Dans la décision M. c. Centre intégré de santé et de services sociaux de Laval, 2025 QCTAT 2408, (j.a. Nancy Martel), la travailleuse, infirmière clinicienne à l’urgence de l’Hôpital de Laval depuis 2011, est libérée à temps complet depuis octobre 2017 pour exercer des fonctions syndicales. Parallèlement, elle continue de travailler à l’urgence en temps supplémentaire. En novembre 2021, elle postule au poste d’assistante infirmière-chef (ci-après : l’« AIC »), mais n’est pas convoquée en entrevue.
Le 11 janvier 2022, elle dépose une plainte contre le Centre intégré de santé et de services sociaux de Laval (ci-après, le « CISSS ») en vertu de l’article 16 du Code du travail (ci-après, le « Code »), alléguant que son exclusion repose sur un motif illicite, soit ses libérations syndicales, ce qui constituerait une mesure de représailles prohibée. Le CISSS soutient que sa candidature n’a pas été écartée en raison de ses fonctions syndicales, mais plutôt parce qu’elle ne remplissait pas les exigences du poste, notamment d’avoir cumulé, au cours des cinq dernières années, un minimum de 3 374 heures à l’urgence en temps régulier ou supplémentaire, ce qui constitue l’équivalent de deux années à temps complet. Or, la travailleuse totalisait environ 1 500 heures. D’ailleurs, le poste AIC s’inscrit dans un environnement clinique hautement dynamique, caractérisé par une clientèle diversifiée, des situations critiques et une évolution constante des protocoles, pratiques et outils cliniques. C’est précisément en raison de cette réalité que le service des ressources humaines exige que l’expérience soit récente et refuse d’assimiler les heures de libérations syndicales à des heures de travail effectif pour les fins de l’évaluation.
La travailleuse apprend que les entrevues pour le poste sont en cours et découvre que sa non-sélection est liée à l’absence d’heures suffisantes. Elle soutient que ce refus d’accepter ses heures de libérations syndicales constitue une discrimination fondée sur l’exercice d’un droit protégé par le Code.
Le Tribunal rappelle que, conformément aux articles 16 et 17 du Code, il est interdit à un employeur de congédier, suspendre, déplacer, exercer des mesures discriminatoires ou imposer toute autre sanction à l’endroit d’un salarié en raison de l’exercice d’un droit protégé par le Code. Si un salarié estime avoir subi une telle mesure, l’article 16 lui accorde un recours, pour autant qu’il en remplisse les conditions d’ouverture. De plus, l’article 17 prévoit une présomption en sa faveur s’il y a concomitance entre l’exercice d’un droit protégé et l’imposition de la mesure ou de la sanction qu’il a subie. L’employeur devra prouver qu’il a pris cette sanction ou cette mesure à l’égard du salarié pour une autre cause juste et suffisante.
En l’espèce, les conditions d’ouverture du recours sont admises : la plaignante est une salariée qui exerce des activités syndicales et la plainte est déposée dans les 30 jours suivant la mesure contestée.Cela étant dit, la preuve démontre que la travailleuse a été traitée de manière équitable, au même titre que toute autre candidate ne satisfaisant pas aux exigences établies pour le poste. Le refus de sa candidature repose sur une norme d’expérience clairement définie, appliquée uniformément. Le fait que l’insuffisance d’heures soit attribuable à ses libérations syndicales ne saurait, à lui seul, conférer à la décision un caractère illicite, dès lors que l’expérience exigée n’était objectivement pas atteinte.
Le Tribunal conclut que le CISSS s’est acquitté de son fardeau, en démontrant que sa décision reposait sur une cause sérieuse, légitime et non antisyndicale. La plainte est donc rejetée.
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