Dans la décision Syndicat des travailleuses et travailleurs du Comfort Inn Dorval – CSN section réception et 883455 Canada inc. (Comfort Inn Aéroport Dorval), 2024 QCTA 459 (Me Maureen Flynn, arbitre), le Syndicat conteste le congédiement imposé à une préposée à la réception travaillant pour l’employeur, pour avoir bloqué des chambres non réservées dans le système informatique de l’hôtel sans autorisation.
En effet, le Syndicat ne nie pas que la travailleuse a enregistré des réservations fictives dans le système de réservation de l’hôtel, mais il estime que l’employeur aurait dû tenir compte du contexte particulier au moment des faits. En l’espèce, au cours de la période concernée, plusieurs chambres de l’hôtel étaient infestées par des coquerelles ou des souris. Ainsi, lorsqu’informée par des clients de cette problématique, la plaignante a unilatéralement décidé de retirer lesdites chambres du système de réservation.
Le Tribunal rappelle que, pour déterminer si une mesure disciplinaire est justifiée, il doit d’abord établir si le comportement reproché à l’employé est prouvé selon les règles de preuve applicables, il doit évaluer si la conduite reprochée mérite une sanction disciplinaire et finalement, si la mesure choisie est juste et équitable en tenant compte de toutes les circonstances propres à l’affaire.
En l’espèce, la plaignante communique à de nombreuses reprises avec la directrice de l’hôtel pour l’informer de la situation en cours. Devant l’inertie de la direction, la plaignante, ainsi que deux de ses collègues, également préposées à la réception prennent l’initiative de bloquer des chambres qu’elles savaient infestées dans le système de réservation afin de ne pas les offrir en location en raison des problématiques d’infestation. La travailleuse admet ne pas se souvenir si elle avait avisé la direction de l’hôtel de l’initiative qu’elle a pris.
En somme, le Tribunal considère que la mesure choisie est disproportionnée et injuste au regard de la faute puisque l’employeur n’a pas fait la preuve d’une insubordination qui méritait une fin d’emploi. En effet, bien que la plaignante aurait dû aviser l’employeur de son initiative de bloquer les chambres infestées dans le système, cette omission n’apparaît pas grave au vu des circonstances et des attributions habituelles de la fonction d’une préposée à la réception. De plus, toute personne raisonnable ne peut que constater que la plaignante a pris cette initiative afin de protéger la réputation de l’entreprise. Enfin, la preuve démontre que les chambres bloquées étaient vraisemblablement infestées.
Le Tribunal conclut que la mesure choisie par l’employeur est manifestement disproportionnée. En effet, celui-ci a omis de tenir compte de toutes les circonstances propres à l’affaire et de certains facteurs atténuants, dont son dossier disciplinaire vierge, son ancienneté accumulée (douze années), son intention, etc. Pour ces motifs, le congédiement est annulé et la réintégration est ordonnée.
La demande de dommages moraux et exemplaires du Syndicat est toutefois rejetée, car il n’a pas été démontré que l’employeur a agi d’une manière abusive, malveillante ou contraire à la Charte québécoise des droits et libertés de la personne.
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