la demande de révision judiciaire de l’intimée et annule la décision prononcée par la Commission des relations du travail (ci-après : «CRT») qui accueillait la plainte de congédiement déposée en vertu de l’article 124 de la Loi sur les normes du travail (LNT).

Selon la Cour d’appel, la juge de première instance s’est livrée à un exercice de réévaluation de la preuve et a substitué sa propre opinion à celle du décideur. La Cour d’appel énonce que ce n’est pas ce genre d’exercice que commande, dans le cadre d’une révision judiciaire, l’application de la norme de la raisonnabilité. En effet, afin de justifier son intervention, la juge de la Cour supérieure précise que la CRT « reconnaît que le rapport du docteur Gauthier semble confirmer que les appréhensions de l’employeur quant à la réintégration de Madame au travail étaient bien fondées». Or, ce rapport médical n’a jamais été déposé au dossier de la CRT qui n’a donc pu en tirer les conclusions que lui prête la juge de première instance sur l’existence de limitations fonctionnelles. De plus, la juge énonce que la CRT « ignore la preuve des documents postérieurs au 14 juin 2012 dans son analyse parce qu’elle considère que cette preuve n’est pas pertinente ». Procédant à sa propre analyse de ces documents, elle conclut que ceux-ci démontrent objectivement que l’intimée n’a pas congédié l’appelante. Outre le fait que la CRT traite spécifiquement des documents postérieurs au 14 juin 2012, aux paragraphes 20 à 26 de sa décision, le juge administratif explique au paragraphe 34 que les rapports médicaux postérieurs ne suffisent pas à justifier la décision de l’intimée de ne pas réintégrer l’appelante. Il n’y avait pas matière ici à ce que la juge substitue son opinion à celle de la CRT.

Appel accueilli.

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R. c. Fournier, 2018 QCCQ 1071

https://www.canlii.org/fr/qc/qccq/doc/2018/2018qccq1071/2018qccq1071.html?autocompleteStr=2018%20QCCQ%201071&autocompletePos=1

Dans cette affaire monsieur Fournier, un entrepreneur, est accusé sous deux chefs d’avoir causé la mort de Gilles Lévesque, son employé. Au premier, on lui reproche de l’avoir causée par négligence criminelle en ne prenant pas les mesures nécessaires alors qu’il dirigeait l’accomplissement ou l’exécution d’un travail ou d’une tâche, afin d’éviter qu’il n’en résulte des blessures pour autrui. Le second chef lui reproche d’avoir causé le décès de M. Lévesque en commettant un homicide involontaire coupable.

Les faits de l’affaire sont les suivants : Sylvain Fournier est entrepreneur en excavation. Au terme d’un contrat, l’entreprise de monsieur Fournier doit changer un tuyau égout à partir de la valve jusqu’au tuyau égout de la rue. Gilles Lévesque travaille sur le projet. Afin de réaliser le travail, il fallait creuser une tranchée. Les règles de sécurité sont strictes pour ce genre de travaux. Selon le juge Dupras, Sylvain Fournier n’a pas respecté ces règles et c’est ce qui a causé un éboulement blessant monsieur Fournier et tuant monsieur Lévesques.

En effet, le juge Dupras énonce que suivant la preuve administrée, la conduite de l’accusé constitue un constitue un acte illégal, une contravention claire aux obligations édictées à l’article 3.15.3 du Code de sécurité pour les travaux de construction, en ce que l’accusé, employeur de M. Lévesque, ne s’est pas assuré que les parois de la tranchée en cause, soient étançonnées solidement avec les matériaux requis suivant les exigences cristallisées au premier paragraphe du texte. De plus, cet acte illégal a, sans contredit, causé la mort de monsieur Lévesque. Le Tribunal conclut par ailleurs que la conduite de l’accusé représente un écart marqué par rapport à la conduite d’une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances. D’ailleurs, la preuve révèle que plusieurs observateurs de la scène ont exprimé des inquiétudes au sujet de la configuration de la fosse et au fait qu’on a dû y descendre sans étançonnement. Le Tribunal estime que tout converge vers cette conclusion inéluctable, c’est-à-dire qu’une personne raisonnable dans les mêmes circonstances aurait prévu le risque de lésion corporelle.

Le tribunal déclare donc coupable monsieur Fournier d’homicide involontaire. Il s’agit de la première fois que l’un entrepreneur est coupable d’homicide involontaire pour une négligence qui a coûté la vie d’un travailleur.

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Procureure générale du Québec c. St-Arnaud, 2018 QCCS 537

https://www.canlii.org/fr/qc/qccs/doc/2018/2018qccs537/2018qccs537.html?resultIndex=1

Le ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (ci-après : « l’employeur ») demande un pourvoi en contrôle judiciaire d’une sentence arbitrale qui substitue une sanction de deux mois au congédiement d’un inspecteur rattaché au Centre de contrôle environnemental du Québec (ci-après : « le salarié »).

En résumé, l’employeur justifie ce congédiement par la participation du salarié à une entrevue aux fins d’un reportage télévisé au cours duquel, à visage couvert, il fait des « déclarations fracassantes » concernant certains aspects de la gestion des inspections au sein du Ministère. Plus spécifiquement, le salarié commente la baisse des effectifs assignés aux inspections et ses conséquences sur la protection de l’environnement, ainsi qu’un programme instauré par le Ministère suivant lequel des visites effectuées auprès de justiciables durant la période estivale par des étudiants sont comptabilisées à titre d’« inspections » dans les données annuelles, au même titre que les inspections effectuées en bonne et due forme par les inspecteurs à l’emploi du Ministère. En plus de reprocher au salarié de les avoir tenus publiquement sans son autorisation, le Ministère considère que ces propos sont faux.

L’employeur soutient d’abord que la sentence arbitrale est déraisonnable parce que l’arbitre n’a pas appliqué adéquatement le cadre juridique entourant la divulgation d’informations et l’obligation de loyauté. L’employeur ne conteste pas qu’à la base l’arbitre a compris l’état du droit sur la question et l’existence des cinq éléments suivants à considérer aux fins d’analyser si une divulgation publique d’un salarié contrevient à son obligation de loyauté :

  • avoir épuisé les recours internes;
  • être de bonne foi, ne pas être motivé par un esprit de vengeance;
  • divulgué seulement ce qui est d’intérêt public;
  • s’assurer que l’information rendue publique est véridique;
  • s’assurer que l’ampleur de l’intervention publique n’est pas disproportionnée avec l’objectif poursuivi.

Toutefois, l’employeur propose que l’arbitre n’a pas adéquatement appliqué ce « cadre juridique » parce qu’il n’a pas analysé le caractère véridique ou mensonger des propos du Salarié en l’espèce. Le tribunal rejette cet argument. Bien que l’arbitre n’a pas expressément qualifié les propos du salarié de « vrais » ou de « faux », il conclut que la preuve reflétait globalement les divergences de perceptions existant entre le Ministère et le syndicat concernant la gestion des inspections.

Par la suite, selon l’employeur, la décision de l’Arbitre de substituer une suspension de deux mois au congédiement est aussi déraisonnable parce qu’il a erronément considéré pour ce faire, à titre de facteurs atténuants :

  • l’ancienneté du salarié, soit 23 ans;
  • les regrets exprimés par le salarié lors de l’instruction du grief, donc trop tardivement;
  • l’existence du projet de loi no 87 lors du congédiement, alors que ce projet de loi, qui visait à faciliter la divulgation d’actes répréhensibles par des employés à l’égard d’organismes publics, n’était pas en vigueur.

Le Tribunal énonce qu’il ne peut tout simplement pas suivre le raisonnement des demandeurs et conclut que ces facteurs pouvaient être considérés par l’arbitre comme atténuants.

Pourvoi en contrôle judiciaire rejeté.

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Navion et Ivcom inc., 2018 QCTAT 688 *

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2018/2018qctat688/2018qctat688.html?resultIndex=1

La salariée est embauchée comme secrétaire‑réceptionniste par Ivcom inc. (ci-après : « l’employeur»). À la suite d’actes de harcèlement psychologique à caractère sexuel posés à son égard par son supérieur, elle s’absente du travail pour des motifs liés à sa santé. Dans cette foulée, son emploi se termine abruptement à la fin juillet 2015. S’appuyant sur la Loi sur les normes du travail (ci-après : «L.N.T.»), elle dépose une plainte de harcèlement psychologique. Elle prétend aussi avoir fait l’objet d’un congédiement illégal lié à son absence pour maladie. Du même coup, elle prétend que son congédiement serait fait sans cause juste et suffisante. L’employeur soutient que les agissements du présumé harceleur, son président, unique actionnaire et supérieur hiérarchique de la demanderesse, ne constituent pas des manifestations de harcèlement psychologique. Les deux personnes ont eu des relations sexuelles consentantes, ce qui n’est pas réprimé par la Loi.

Les questions en litige sont les suivantes :

  • La demanderesse a-t-elle été victime de harcèlement psychologique? Si oui, a‑t‑elle droit à une ou des indemnités et de quelles natures?
  • La demanderesse a-t-elle été congédiée ou s’agit-il d’une démission? En cas de congédiement, est-il motivé par une cause juste et suffisante? Sinon, quelles mesures de réparation sont appropriées?

Le tribunal conclut que madame a été victime de harcèlement psychologique et qu’il s’agit d’une seule conduite puisque les paroles et gestes se produisent coup sur coup, la même journée et dans un court laps de temps. À l’été 2015, le supérieur de la demanderesse associe la reprise d’activités sexuelles entre eux à une possible augmentation salariale ou une promotion. Il lui prend les fesses sans ambages, sur les lieux mêmes du travail. Pourtant, elle vient de lui dire qu’elle n’a jamais été intéressée et le repousse. Il s’agit là de paroles et geste dégradants et d’un affront à la dignité de la demanderesse qui s’est sentie honteuse et a eu peur pour son emploi. Selon le tribunal, Le fait que ces deux individus aient eu des relations sexuelles, consentantes ou pas, de 2012 à 2013, n’y change rien. Les actes de monsieur Bilic ne se situent pas dans le cadre d’une relation personnelle intime puisque celle-ci a pris fin deux ans auparavant. Le tribunal conclut que la conduite est vexatoire, grave, qu’elle porte atteinte à la dignité de la travailleuse et qu’elle produit un effet nocif continu.

De plus, le tribunal conclut que l’employeur n’a pas pris les moyens nécessaires pour prévenir ou faire cesser le harcèlement, puisque c’est l’âme dirigeante de celui-ci qui pose les gestes répréhensibles. Le tribunal accorde 5000$ de dommages moraux et 5000$ de dommages punitifs à la salariée.

Sur la deuxième question en litige, le tribunal conclut que la salariée a été congédiée pour s’être absentée pour des motifs reliés à sa santé, soit un droit prévu à l’article 79.1 L.N.T. Le congédiement est donc illégal en vertu de l’article 122 L.N.T. et doit être annulé. La plainte fondée sur l’article 124 L.N.T. doit aussi être accueillie : un congédiement illégal ne peut être fait avec une cause juste et suffisante, d’autant plus que l’employeur n’invoque aucun motif l’expliquant.

Sur les mesures de réparation, le tribunal indique que lorsqu’une plainte fondée sur les articles 122 L.N.T. et 124 L.N.T. est accueillie la réintégration est la mesure de réparation qui s’impose. Or, dans la présente affaire, la demanderesse réclame une indemnité. Le tribunal énonce que cette affaire est l’illustration parfaite d’une impossibilité de réintégration, et ainsi, il fait droit à la réclamation de la demanderesse.

Plaintes accueillies.

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Gougeon et Maçonnerie Marcel Laflamme, 2018 QCTAT 201

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2018/2018qctat201/2018qctat201.html?resultIndex=1

Les faits sont les suivants : en 2012, le travailleur s’est blessé à l’épaule gauche en manipulant une palette de briques. La Commission (la CSST; la CNESST depuis le 1er janvier 2016) a accepté sa réclamation pour un accident lui ayant causé une entorse à l’épaule gauche. En 2015, elle a demandé un avis du BEM portant sur la consolidation, les soins et traitements, l’atteinte permanente ainsi que les limitations fonctionnelles en fonction de ce diagnostic. Le travailleur demande au Tribunal de déclarer que l’avis du BEM est irrégulier et de retourner le dossier à la Commission afin qu’un nouvel avis soit demandé. Le Tribunal ne se prononce que sur ce moyen préalable.

Le travailleur soutient que l’avis du BEM est irrégulier parce que ce dernier ne s’est prononcé que sur le diagnostic d’entorse de l’épaule gauche alors que plusieurs autres diagnostics étaient posés. Sur cette question, la Commission soutient que tous les diagnostics se rapportant à l’épaule gauche sont apparentés et qu’ils ont été pris en considération dans l’avis du BEM. Or, les diagnostics posés visent des structures différentes de l’épaule. La Commission avait le pouvoir de demander au BEM son avis sur l’ensemble des diagnostics, mais elle a choisi de ne pas le faire et a demandé un avis sur un diagnostic qui n’a jamais été posé par le médecin qui a charge, soit celui d’entorse à l’épaule gauche. On ne peut inférer aucune conclusion de l’avis du BEM en ce qui a trait aux diagnostics visant les tendons, le cartilage ou le fibrocartilage. La procédure d’évaluation médicale suivie et l’avis qui en a résulté sont irréguliers.

La Commission a exécuté son obligation de donner la possibilité au médecin qui a charge du travailleur de commenter le rapport de son médecin désigné lorsqu’elle a envoyé le rapport à remplir au médecin qui avait pris charge du travailleur à compter du mois d’avril 2013. Ce médecin était toujours en poste à ce moment. Cependant, le rapport complémentaire a été rempli après qu’il fut parti à la retraite, par un autre médecin qui n’a jamais vu, examiné ou suivi le travailleur. Dans ces circonstances, ce médecin ne peut être considéré comme le médecin qui a charge du travailleur.

Le tribunal conclut qu’à compter du moment où la CSST a décidé de diriger le dossier au BEM alors qu’elle avait déjà entamé la procédure d’évaluation médicale relativement au diagnostic et qu’un litige subsistait à cet égard, elle ne pouvait choisir le diagnostic à soumettre à l’attention du BEM pour les autres sujets de l’article 212 LATMP, d’autant moins que ce diagnostic n’avait jamais été posé par le médecin qui a charge; cela entache la régularité de la procédure d’évaluation médicale ainsi que de l’avis du BEM.

Le tribunal déclare donc irrégulière la procédure d’évaluation médicale ayant mené à l’avis du Bureau d’évaluation médicale.

Moyen préliminaire accueilli.

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Policiers

Fraternité des policiers et policières de Montréal c. Ville de Montréal, 2018 QCCA 216

https://www.canlii.org/fr/qc/qcca/doc/2018/2018qcca216/2018qcca216.html?autocompleteStr=2018%20QCCA%20216&autocompletePos=1

La Fraternité demande la permission d’appeler d’un jugement rendu par la Cour supérieure qui accueille un pourvoi en contrôle judiciaire, annule une sentence arbitrale et rejette le grief de la Fraternité déposé pour un policier de la Ville.

Le contexte de l’affaire est le suivant: l’arbitre a décidé qu’un policier convoqué par son syndicat afin de témoigner devant la Commission des relations du travail à l’occasion d’un litige opposant ce dernier à l’employeur effectuait un «travail à la cour» au sens de la convention collective et que, par conséquent, il avait droit à la rémunération prévue à celle-ci pour les heures supplémentaires effectuées. La Cour supérieure a infirmé cette décision, estimant qu’elle était déraisonnable. La Fraternité demande donc la permission d’en appeler.

La Cour d’appel n’accorde pas la permission.

Requête rejetée.

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L’Association des policiers et policières de Sherbrooke c. Ville de Sherbrooke, 23 février 2018, Joëlle l’heureux.

Sur demande seulement.

L’arbitre est saisie d’un grief syndical et collectif pour atteinte à la réputation de l’Association, et atteinte à la réputation et à la dignité des représentants syndicaux et des membres de l’Association. Le syndicat invoque que le capitaine Lebrun a intentionnellement rédigé un affidavit de façon à dépeindre le syndicat et les représentants syndicaux comme des gens qui faisaient de l’entrave à l’enquête sur l’intimidation, pour obtenir à tout prix les ordonnances de communication et pour se rendre à R. Subsidiairement, le syndicat plaide aussi que l’absence de pertinence des allégations les rend diffamatoires et fautives. Le syndicat invoque que l’utilisation de l’affidavit du dossier sur l’intimidation dans le dossier de possession de drogue dans le but d’en faire le trafic était fautive, tout comme l’est le paragraphe 106, qui constitue du libelle diffamatoire envers l’ensemble des membres de l’Association.

L’arbitre débute son analyse en mentionnant que les deux parties n’appliquent pas les mêmes règles de droit pour définir la faute. Le syndicat considère que la faute découle de la rédaction de l’affidavit qui contrevient aux critères établis dans Morelli c. R., et que cette rédaction fautive entraîne la responsabilité de l’affiant en cas de préjudice subi. L’employeur plaide que la faute, en matière d’atteinte à la réputation, doit correspondre aux critères établis dans Prud’homme c. Prud’homme, et que la diffusion des propos diffamatoires est essentielle à la faute. Dans la foulée de ces questions, le tribunal devra aussi déterminer si le capitaine Lebrun était responsable de la diffusion du contenu de l’affidavit.

Selon l’arbitre, l’arrêt Morelli fournit des normes de rédaction d’un affidavit, non pas pour établir si des propos sont diffamatoires, mais pour s’assurer de la validité d’un mandat de perquisition, pour prévenir les fouilles ou saisies abusives et éventuellement exclure une preuve obtenue illégalement. Sans dire que ces affaires ne sont d’aucune pertinence, le tribunal ne retient pas que le cadre juridique en vertu duquel ce grief doit être analysé est celui défini dans les affaires Morelli, Araujo et Telus. Les critères en matière de libelle diffamatoire sont bien établis et s’appliquent, comme le souligne la jurisprudence, en tenant compte du contexte et des circonstances. Les règles de rédaction d’un affidavit serviront par ailleurs de référence pour évaluer la conduite d’un enquêteur raisonnable placé dans les mêmes circonstances. Selon l’arbitre, il faut plutôt suivre les règles établies dans l’arrêt Prud’homme c. Prud’homme de la Cour suprême, qui est un arrêt de référence.

L’arbitre doit donc déterminer si le capitaine Lebrun a intentionnellement, rédigé l’affidavit de façon à dépeindre le syndicat et les représentants syndicaux comme des gens qui faisaient de l’entrave à l’enquête sur l’intimidation, pour obtenir à tout prix les ordonnances de communication et pour se rendre à R ? Dans la négative, l’arbitre doit déterminer si les affirmations sont fausses, tendancieuses et non pertinentes ?

Dans une longue analyse des faits, l’arbitre ne retient pas la prétention du syndicat. L’arbitre conclut entre autres qu’il était raisonnable de la part de l’affiant de communiquer au juge autorisateur l’état des relations entre l’employeur et le syndicat, du climat au SPS, et les différents événements survenus et rapportés à l’affidavit. Les paragraphes 1 à 68 visent à expliquer au juge autorisateur pourquoi l’affiant en arrive à son constat du paragraphe 69. L’arbitre énonce qu’elle n’a pas de preuve pour adhérer à la thèse du syndicat que lesdites allégations ne visaient qu’à le discréditer. Il s’agit après tout, selon l’arbitre, de la vérité, et de faits survenus dans un contexte qui s’avère pertinent à la demande d’ordonnance de l’affiant. L’arbitre ajoute également que l’analyse de la pertinence n’est pas une science exacte. Une simple divergence d’opinion sur l’utilité relative d’un allégué par ailleurs vrai ne permet pas de conclure à la présence de propos diffamatoires fautifs. L’analyse de la pertinence ne doit pas non plus se faire a posteriori.

L’arbitre conclut donc que l’affiant n’a pas commis de faute en lien avec la levée des scellés. Il ne peut donc être tenu responsable de la diffusion publique du contenu de l’affidavit ou des dommages qui en découleraient, pas plus à l’époque qu’il ne le serait aujourd’hui si les médias reprenaient l’affaire.

Grief rejeté.

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Commissaire à la déontologie policière c. Alfred, 2018 QCCDP 8

https://www.canlii.org/fr/qc/qccdp/doc/2018/2018qccdp8/2018qccdp8.pdf

Le Comité se prononce sur la sanction à imposer à un policier dont la conduite a été jugée dérogatoire, car il a omis de donner les droits constitutionnels à madame Isabel Matton, plaignante, conformément à l’article 10 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Selon le comité la gravité de l’inconduite commise par l’agent se caractérise par le fait qu’il a omis d’informer madame Matton d’un droit fondamental garanti par la Charte canadienne des droits et libertés, à savoir son droit de consulter un avocat.

Le Comité considère les facteurs suivants : au moment des événements, l’agent avait 15 années d’ancienneté comme agent et il agissait en fonction supérieure de sergent. Dans la jurisprudence déposée par les parties, les sanctions imposées par le Comité se situent entre l’avertissement et la suspension sans traitement de un jour ouvrable. Le policier n’a aucune inscription à son dossier déontologique.

Le comité impose donc une suspension sans traitement d’un jour ouvrable.

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Commissaire à la déontologie policière c. Simard, 2018 QCCDP 9 (CanLII)

https://www.canlii.org/fr/qc/qccdp/doc/2018/2018qccdp9/2018qccdp9.html?searchUrlHash=AAAAAQAMwqtwb2xpY2llcsK7AAAAAAE&resultIndex=15

Dans le présent dossier, le Comité se prononce sur la sanction à imposer à un agent qui n’a pas utilisé son fusil à irritant chimique avec prudence et discernement au cours d’une manifestation devant l’Assemblée nationale. Le Comité en est venu à la conclusion que l’utilisation d’un fusil à irritant chimique (Muzzle Blast) n’était pas sans danger et que l’agent avait fait preuve d’imprudence et d’un manque de discernement en n’utilisant pas son fusil à irritant chimique conformément à l’enseignement reçu.

Le Comité retient les facteurs aggravants et atténuants suivants : le Comité retient à titre de facteur aggravant que Mme Tremblay-Trudeau a subi des blessures légères au niveau de la bouche. Le Comité tient compte également que le contexte dans lequel l’inconduite a été commise était celui d’une manifestation au cours de laquelle des manifestants ont soudainement décidé de charger la ligne des policiers défendue par le peloton Bravo, dont faisait partie l’agent.

L’agent plaide également comme facteurs atténuants qu’il y a eu une extrême médiatisation de l’événement et qu’il a reçu des menaces sur les réseaux sociaux. Le Comité énonce qu’il est vrai qu’il y a eu médiatisation, mais le Comité n’a pas eu la démonstration qu’elle était « hors du commun », du moins de la part des médias dits traditionnels. Par contre, en ce qui concerne les réseaux sociaux, il y a eu des excès, pour ne pas dire des dérapages sérieux, ce que le Comité considère.

Le Comité impose la sanction suivante : une suspension sans traitement de deux jours ouvrables de huit heures par jour.

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Fraternité des policiers de Saint-Eustache c Saint-Eustache (Ville), 2018 CanLII 7413 (QC SAT)

https://www.canlii.org/fr/qc/qcsat/doc/2018/2018canlii7413/2018canlii7413.html?searchUrlHash=AAAAAQAMwqtwb2xpY2llcsK7AAAAAAE&resultIndex=24

Cette décision porte sur une objection survenue en cours d’audience quant à la recevabilité de dossiers médicaux transmis au Tribunal, sous-scellés, et que l’employeur veut mettre en preuve dans le cadre d’un litige concernant les restrictions médicales invoquées par le plaignant.

Le contexte de l’affaire est le suivant : M. Avakian est policier pour la Ville de Saint-Eustache depuis le mois de juillet 1990. À toute période pertinente au litige, il exerce la fonction de sergent-détective. Au cours du mois d’août 2015, son médecin lui prescrit un arrêt de travail pour des raisons médicales. Cette absence persiste jusqu’en avril 2016, alors que son médecin prescrit un retour au travail, mais l’assortit de la restriction suivante : ne pas faire d’heures durant le quart de nuit. Le médecin expert qui examine M. Avakian à la requête de l’employeur ne partage pas l’opinion du médecin traitant quant à la nécessité qu’une telle restriction soit maintenue. Dans le contexte d’un arbitrage médical, un troisième médecin constate qu’il existe peut-être un problème d’apnée du sommeil qui, selon lui, présente un risque potentiel suffisamment grand pour que la limitation interdisant le travail de nuit soit maintenue jusqu’à ce qu’une investigation soit faite à ce sujet.

Le litige dont dispose la présente décision est survenu en cours d’audience. En prévision de la première séance, le procureur de l’employeur requiert du Tribunal l’autorisation d’assigner trois médecins. Il transmet donc trois citations à comparaître. L’une est adressée au médecin traitant de M. Avakian, les deux autres à des médecins de la clinique du sommeil où ont été faits les tests et produit le rapport que le plaignant refuse de donner à l’employeur. Les citations somment deux des médecins d’apporter l’original du dossier médical complet du plaignant en 2017. La citation somme le médecin traitant d’apporter le dossier médical complet depuis le 27 août 2015 jusqu’en date du 5 mai 2017.  Le syndicat s’oppose à l’audience à ce qu’ils soient admis en preuve. Outre le procédé qu’il trouve irrégulier, le Fraternité plaide que les informations médicales en question ne sont pas pertinentes au litige. Il ne doit pas être permis de remettre en question les résultats de l’arbitrage médical du 12 janvier 2017. Les conclusions du médecin arbitre lient les parties.

L’arbitre énonce que la position syndicale est retenue relativement à la pertinence de certains des documents en litige. La demande formulée au médecin plaignant est démesurée dans le temps. Le dépôt du dossier complet à compter du 25 août 2015 jusqu’au 5 mai 2017 dépasse largement ce qui est requis pour établir les faits pertinents au litige. Toute question relativement à la condition de M. Avakian avant le mois de janvier 2017 doit être tenue pour suspecte puisqu’un arbitrage médical a tiré des conclusions qui lient les parties. Cependant, en ce qui concerne cependant la condition du plaignant par la suite, elle est au centre du différend entre les parties. Les problèmes appréhendés d’apnée du sommeil et toute pathologie y associée invoqués pour l’accommodement dont profitait toujours le plaignant de janvier à mai 2017 sont pertinents. L’arbitre énonce qu’il va sans dire que toute question qui pourrait être posée à un médecin au cours de son témoignage à l’audience et tout document qu’il pourrait être invité à produire seront admissibles dans la seule mesure où ils sont en relation avec la limitation de travail de nuit dont M. Azakian a joui jusqu’à ce qu’elle prenne fin.

Objection accueillie en partie.

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Martine Lelièvre c. Sécurité-policiers Ville de Montréal, Tribunal administratif du travail, 19 février 2018.

Sur demande seulement.

Dans cette affaire le tribunal doit déterminer si la travailleuse a subi une récidive, rechute ou aggravation en date du 20 avril 2016. La travailleuse soutient qu’il y a une détérioration importante de sa condition psychologique lors d’une tentative de retour en emploi.

L’évènement d’origine est le suivant : madame Lelièvre est appelée à intervenir dans le cadre d’une bagarre faisant rage au sein d’une fête clandestine à Montréal-Nord. Au cours de l’altercation, elle se retrouve projetée sur un pilier de béton et se fracasse la tête. La travailleuse a craint grandement pour sa vie. Suite à cet évènement, elle a été diagnostiquée avec un état de stress post-traumatique qui a été consolidé avec un déficit anatomophysiologique et de limitations fonctionnelles.

Madame Lelièvre a tenté un retour au travail dans un poste de conseillère. Le retour au travail s’avère catastrophique. Elle se sent de nouveau comme vulnérable, craint continuellement une attaque, présente des soubresauts, ne parvient plus à avoir une pensée structurée, est encore plus irritable et recommence à faire des cauchemars exigeant l’augmentation de la médication visant à dormir.

De la preuve, la juge est d’opinion que la reprise abrupte du travail dans un milieu empreint d’éléments stresseurs pour madame Lelièvre, à la suite de son agression, constitue l’élément déclencheur évident de la recrudescence des symptômes anxiogènes et du déséquilibre psychologique qui en découle.

Contestation accueillie.

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Pompiers

Association des pompiers de Montréal inc. c. Ville de Montréal, 2018 CanLii 7412

https://www.canlii.org/fr/qc/qcsat/doc/2018/2018canlii7412/2018canlii7412.html?searchUrlHash=AAAAAQAMwqtwb2xpY2llcsK7AAAAAAE&resultIndex=11

La convention collective qui lie l’Association et la Ville comporte la mention suivante :

« Dans l’éventualité où une loi, un règlement ou une règle administrative en découlant diminuerait les avantages dont bénéficient les employés pompiers en vertu de ce régime de retraite, une évaluation actuarielle sera effectuée afin de déterminer la valeur de telle diminution et, de là, des réaménagements des bénéfices et/ou véhicules autres que le régime de retraite seront déterminés. Tout réaménagement sera décidé conjointement avec l’Association ».

Le 5 décembre 2014, l’Assemblée nationale adopte la Loi favorisant la santé financière et la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal (ci-après : « la Loi 15 »).  L’une des conséquences qui découlent de la mise en vigueur de cette loi est une augmentation des cotisations payables par les pompiers à titre de contribution à leur régime de retraite. Le syndicat soutient qu’il s’agit là d’une « diminution des avantages dont [ils] bénéficient ». Par son grief, il demande qu’il soit ordonné aux parties de procéder, en conséquence, à déterminer les réaménagements des bénéfices de la convention collective ou autrement.

L’un des principaux changements qu’impose la Loi 15 est, dans le cas des pompiers, de limiter à 20% la « cotisation d’exercice ».   Cette cotisation d’exercice s’établissait, au 31 décembre 2013, à 23,8 % de la masse salariale des participants actifs, en incluant les personnes en invalidité. Cette diminution du niveau de financement du Régime devait nécessairement entraîner la coupure ou la réduction de certains des bénéfices. Les parties, pour satisfaire au plafond de contributions imposé par la Loi, conviennent de plusieurs mesures importantes, dont un report de l’âge normal de la retraite et une réduction du taux d’indexation des prestations viagères, pour ne mentionner que celles-là. La valeur totale de ces réductions de bénéfices représente environ 3,8% de la masse salariale des participants actifs. En mai 2017, les parties s’entendent pour reconnaître que ces modifications représentent une diminution des « avantages » qu’offrait le Régime, laquelle diminution doit être compensée comme le prévoit l’article 40.02. Les parties conviennent également que la contribution moyenne des pompiers au financement du Régime était de 6,40% au 31 décembre 2013. Elle est maintenant de 10,70%, sans compter leur part de cotisation au fonds de stabilisation qui elle représente 1,05% de leur salaire.

Le syndicat soutient que cette augmentation de la contribution des pompiers constitue une « diminution [d’] avantages dont [ils] bénéficient » et qu’elle devrait être compensée tel que le prévoit la convention collective. La Ville conteste cette interprétation du syndicat et soutient subsidiairement qu’une partie de cette augmentation découle non pas de la Loi 15 mais des changements démographiques normaux tels qu’évalués et quantifiés par des études actuarielles. L’employeur prétend en outre que la portion de la cotisation des participants qui est dévolue au fonds de stabilisation constitue un avantage additionnel qui n’appelle conséquemment pas de compensation.

Selon l’arbitre, l’augmentation de la contribution des pompiers et la diminution corollaire de la part de la Ville au financement du Régime ne sont pas une matière visée par la disposition invoquée au soutien du grief, bien qu’elle puisse constituer une diminution d’avantages au sens de la convention collective elle-même. Cela étant, il appartiendra aux parties de décider lors du renouvellement de la convention collective, le cas échéant, si, dans quelle mesure et de quelle manière les salariés obtiendront une compensation pour cette perte d’avantages.

Grief rejeté.

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Paramédics

Rien à signaler.


Artistes

 

Rien à signaler.