La sentence arbitrale Fraternité des policiers et policières de la Ville de Québec et Ville de Québec, 27 mai 2024, arbitre Me Éric-Jan Zubrzycki, T.A., 2024 CanLII 47282 donne gain de cause à la présidente de la Fraternité des policiers et policières de la Ville de Québec, Mme Martine Fortier, contre l’employeur. Cette affaire s’inscrit en parallèle d’autres litiges qui ont fait couler de l’encre, impliquant les mêmes protagonistes.
Dans les faits, Mme Martine Fortier avait déposé une plainte de harcèlement psychologique à l’encontre de quatre représentants de l’employeur avec lesquels elle avait des échanges régulièrement. L’employeur confie l’enquête à une firme externe qui se déroule en deux temps. Le premier constat des enquêteurs est que la plainte n’est pas recevable. Puis, le 25 novembre 2022, l’enquête se poursuit afin de statuer sur la bonne ou mauvaise foi de la Plaignante. Le rapport final du 31 mai 2023 conclut que Mme Fortier aurait eu une conduite insouciante et négligente s’apparentant à une démarche de mauvaise foi. Un mois plus tard, l’employeur transmet un avis de soumission du dossier aux autorités supérieures et Mme Fortier est convoquée devant le comité disciplinaire. La Fraternité dépose le grief qui fait l’objet de la présente sentence au motif que l’avis n’a pas été transmis dans le délai de rigueur de trente jours de la connaissance des faits. La Fraternité demande au Tribunal de déclarer illégal le processus disciplinaire et d’ordonner le versement de dommages.
Le Tribunal d’arbitrage retient la prétention syndicale selon laquelle le délai commençait à courir dès le 25 novembre 2022, date à laquelle l’employeur a confié le mandat à la firme externe de poursuivre son enquête. À cette date, l’employeur avait en sa possession tous les faits susceptibles d’être l’objet d’une enquête. Pour conclure en ce sens, en présence d’un texte ambigu, le Tribunal s’est livré à un exercice d’interprétation de l’article 27.01 de la convention collective qui fait référence au terme « autorités supérieures », notamment.
Dans le cadre de son interprétation, l’arbitre fait la lumière sur l’intention des parties : le constable doit être avisé dès qu’il est susceptible de faire l’objet d’une enquête disciplinaire et lui donner les moyens de se préparer afin qu’il ait droit à une défense pleine et entière. Ce faisant, l’arbitre considère que les « autorités supérieures » sont celles qui peuvent ordonner directement ou indirectement une enquête puisque la transmission de la « connaissance des faits » à ces autorités doit permettre, le cas échéant, l’instauration d’une enquête disciplinaire, puis, éventuellement, une sanction disciplinaire. Bien que généralement ces autorités fassent partie du service de police en soi, elles ne s’y limitent pas nécessairement.
Le processus disciplinaire étant nul, toute mesure disciplinaire éventuelle l’est également.
Le grief est accueilli et le Tribunal ordonne à l’employeur de verser 1 000$ à titre de dommages moraux à Mme Martine Fortier.
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