Dans la décision Ville de Montréal et Syndicat des employées et employés professionnels-les et de bureau, section locale 571 (SEPB) CTC-FTQ (griefs individuels), 2025 QCTA 193, (a. Me Pierre-Georges Roy), le Tribunal est saisi de deux griefs qui reprochent à l’employeur de ne pas avoir respecté une entente de règlement de griefs conclue avec le plaignant, et ce, en transmettant à des représentants des médias certaines informations qui y étaient contenues.
Dans le cadre d’une conférence préparatoire, le procureur syndical a manifesté son intention de demander que de nouveaux griefs, qui visent expressément les personnes ayant commis les fautes alléguées, soient joints aux griefs en cause. L’employeur s’y oppose en faisant valoir que cela contournerait les dispositions de la convention régissant le renvoi à l’arbitrage.
Le salarié en cause était procureur à la Ville de Montréal au moment de la signature de l’entente de règlement dont il est question. Cette entente a été signée dans un contexte de fin d’emploi. Elle comprenait, comme il est usuel dans de telles circonstances, un texte visant à s’assurer que la transaction demeure confidentielle. Or, selon les prétentions syndicales, des représentants de l’employeur auraient manqué à cette obligation.
Le Tribunal ne remet pas en question le fait que les parties doivent choisir un arbitre de griefs en respectant les règles convenues dans la convention collective. Il partage donc l’avis des tribunaux, qui ont établi que l’omission de respecter ce principe impliquait que l’arbitre n’est pas valablement saisi du grief. Il estime toutefois que cette règle n’est pas incontournable et qu’elle ne s’applique pas en toutes circonstances. En ce sens, l’arbitre demeure maître de la procédure et de la preuve et il lui est loisible d’apprécier une demande d’y déroger pour des motifs liés à l’efficacité du processus arbitral.
En l’espèce, trois nouveaux griefs ont un lien de connexité évident avec les deux plaintes dont le Tribunal est déjà saisi. Ceux-ci n’ont pas été confiés à un autre décideur. Il s’agit d’une situation où les règles de nomination prévues à la convention collective ne s’appliquent pas nécessairement. À cet égard, les intérêts de la justice et la règle de la proportionnalité jouent en faveur de la réunion des anciens et des nouveaux griefs ayant un lien de connexité suffisant. Enfin, si le préjudice allégué par l’employeur demeure un élément préoccupant, il ne constitue pas un obstacle à la réunion des griefs.
Ainsi, une analyse en fonction des paramètres proposés par les arbitres ou commentateurs que le Tribunal a cités précédemment au soutien d’une approche procédurale plus souple révèle que les intérêts de la justice et la règle de la proportionnalité jouent clairement en faveur de la réunion de griefs nouveaux et anciens ayant un lien de connexité suffisant. Dans le cadre du présent dossier, les deux séries de griefs mettent en effet de toute évidence en cause les mêmes faits et, au moins en partie, les mêmes règles juridiques.
Pour ces motifs, la demande de réunion des griefs avec ceux dont l’arbitre est déjà saisi est accueillie.
Un pourvoi en contrôle judiciaire a été déposé par la Ville. Il s’agit donc d’un dossier à suivre.
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