Dans la décision Syndicat des professeurs et professeures de l’Université du Québec à Trois-Rivières et Université du Québec à Trois-Rivières (S.L. et autres), 2025 QCTA 277, (a. Me Maureen Flynn), de façon successive les trois plaignantes, professeures à l’UQTR, sont visées par des plaintes de harcèlement et de discrimination de la part d’une étudiante.
À l’issue d’une longue enquête sur les trois plaintes (juin 2021 à novembre 2022), l’enquêtrice externe conclut que les trois plaintes sont non fondées, mais qu’un conflit est né entre l’étudiante et les trois professeures.
Face à l’ampleur de la tâche et le manque de soutien de la part de leur employeur au cours du processus d’enquête, au nom des trois plaignantes, le syndicat réclame un dédommagement pour la surcharge de travail que l’enquête a générée. Le syndicat prétend aussi que l’employeur a abandonné ses salariées dans une situation significativement stressante et encombrante et devrait en conséquence leur verser des dommages moraux.
De son côté, l’université se défend du fait de ne pas avoir pu intervenir auprès de l’enquêtrice externe par souci d’impartialité. Elle affirme que l’enquête a été menée selon les règles de l’art et qu’en l’absence de faute, elle ne peut être tenue de verser une compensation. Elle avance aussi que les troubles et inconvénients subis par les plaignantes découlent directement d’un processus d’enquête de harcèlement psychologique ne pouvant générer de responsabilité par son propre fait.
Les parties reconnaissent que les plaignantes doivent collaborer à toute enquête menée dans le cadre d’une plainte de harcèlement psychologique ou de discrimination, cette obligation découlant du devoir de loyauté prévu à l’article 2088 du Code civil du Québec.
En l’espèce, il n’est pas contesté que les trois professeures ont collaboré avec diligence et discrétion au processus d’enquête.
Le Tribunal souligne que la participation d’un enseignant à un processus d’enquête en harcèlement psychologique découle des obligations inhérentes au contrat d’emploi qui le lie à l’Employeur, bien que la collaboration attendue d’un enseignant à une enquête menée selon la Politique en harcèlement psychologique ne relève pas des tâches paramétrées et définies à la convention collective.
Le Tribunal estime que les plaintes déposées contre deux enseignantes sont manifestement excessives, notamment en raison du nombre élevé d’allégations. Même si un enquêteur peut choisir de mener une enquête approfondie, l’employeur, une fois informé, ne peut à la fois approuver cette approche et exiger la pleine collaboration des employés concernés, sachant que cela entraînera une surcharge de travail. En conséquence, l’université doit indemniser les deux enseignantes.
De plus, l’université est tenue de leur verser des dommages moraux, car elle n’a pas agi pour atténuer cette surcharge, malgré les avertissements reçus en temps opportun, ce qui a eu un impact particulièrement négatif sur elles.
L’employeur doit verser une compensation financière à deux des plaignantes, dont le montant sera déterminé à la hauteur de la charge de travail supplémentaire. Le Tribunal leur accorde également des dommages moraux causé par l’inaction de l’Employeur, dans les circonstances.
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