PAR ME ÉMILE B. DENAULT
Un tribunal d’arbitrage est appelé à déterminer si un employeur peut être tenu responsable de dommages liés à une situation de harcèlement psychologique causé par un tiers.
Dans la décision Syndicat de l’enseignement de la région de Québec et Centre de service scolaire des Premières-Seigneuries, 2024 QCTA 113 (décision disponible sur SOQUIJ), le Tribunal d’arbitrage se positionne quant à l’application d’une décision qu’il a rendue antérieurement. Il s’agissait d’une enseignante qui se plaignait de harcèlement psychologique de la part de la mère d’un élève. Le Tribunal avait accueilli le grief. Il y a maintenant litige sur les dommages subis par la travailleuse ainsi que la responsabilité de l’employeur face à ceux-ci.
Le Tribunal est donc saisi d’une question intéressante, soit de déterminer si l’employeur peut être tenu responsable des dommages subis par la travailleuse bien que ceux-ci aient été commis par une tierce partie, en l’occurrence, la mère de l’élève. L’employeur prétend qu’il ne peut être tenu responsable étant donné que les dommages résultent d’une tierce partie qui est l’unique responsable des dommages.
Le Tribunal n’est pas de cet avis. Malgré que la tierce partie soit l’unique responsable de comportements harcelants, le Tribunal soutient que l’employeur a la responsabilité de prendre les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique et de le faire cesser lorsqu’il est porté à sa connaissance en vertu de la législation en vigueur (notamment, laLoi sur les normes du travail). En l’espèce, l’employeur a failli à son devoir. Plus particulièrement, l’employeur s’est montré fautif étant donné que ses représentants n’ont pas pris, en temps opportun, les moyens raisonnables afin de faire cesser le harcèlement. Pendant plusieurs mois, l’employeur savait que la travailleuse était victime d’une conduite harcelante, vexatoire et hostile sans intervenir pour que cette dernière cesse. L’employeur avait d’ailleurs un lien de contact et de communication avec la tierce partie qui lui permettait d’intervenir. Des gestes ont finalement été posés, mais de façon trop tardive et timide.
L’employeur, par sa conduite laxiste, a engagé sa responsabilité.
En termes de réparation, le Tribunal ordonne à l’employeur de payer 30 000$ à titre de dommages moraux, 5132.01$ à titre de pertes pécuniaires, ainsi que 10 000$ à titre de dommages punitifs.
Text