SECTION DROIT DU TRAVAIL
GÉNÉRAL
Ville de Lachute c. Tribunal administratif du travail (Division des relations de travail), 2020 QCCS 4441
https://www.canlii.org/fr/qc/qcca/doc/2021/2021qcca17/2021qcca17.pdf
La Cour supérieure du Québec est saisie d’une demande de sursis de l’exécution de la décision rendue antérieurement par le Tribunal administratif du travail (ci-après « TAT »), selon laquelle la Ville de Lachute devait procéder à la réintégration de deux fonctionnaires municipaux.
Ces fonctionnaires occupaient des postes de cadres, soit un directeur-général et une secrétaire-trésorière. Ils sont destitués en 2015, à la suite d’une enquête déclenchée à l’arrivée de nouveaux élus municipaux. Ils déposent donc des plaintes en vertu de l’article 71 de la Loi sur les cités et villes. Le TAT, après plus de quarante jours d’audience, rend une longue décision par laquelle il ordonne leur réintégration. À ce moment, l’employeur se pourvoit en contrôle judiciaire contre cette décision en réclamant un sursis de l’exécution des ordonnances de réintégration jusqu’à ce que le pourvoi soit tranché sur le fond. La Cour entreprend donc une analyse de la demande de sursis en rappelant qu’il s’agit d’un recours exceptionnel qui fait appel au pouvoir discrétionnaire du Tribunal. La partie qui désire obtenir l’ordonnance de sursis doit respecter trois (3) critères cumulatifs.
L’apparence de droit ou la question sérieuse
Sur ce premier critère, le Tribunal rejette les prétentions quant à une question sérieuse puisque les seuls arguments soulevés renvoient à la relation amoureuse entretenue par les deux fonctionnaires municipaux qui serait inappropriée et justifierait la terminaison d’emploi. Ainsi, la Ville considère que dans le contexte du droit municipal, le conseil municipal demeure souverain de ne pas accepter une telle situation et le TAT, en s’ingérant dans cette décision, commet une erreur. Ces arguments sont rejetés.
[32] La jurisprudence applique la norme de contrôle de l’erreur raisonnable aux décisions du TAT, en application des articles 71 et suivants L.c.v. De plus, la décision est sans appel et d’exécution immédiate. Il est improbable que les demanderesses aient gain de cause sur la question de la norme de contrôle.
Bien que le non-respect de ce premier critère soit suffisant pour rejeter la demande de sursis, la Cour prend le soin d’analyser les deux autres critères.
Le préjudice sérieux ou irréparable
Pour ce qui est des difficultés invoquées, elles s’avèrent insuffisantes. D’une part, le fait que des employés aient été embauchés pour remplacer les fonctionnaires et, d’autre part, la prétention voulant qu’une réintégration d’employés destitués entraînera une méfiance de la part de la population ne sont pas des difficultés qui excèdent les difficultés ordinaires qui découlent normalement d’une ordonnance de réintégration. Les personnes qui occupent ces postes savent que leur emploi est précaire et, d’ailleurs, leur contrat de travail le prévoit. Il n’y a pas de préjudice sérieux ou irréparable découlant du rejet de la demande.
La prépondérance des inconvénients
L’argument de la Ville au soutien de ce critère étant que les inconvénients subis par les deux fonctionnaires sont moindres étant donné qu’ils occupent déjà des emplois est rejeté. En effet, leurs emplois leur rapportent un revenu inférieur de ce qu’ils obtiendraient par une réintégration. De plus, tout retard quant à leur réintégration aggrave l’atteinte à leur dignité et à leur épanouissement personnel.
La demande de sursis est rejetée.
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Zigler c. Downtown YMCA Montréal, 2020 QCCQ 8754
https://www.canlii.org/fr/qc/qcca/doc/2020/2020qcca1787/2020qcca1787.pdf
Dans cette affaire, la Cour du Québec, Division des petites créances, est saisie d’une demande en réclamation de dommages-intérêts (3 584 $) pour rupture d’une promesse d’embauche. En fait, la demanderesse reproche à Downtown YMCA Montréal (ci-après « YMCA ») d’avoir refusé, sans juste cause, de donner suite à une promesse d’embauche.
En mars 2018, madame Zigler (ci-après « travailleuse »), alors en recherche d’un emploi pour l’été, est convoquée pour une entrevue pour un poste de monitrice de camp de jour par le YMCA. Le 9 avril 2018, le YMCA lui offre l’emploi qui consiste en un contrat de travail d’une durée de huit semaines à un taux horaire de 12,80 $. Le tout est clairement démontré par plusieurs documents et échanges de courriels avec des représentants du YMCA, notamment du service des ressources humaines qui lui souhaitent la bienvenue dans l’équipe pour l’été 2018 et demandent aux 17 moniteurs retenus de soumettre les documents habituels d’embauche (spécimen chèque, numéro d’assurance sociale, références). D’ailleurs, dans l’un des documents transmis, il est clairement indiqué que la travailleuse est une employée à temps partiel du YMCA.
Or, quelques minutes avant le début de l’événement servant de bienvenue aux nouveaux moniteurs, la travailleuse reçoit un appel du YMCA pour lui indiquer de ne pas se présenter puisque, en raison des réponses données par les références fournies, les exigences de l’emploi ne sont pas remplies. La travailleuse met donc en demeure le YMCA de l’indemniser pour 3 584 $, soit le montant correspondant au salaire perdu pour les huit semaines d’emploi.
La Cour applique l’article 1396 du Code civil du Québec concernant l’offre de contracter et conclut que, par ses agissements et à travers ses représentants, le YMCA a effectivement offert un emploi de monitrice de camp de jour à la travailleuse, qui l’a d’ailleurs immédiatement accepté. Ce faisant, le YMCA était dans l’obligation de conclure un contrat de travail avec cette dernière sous peine de voir sa responsabilité engagée.
[23] YMCA croit à tort que pour être redevable envers Mme Zigler, cette dernière devait avoir un contrat de travail écrit. Le Tribunal tient à rappeler que le contrat de travail est consensuel; il se forme par le seul échange de consentement entre des personnes capables de contracter, sans qu’aucune forme particulière ne soit requise. Il peut donc être aussi bien verbal qu’attesté par un écrit plus ou moins élaboré.
La juge rejette également l’argument voulant que la travailleuse devait savoir que son embauche était conditionnelle à la vérification des références. En effet, la preuve démontre sans équivoque que les représentants du YMCA ont sans réserve ni retenue féliciter la travailleuse pour l’obtention de l’emploi comme monitrice pour l’été 2018. Ainsi, le refus injustifié de respecter la promesse d’embauche constitue une faute génératrice de responsabilité civile, car il y a bel et bien eu une promesse bilatérale d’un contrat d’emploi formée entre les deux parties. Les dommages-intérêts réclamés sont fondés et raisonnables au regard du principe de la réparation intégrale.
La demande de dommages-intérêts pour un montant de 3 584 $ est accueillie.
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Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) et CIUSS du Centre-Sud-de-l’Île-de Montréal (Centre jeunesse de Montréal-IU), (Jocelyn Martin), 2021 QCTA 26
https://soquij.qc.ca/portail/recherchejuridique/AZ/51735843
Dans cette décision, l’arbitre Jean Ménard doit d’abord trancher un différend quant aux montants que l’employeur devait payer en raison de l’annulation de la suspension et du congédiement du salarié dans une première sentence arbitrale. Ensuite, il doit établir s’il est compétent pour accorder des dommages moraux au plaignant et, si oui, à quel montant ce dernier a droit.
La première sentence arbitrale, rendue le 10 avril 2018, avait annulé les mesures disciplinaires imposées et ordonné la réintégration du plaignant avec tous les avantages dont il a été privé. Or, ce n’est que trois mois plus tard, que l’employeur fait un premier versement au salarié par dépôt direct d’une somme de 67 812,52 $, sans avis ni explication. Par la suite, au mois de décembre 2018, l’employeur crédite d’autres montants au salarié pour la RRQ, l’Assurance Emploi et le RQAP. Enfin, ce n’est qu’en octobre 2019, soit 18 mois après la sentence arbitrale, que l’employeur rembourse au plaignant sa perte salariale.
Toutefois, après le remboursement des sommes, le salarié avait encore un manque à gagner considérable. À cela s’ajoutent diverses explications nébuleuses fournies par l’employeur au regard des paiements effectués. Devant ces problématiques comptables causées par la façon dont l’employeur a traité le dossier, l’arbitre lui ordonne de payer la somme correspondant au montant brut de 46 171,60 $, en plus, de l’obliger à fournir au syndicat une reddition de comptes pour justifier clairement les déductions qu’il a faites sur les montants déjà remboursés.
Pour ce qui est de la compétence d’accorder des dommages moraux, le Tribunal rejette l’argument patronal voulant que l’omission de l’arbitre de se prononcer sur cette question dans la première sentence écarte sa compétence en raison de la règle du functus officio. Néanmoins, l’annulation d’une mesure disciplinaire n’entraîne pas automatiquement le droit pour le plaignant d’exiger ce type de compensation. Il doit en plus démontrer que l’employeur n’a pas agi conformément aux normes acceptées en matière de gestion des ressources humaines.
L’arbitre Ménard conclut effectivement que la conduite de l’employeur dans sa gestion du dossier a porté atteinte à la dignité, à l’honneur et à la réputation du salarié. D’ailleurs, la sévérité des propos de l’arbitre illustre la nature inusitée de la conduite patronale.
[78] En premier lieu, l’employeur a transmis une lettre de suspension de 4 pages à un employé déjà fragile, lui reprochant une foule de comportements disparates, et traçant un portrait dévastateur de sa compétence professionnelle, alors qu’aucun gestionnaire ne l’avait rencontré auparavant pour en discuter avec lui.
[79] Deuxièmement, même si les gestionnaires de la Cité des Prairies ont suivi la recommandation des ressources humaines d’imposer une mesure qui respecte le principe de la gradation des sanctions, ils n’ont pas adopté une ligne de conduite qui respecte ce principe, comme en témoignent le fait que la promesse d’encadrement spécifique faite par l’employeur dans le dernier paragraphe de la lettre de suspension n’a pas été tenue, ainsi que le portrait dressé par la chef de service de l’Épisode à sa collègue de l’Entreprise.
[80] Troisièmement, l’employeur a congédié le plaignant au terme d’une enquête qu’on ne peut qualifier autrement que de biaisée et bâclée.
[82] L’ampleur, pour ne pas dire la démesure, des moyens déployés par l’employeur en arbitrage n’a pas suffi à masquer le caractère ténu du dossier qu’il a monté à l’encontre du plaignant. Elle a même aggravé les dommages subis par M. Martin, comme l’indique son témoignage lors de l’audition sur le quantum.
Conséquemment, l’arbitre accorde le montant de 65 000 $ réclamé par le syndicat à titre de dommages moraux.
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Darveau c. Transcontinental inc., 2020 QCCS 4442
La Cour supérieure du Québec est saisie d’une demande en justice réclamant des dommages-intérêts pour rupture d’un contrat de travail. Monsieur Darveau poursuit Transcontinental inc., (ci-après « employeur »), puisqu’il a fait l’objet d’un congédiement sans aucun préavis. À l’opposé, l’employeur soutient que le demandeur a commis plusieurs fautes graves constituant des motifs sérieux qui justifient un congédiement sans préavis.
En 2014, une des divisions de l’employeur connaît des difficultés économiques et monsieur Darveau est embauché à titre de consultant pour l’aider à retrouver le chemin de la rentabilité. À ce moment, le demandeur jouit d’une bonne réputation en raison notamment de la publication de son magazine à l’international. Il occupe les fonctions de directeur-général et vice-président d’une des divisions chez l’employeur. Dans l’accomplissement de son mandat, il effectue des changements importants parmi lesquels figurent le début d’une collaboration entre la division de l’employeur et son magazine afin de donner une plus grande visibilité à la compagnie. Par la suite, il y a un changement de direction chez l’employeur et, pour éviter le départ de Darveau, on lui présente une offre pour qu’il demeure en poste, ce qu’il accepte. Or, la perte d’un contrat important entraîne une chute du volume de travail des employés et pour éviter des départs, monsieur Darveau décide de les occuper à travailleur sur les publications de son magazine. Une enquête est ensuite déclenchée pour vérifier s’il y a conflit d’intérêts et utilisation injustifiée des ressources de l’employeur. Finalement, le demandeur est suspendu pour fins d’enquête et congédié quelques semaines plus tard.
La Cour rappelle d’abord que c’est l’employeur qui a le fardeau de prouver que le travailleur a commis un manquement tellement grave qu’il justifie un congédiement sans préavis, conformément à l’article 2094 du Code civil du Québec. À cet effet, elle rappelle que, lorsqu’il s’agit d’un cadre supérieur, l’employeur peut imposer un congédiement sans être contraint par le principe de la progression des sanctions comme ce serait le cas pour un salarié.
Le juge analyse le contrat de travail signé entre l’employeur et Darveau, et conclut qu’il était autorisé à travailler pour son magazine tout en utilisant des ressources de l’entreprise à condition que cela était fait pour contribuer aux intérêts de l’employeur. Sur ce point, la Cour retient que l’employeur ne peut pas soudainement reprocher à Darveau un conflit d’intérêts ou l’utilisation de ses ressources puisque le tout s’est toujours fait à sa connaissance. Par conséquent, il ne peut d’abord l’autoriser puis ensuite le discipliner pour les mêmes faits.
Toutefois, il en est autrement de l’utilisation des ressources au profit de l’entreprise Missfresh dont Darveau est administrateur et investisseur. Il est établi en preuve que le demandeur a fait travailler du personnel de l’employeur en plus de faire expédier gratuitement des colis pour Missfresh aux bureaux de l’employeur. Le tout, en omettant de le mentionner dans sa déclaration annuelle de conflits d’intérêts à l’employeur. Avec ces éléments, le juge conclut que Darveau s’est effectivement placé en situation de conflits d’intérêts, a contrevenu à son obligation de loyauté et, par le fait même, a violé les politiques et Code de conduite de l’entreprise. La commission de l’ensemble de ces fautes par un cadre supérieur est très grave et justifie un congédiement sans préavis.
[150] En considérant l’ensemble des circonstances, le Tribunal doit conclure que TC a des motifs sérieux de congédier Darveau. En choisissant de faire affaires avec Missfresh, Darveau s’est mis en conflit d’intérêts. Au surplus, en offrant à Missfresh les services d’employés de TOTEM, pendant l’équivalent d’une journée entière, en plus de l’occasion où TOTEM s’est chargéede livrer des produits de Missfresh à ces clients, Darveau cause préjudice à TC.
[151] De plus, en acceptant une nomination au conseil d’administration de Missfresh, il commet une faute supplémentaire.
[152] La commission de telles fautes par un cadre supérieur est très grave et justifie, dans le contexte de la présente affaire, un congédiement sans préavis sans égard à la bonne foi de Darveau.
La demande est rejetée.
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Center for Gender Advocacy c. Attorney General of Quebec, 2021 QCCS 191
https://www.canlii.org/en/qc/qccs/doc/2021/2021qccs191/2021qccs191.pdf
Dans ce dossier, la Cour supérieure du Québec rend un important jugement alors qu’elle était saisie d’une demande visant à faire déclarer inconstitutionnelles plusieurs dispositions du Code civil du Québec (ci-après « C.c.Q. ») concernant notamment la désignation du sexe sur les documents de l’état civil.
La décision soulève la différence entre l’identité de genre et le sexe au regard de la discrimination qui peut en découler lorsque la loi en fait des synonymes. En effet, les demandeurs sont et représentent des personnes trans ou non binaires. Ce sont des personnes pour lesquelles l’identité de genre ne correspond pas au sexe inscrit à leur naissance.
En fait, les demandeurs alléguaient que plusieurs articles du Code civil du Québec contreviennent aux droits fondamentaux des personnes trans ou non-binaires. Les illustrations de cette discrimination sont diverses et renvoient notamment au sexe inscrit dès la naissance sur les documents officiels servant à identifier une personne et qui suivent celle-ci durant toute sa vie dans ses interactions autant avec les autorités gouvernementales que dans sa vie privée, à savoir les documents nécessaires pour avoir accès à des programmes gouvernementaux, la recherche d’un emploi, l’inscription à l’école, le louage d’un appartement, etc.
Pour les fins de sa décision, le juge Moore concentre son analyse autour de deux droits fondamentaux protégés autant par la Charte canadienne des droits et libertés (ci-après « Charte canadienne ») que par la Charte des droits et libertés de la personne (ci-après « Charte québécoise »). Ce sont les droits à l’égalité et à la dignité de la personne.
Après une analyse exhaustive des diverses dispositions du Code civil du Québec, pour lesquelles une obligation est imposée de préciser le sexe de la personne sur les documents, la Cour supérieure donne raison sur quasiment toute la ligne aux demandeurs en invalidant cinq articles du Code civil du Québec jugés discriminatoires et donne au gouvernement du Québec jusqu’au 31 décembre 2021 pour corriger le tout.
La Cour vise ainsi à faciliter le processus par lequel les personnes trans peuvent changer leur identité sur les documents de l’état civil et à permettre aux personnes non binaires à devenir « visibles » aux yeux de l’état civil.
Parmi les dispositions contrevenant aux droits à l’égalité et à la dignité des personnes trans ou non binaires se trouvent les articles 111, 115 et 116 du C.c.Q., puisqu’ils obligent les parents non binaires à s’identifier comme la mère ou le père d’un enfant, au lieu de désigner la personne comme « parent ». Aussi, l’article 71 (1) du C.c.Q., est visé car il ne permet pas aux personnes non binaires de changer la désignation du sexe sur l’acte de naissance pour correspondre à leur identité de genre. Enfin, l’article 146 du C.c.Q. est également discriminatoire alors qu’il exige la désignation du sexe sur le certificat de l’état civil.
[328] The plaintiffs proved that a register of civil status that does not recognize the gender identity of transgender and non-binary people, or that limits their ability to correct the designation of sex on their acts of civil status to reflect their true identity, deprives them of the dignity and the equality that they are owed. Their inability to prove their true identity keeps them in a state of acute vulnerability that too often leads to suicide.
La demande est accueillie en partie.
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POLICIERS ET POLICIÈRES
Commissaire à la déontologie policière c. Nicolas Marceau
Décision disponible sur demande
Dans cette décision, le Comité de déontologie policière doit décider de la sanction appropriée à imposer à l’ex-agent Nicolas Marceau, lequel a obtenu une absolution inconditionnelle après avoir plaidé coupable à l’infraction d’avoir effectué trois recherches au CRPQ de manière frauduleuse ou illégale.
L’ex-agent du Service de police de la Ville de Gatineau avait préalablement été destitué par le Comité de discipline de la Ville de Gatineau pour avoir effectué des recherches à des fins personnelles dans la banque du Centre de renseignement policier du Québec. Monsieur Marceau a plaidé coupable devant la Cour du Québec à l’infraction prévue à l’article 342.1 C.cr. et a reçu une absolution inconditionnelle.
Le Commissaire à la déontologie policière demandait la destitution de monsieur Marceau en raison de la gravité objective de l’inconduite et en raison du fait que l’utilisation frauduleuse du CRPQ constitue une violation du droit à la vie privée ainsi qu’un abus de confiance. Le Commissaire soumet finalement que le lien de confiance entre le public et monsieur Marceau est irrémédiablement rompu.
La procureure de monsieur Marceau invoque que le but premier de la sanction en matière déontologique n’est pas de punir, mais plutôt de dissuader les autres policiers d’adopter un tel comportement. Elle énonce ensuite les facteurs atténuants, soit l’absence d’antécédent déontologique ou criminel, le faible risque de récidive, et le fait que monsieur Marceau n’a tiré aucun bénéfice personnel de ces recherches. La procureure de monsieur Marceau demande une déclaration d’inhabilité d’une durée de 36 mois.
Le Comité de déontologie policière rappelle que la condamnation n’entraîne pas nécessairement la destitution du policier par le Comité. Dans le présent dossier, le Comité est d’avis qu’un citoyen raisonnable bien informé de la présente affaire continuerait de faire confiance à monsieur Marceau. De plus, le Comité est également d’avis que l’objectif de dissuasion est atteint et que les risques de récidive sont faibles. Bien que les fautes commises par monsieur Marceau soient graves, le Comité est d’avis que ce dernier ne mérite pas la destitution. Par conséquent, le Comité impose une période de 48 mois d’inhabilité à monsieur Marceau.
Nous tenons à féliciter Me Ariane Bergeron St-Onge pour son travail dans ce dossier!!!
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TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER
Rien à signaler.
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POMPIERS ET POMPIÈRES
Rien à signaler.
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ARTISTES
Rien à signaler.
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SECTION DROIT CRIMINEL
GÉNÉRAL
R c. Tremblay, 2021 QCCA 24
https://www.canlii.org/fr/qc/qcca/doc/2021/2021qcca59/2021qcca59.pdf
Dans cette affaire, l’intimée fut arrêtée en mars 2017 pour avoir conduit un véhicule avec les facultés affaiblies par l’alcool. L’intimée a exprimé le désir de consulter, immédiatement après son arrestation, un avocat qu’elle connaissait et lors de l’interception, elle était en possession d’un cellulaire. Un délai de 26 minutes s’est écoulé entre l’arrestation et le départ en direction du poste de police. Le juge de première instance a ordonné l’exclusion d’éléments de preuve — les résultats de l’alcootest — après avoir conclu que les policiers avaient porté atteinte au droit de l’intimée d’avoir recours sans délai à l’assistance d’un avocat, lequel est protégé par l’article 10 b) de la Charte canadienne des droits et libertés. Il a déterminé que l’intimée avait clairement exprimé sa volonté de consulter un avocat immédiatement après son arrestation. Il a rejeté les prétentions des policiers selon lesquelles ils auraient refusé de permettre à l’intimée d’utiliser son téléphone cellulaire pour appeler son avocat en raison de préoccupations liées à la confidentialité et à la sécurité, concluant plutôt que ceux-ci n’avaient envisagé aucune solution de rechange à la procédure habituelle consistant à faciliter l’accès à un avocat uniquement au poste de police. La Cour supérieure a rejeté l’appel.
Le juge François Doyon de la Cour d’appel conclut que la possibilité pour une personne détenue d’utiliser un téléphone cellulaire afin d’exercer son droit de recourir sans délai à l’assistance d’un avocat doit être prise en considération par les policiers dans leur devoir de faciliter l’exercice de ce droit à la «première occasion raisonnable» et est pertinente quant à l’évaluation du caractère raisonnable ou non du délai écoulé avant l’accès à l’avocat.
Les policiers n’ont pas rempli leur devoir bien connu de faciliter l’exercice par l’intimée, à la première occasion raisonnable, de son droit constitutionnel à l’assistance d’un avocat. Le problème n’est pas d’avoir refusé de laisser l’intimée téléphoner à son avocat avec son téléphone cellulaire, mais de ne pas avoir pris en considération cette possibilité en raison de l’absence d’une directive leur permettant de le faire, ce qui constitue une conduite systémique faisant fi de la jurisprudence bien établie. Cette situation ne peut être tolérée.
Appel du ministère public rejeté.
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R. c. Deslauriers, 2021 CSC 3
https://www.canlii.org/fr/ca/csc/doc/2021/2021csc3/2021csc3.pdf
Dans cet arrêt, la Cour suprême du Canada rejette le pourvoi du ministère public à l’encontre de l’ordonnance de nouveau procès rendu par la Cour d’appel dans le dossier du policier Éric Deslauriers, pour les motifs du juge Chamberland.
La Cour suprême est d’avis que la juge de première instance a erré en droit en refusant à M. Deslauriers le droit d’obtenir et de déposer, le cas échéant, des documents portant sur l’existence de trois enquêtes criminelles et un rapport du Centre jeunesse des Laurentides impliquant la victime, information vraisemblablement et raisonnablement susceptible d’aider M. Deslauriers dans l’exercice de son droit à une défense pleine et entière.
La Cour suprême conclut que la juge de première instance a également erré dans l’interprétation et le traitement de la preuve capitale pour l’accusé de nature à entraîner une erreur judiciaire. Cependant, il n’est pas nécessaire de disposer de cette question déjà décidée par la Cour d’appel du Québec. La juge de première instance a également erré dans le traitement du témoignage de l’expert M. Poulin qui portait sur le comportement de M. Deslauriers en tant que policier, ce qui était au cœur de ses moyens de défense.
Finalement, bien qu’il ne soit pas nécessaire de se prononcer sur l’aspect récusation du jugement entrepris, et dans la mesure où le ministère public désire poursuivre les procédures menant à un deuxième procès, ce dernier devra procéder devant un autre juge d’instance. Pour ces motifs, le pourvoi est rejeté.
Les juges Abella et Brown sont d’avis que les documents recherchés par la défense ne satisfont pas au critère de « pertinence probable » au sens des arrêts R. c. O’Connor et R. c. McNeil. De plus, à leur avis, l’expert Bruno Poulin a dépassé les limites de son expertise, et son témoignage n’était ni pertinent ni nécessaire au sens de l’arrêt R. c. Sekhon. Pour ces motifs, ils auraient accueilli l’appel, infirmé l’arrêt de la Cour d’appel et rétabli le verdict de culpabilité.
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