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Veille juridique du 23 novembre 2021

 

SECTION DROIT DU TRAVAIL

GÉNÉRAL

 

Lachance c. Procureur général du Québec, 2021 QCCS 4721

https://canlii.ca/t/jkdl0

 Le juge Yergeau se prononce à l’égard d’une demande de sursis présentée dans le cadre d’un pourvoi en contrôle judiciaire initié par les demandeurs. Ceux-ci cherchent à faire déclarer invalide le Décret 1276-2021 (ci-après, « le Décret ») pris le 24 septembre 2021 et qui exige des intervenants de la santé et des services sociaux qu’ils fournissent au plus tard le 15 octobre 2021 la preuve qu’ils sont adéquatement protégés contre la Covid-19 sous peine de suspension sans solde. Même si le Ministre de la Santé et des Services sociaux a fait une déclaration publique annonçant que le gouvernement renonce à exiger la double vaccination des intervenants de la santé prévue au Décret, la Cour juge qu’il convient tout de même de rendre le présent jugement.

D’abord, la Cour supérieure revient sur l’objet du Décret. Celui-ci impose à l’ensemble des intervenants de la santé l’obligation de fournir à l’employeur la preuve qu’ils sont adéquatement protégés contre la Covid-19. Cette preuve est d’abord et avant tout une preuve vaccinale. Le défaut de fournir une telle preuve entraine l’impossibilité de continuer à travailler et la perte de la rémunération associée à l’emploi tant et aussi longtemps que le Décret ne sera pas abrogé ou modifié ou que durera l’état d’urgence sanitaire décrété par le gouvernement le 13 mars 2020. Les demandeurs, au nombre de 127, comptant notamment des infirmières, des médecins, des ambulanciers, etc., expliquent leur refus de se faire vacciner en invoquant leur droit à l’inviolabilité de leur personne. Le décret empêchera les demandeurs de gagner leur vie et ils se déclarent prêts à se faire tester régulièrement contre la COVID-19. Ils ajoutent que la santé de la population sera à risque par l’application du Décret puisque les établissements et milieux de santé seront privés des services de tous les intervenants qui refusent d’être vaccinés contre la Covid-19, dans un contexte de « dégénérescence » du système de santé.

La Cour rappelle que pour accorder la demande de sursis, quatre critères doivent être réunis : a)   une situation d’urgence, réelle et objective, justifiant le juge d’intervenir immédiatement plutôt qu’à un stade ultérieur de l’instance; b)   une apparence de droit ou une question à juger qui semble sérieuse après une étude préliminaire du fond du litige; c)   un préjudice sérieux ou irréparable qui sera causé à celui qui demande l’ordonnance de sursis si elle lui est refusée; d)   la prépondérance des inconvénients qui implique de décider qui subira les pires inconvénients selon qu’est accordé ou refusé le sursis en attendant le jugement au mérite. Le juge Yergeau, après avoir effectué une revue de la jurisprudence, retient que les actes de l’Administration (règlements, décrets et arrêtés) bénéficient d’une forme de double présomption, soit celle d’avoir été adoptés conformément à la loi habilitante et celle de l’avoir été dans l’intérêt général. Il revient donc à la partie qui demande d’ordonner le sursis d’établir que la suspension de l’application de la loi serait elle-même à l’avantage du public.

Le critère de l’urgence étant admis par le Procureur général, la Cour se prononce à l’égard de l’apparence de droit. Elle conclut que les demandeurs ont établi avoir une apparence de droit au sens de l’article 511 du Code de procédure civile puisqu’ils soumettent des questions sérieuses tant au mérite qu’au stade du sursis et qu’ils affichent le locus standi requis en pareil cas. Quant au critère du préjudice irréparable, la Cour précise que même si la sanction prévue au Décret est lourde, il s’agit d’un préjudice réparable auquel le jugement au fond pourra apporter une correction en fonction de la rémunération perdue. Le juge pousse plus loin son analyse en se demandant s’il existe un « préjudice sérieux au plan collectif » résultant de l’application du Décret. Il se dit d’avis que rien dans la preuve des demandeurs ne se révèle suffisamment précis et détaillé pour établir avec une certaine confiance la probabilité d’un préjudice sérieux sur les bénéficiaires du système public de santé et leur droit de recevoir les soins de santé requis par leur état. Finalement, quant au critère de la prépondérance des inconvénients, les demandeurs ont été incapables de démontrer que le Décret n’a pas été pris à sa face même pour protéger la santé de la population dans un contexte d’urgence sanitaire dûment déclarée. Ce Décret bénéficie d’une présomption de validité. La balance des inconvénients, à ce stade, favorise le Procureur général.

La demande de sursis est rejetée.

 

Union des employés et employées de service, section locale 800 c. Services ménagers Roy ltée., 2021 CanLII 114756

https://canlii.ca/t/jf2ff

Cette sentence arbitrale est la première au Québec à traiter de l’obligation de divulgation du statut vaccinal en milieu de travail. Dans cette affaire, certains clients des employeurs exigeront sous peu que toutes les personnes appelées à travailler à l’entretien ménager dans leurs locaux soient entièrement vaccinées. Dans le cadre d’un grief déclaratoire, les parties ont demandé à l’arbitre Me Denis Nadeau de se prononcer sur la conformité en droit de cette exigence. La particularité de ce dossier réside dans son cadre tripartite puisque les clients des employeurs ne sont pas visés par la convention collective. D’ailleurs, l’arbitre rappelle à plusieurs reprises que les employeurs n’exigent pas une preuve de vaccination à l’égard de ses employés, mis à part pour ceux qui travailleront auprès des clients qui en feront désormais une exigence.

Les prétentions des parties

Le syndicat plaide que les employeurs ne peuvent recueillir les informations relatives au statut vaccinal de tous leurs salariés, car ceci contreviendrait au droit fondamental au respect de leur vie privée garanti à l’article 5 de la Charte des droits et libertés de la personne (ci-après, la « Charte »).  Les employeurs soumettent, quant à eux, que cette condition, devenue une exigence normale du travail à accomplir, s’appuie sur une série d’obligations imposées, entre autres, aux employeurs et aux travailleurs en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (ci-après, la « LSST »).

PARTIE I – Collecte du statut vaccinal

D’abord, l’arbitre conclut que la demande patronale porte atteinte à l’article 5 de la Charte. Il ajoute qu’il serait également possible de considérer que cette condition porte atteinte à la liberté des salariés et, de façon incidente, à leur intégrité physique. L’arbitre rappelle cependant que la Charte intègre la possibilité que les libertés et droits d’une personne soient limités en fonctions, notamment, de l’ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec (article 9.1, alinéa 1 de la Charte). Il est d’avis que la protection du droit à la vie privée invoquée par la partie syndicale afin de s’opposer à l’exigence des employeurs ne s’impose pas au regard des valeurs démocratiques, de l’ordre public et du bien-être général des citoyens du Québec. Pour en arriver à cette conclusion, il se fonde sur les constats scientifiques actuels admis par les parties ainsi que sur les principes fondamentaux de la LSST, une loi d’ordre public. Ainsi, l’arbitre conclut donc que les employeurs peuvent recueillir les renseignements relatifs au statut vaccinal.

PARTIE II – Situation de la personne salariée refusant d’être adéquatement vaccinée

Ensuite, l’arbitre détermine les solutions à apporter à l’endroit des personnes salariées qui refuseront d’être adéquatement vaccinées et qui seront affectées à des clients exigeant l’attestation vaccinale. Pour les personnes salariées concernées par les clients formulant l’obligation vaccinale, cette condition devient une « exigence normale du travail à accomplir » au sens de la convention collective. Selon l’arbitre, c’est le mécanisme du « transfert administratif » prévu aux conventions collectives qui doit alors d’appliquer. L’arbitre écrit :

(…) la proposition patronale à l’effet que la personne non vaccinée soit considérée comme ayant abandonné son poste ou son emploi, ou qu’elle démissionne et que celle-ci soit assortie d’une inscription à la liste de rappel me semble une approche qui ne peut être retenue dans le présent contexte. Celle-ci aurait pour effet de remettre directement en jeu le lien d’emploi des personnes salariées concernées – ce qui est majeur en droit du travail – et fait abstraction, selon moi, des mécanismes de transfert prévus à la convention collective dont les objectifs généraux sont compatibles avec un maintien de l’emploi à travers une procédure détaillée qui a été négociée par les parties. (par. 117)

 

Bertrand c. Ville de Baie-Saint-Paul, 2021 QCCQ 10969

https://canlii.ca/t/jk7zn

Le 5 février 2020, le demandeur débute un emploi comme urbaniste au sein de la Ville de Baie-Saint-Paul (ci-après, « la Ville »). Le contrat verbal intervenu entre les parties est conclu pour une durée de six mois. Le 1er avril 2020, la Ville informe le demandeur qu’elle met fin prématurément à son emploi. Deux raisons sont invoquées: le retour au travail d’un urbaniste absent et le retour de l’autre urbaniste attendu prochainement ainsi que la pandémie de COVID-19, qui a entraîné la mise à pied temporaire d’une quarantaine d’employés, le non-rappel d’une vingtaine d’autres et une importante réorganisation du travail pour ceux demeurés en poste. Estimant que son contrat a été résilié sans motif quatre mois avant l’arrivée du terme, le demandeur réclame la somme de 15 000 $, qui correspond à une portion de la rémunération résiduelle du contrat.

D’abord, la Cour du Québec qualifie l’entente intervenue entre la Ville et le demandeur de contrat de travail à durée déterminée. La preuve démontre que la durée du contrat, qui était de six mois, devait être indépendante du retour au travail de l’un ou l’autre des urbanistes absents. Ce faisant, les parties étaient liées jusqu’à l’échéance du terme de six mois. Ensuite, la Cour juge que la Ville n’a pas réussi à montrer qu’elle avait un motif sérieux de résilier unilatéralement et sans préavis le contrat de travail. Notamment, la Cour souligne que la situation économique d’une entreprise ou d’une organisation n’est pas un motif sérieux permettant à l’employeur de résilier sans préavis le contrat de travail. De plus, elle précise que la pandémie de COVID-19, malgré son caractère d’imprévisibilité, ne peut être considérée comme une force majeure dégageant la Ville de ses obligations envers le demandeur. Le critère de l’irrésistibilité de la force majeure n’est non plus satisfait quant au motif lié au retour des urbanistes au travail. Le demandeur est donc en droit d’obtenir la rémunération pour une période résiduelle de son contrat, dont le montant excède largement la somme réclamée par le demandeur.

La Cour accueille la demande et ordonne à la Ville de payer la somme de 15 000$ au demandeur.

 


 

POLICIERS ET POLICIÈRES

 

Fraternité des policiers et policières de Montréal c. Montréal (Ville), 2021 CanLII 116169 (QC SAT)

https://canlii.ca/t/jkh44

Deux salariés déposent un grief amendé contestant le harcèlement psychologique dont ils se disent victime de la part de leurs supérieurs. La Fraternité demande de réunir ce grief à un autre grief dont est déjà saisi l’arbitre André Bergeron et qui porte également sur une situation de harcèlement de la part ce ces supérieurs. L’employeur s’oppose à cette réunion de grief, soumettant que le Tribunal n’a pas la compétence pour se saisir d’un grief dont un autre arbitre est déjà saisi.

Le Tribunal souligne que la question de savoir si un arbitre peut se saisir d’un dossier déjà confié à un autre arbitre n’est pas une simple question de procédure, mais de mandat; de saisine. L’article 100 du Code du travail prévoit que tout grief qui demeure en litige doit être déféré à un arbitre choisi par les parties ou à défaut d’accord, par le ministre, « en la manière prévue dans la convention collective ». Ce principe est à la base même du processus d’arbitrage fondé sur l’accord réciproque des parties quant au choix de l’arbitre.

N’eût été le fait que deux arbitres différents sont saisis chacun de l’un des deux griefs, les critères applicables à l’analyse d’une demande de réunion de dossiers seraient probablement réunis ici. Or, nous ne nous trouvons pas dans une telle situation et la marche est ainsi plus haute à franchir.

La requête en réunion de grief est rejetée.

 

Commissaire à la déontologie policière c. Girouard-Fréchette, C-2020-5215-2, décision rendue le 18 novembre 2021

Disponible sur demande.

Dans cette affaire, le Commissaire à la déontologie policière reproche à l’agent Girouard-Fréchette du Service de police de la ville de Laval d’avoir commis des gestes fondés sur la race du plaignant et de sa femme, alors que ces derniers étaient témoins d’un accident de voiture près de leur résidence. En l’espèce, le plaignant s’est rendu au milieu de la rue où l’accident a eu lieu et a refusé d’obtempérer à l’ordre de circuler. Par la suite, le plaignant a refusé de s’identifier, a résisté à son arrestation et a insulté les policiers.

En ce qui a trait aux paroles prononcées à l’égard des plaignants, la preuve est contradictoire et le policier cité nie avoir dit « on vous connaît vous autre », ainsi que « ta gueule ». Par conséquent, le Comité rejette les chefs à cet égard, puisque la preuve prépondérante n’est pas établie.

Quant au reproche d’avoir manqué de respect et de politesse, la plaignante témoigne que l’agent lui a dit : « espèce de truite » paroles qu’elle a reçues comme une insulte à son égard. Pour sa part, le policier cité admet avoir prononcé le mot « truite » et cela mérite une explication.

Une fois madame la plaignante menottée, le policier cité s’assure par une inspection visuelle qu’elle n’a pas d’armes sur elle, puis il l’amène au véhicule de police intervenu en soutien. La plaignante se calme et le policier cité lui demande pourquoi elle a gigoté comme une truite. Il reconnaît que c’est un très mauvais choix de mots et ajoute qu’il n’a jamais eu l’intention de l’insulter. Le Comité ne peut voir dans ces paroles une faute déontologique au sens de l’article 5 du Code. Ce sont des paroles maladroites, lesquelles n’ont pas le caractère d’un propos injurieux ou inconvenant.

En ce qui a trait aux citations d’arrestation, de détention et de fouille abusive, la preuve démontre que la plaignante s’approche des agents au point de leur toucher alors que l’ordre de s’éloigner est répété à plusieurs reprises. Elle refuse d’obtempérer. Elle est mise en état d’arrestation pour entrave au travail des agents. Étant mise en état d’arrestation, elle est détenue pendant un certain temps et considérant son état d’agitation, les policiers étaient justifiés de la menotter. La détention n’est ni abusive ni arbitraire.

Finalement, le Comité conclut que la plaignante s’est placée dans une situation où elle a nui au travail des policiers. Il y a absence de preuve que la force utilisée ait été plus grande que celle nécessaire. Conséquemment, le Comité conclut que l’agent Girouard-Fréchette n’a pas eu l’inconduite reprochée en vertu de l’article 6 (10) du Code.

Policier acquitté de tous les manquements.

Félicitations à Me Mario Coderre pour cette belle victoire!

 


 

TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER

 

Paquet et Services préhospitaliers Paraxion inc., 2021 QCTAT 5303

https://canlii.ca/t/jk8vz

La travailleuse est ambulancière et travaille depuis 10 ans chez l’employeur. Elle accouche le 2 mai 2019 et reçoit des indemnités du Régime québécois d’assurance parentale jusqu’au 14 mars 2020. Le 18 mars 2020, la travailleuse demande à bénéficier du programme « Pour une maternité sans danger », prévu à la Loi sur la santé et la sécurité au travail, puisqu’elle allaite son enfant et qu’elle considère que son travail comporte des dangers pour son enfant allaité. La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (ci-après, « la CNESST »), la Commission, refuse la demande par une décision où elle détermine que les conditions de travail ne comportent pas de danger pour l’enfant allaité.

La travailleuse invoque plus précisément le fait qu’il existe, dans le cadre de son travail, des dangers de nature biologique et chimique pouvant constituer un danger pour son enfant allaité en raison de la contamination possible du lait maternel. Or, le médecin désigné par la Direction de la santé publique de la région concernée ne recommande aucun retrait préventif puisque l’exposition de la travailleuse ne présenterait pas de « risque appréciable » pour l’enfant, compte tenu de la courte exposition. L’employeur n’a offert aucune réaffectation.

La travailleuse doit démontrer, à l’aide d’une preuve prépondérante, que son travail comporte des dangers pour son enfant allaité. Au sujet des dangers de nature biologiques, la travailleuse témoigne que dans le cadre de son travail, elle est amenée à traiter des personnes dont elle connait rarement les antécédents médicaux. La travailleuse précise qu’elle est en contact avec de nombreux liquides : vomissement, diarrhée, sang, salive, selles et urine. Plusieurs maladies contagieuses peuvent aussi la mettre à risque comme la méningite. Quant aux risques de nature chimique, la travailleuse explique qu’elle prodigue des soins à des blessés ou aux pompiers. Elle porte l’équipement habituel, et lorsque nécessaire, le « bunker suit ». Elle affirme se situer dans le périmètre de l’incendie et non à l’extérieur.

Le Tribunal constate que la preuve médicale est contradictoire. D’une part, le médecin traitant note la présence d’un risque infectieux et d’autre part, le médecin désigné par la Direction de la santé publique ne retient aucun risque que ce soit biologique et chimique. Le Tribunal n’est pas lié par l’un ou l’autre des avis. Il note d’abord qu’aucune étude pertinente concernant les risques auxquels la travailleuse qui allaite est exposée ni d’une possible transmission de la travailleuse à l’enfant allaité, par l’ingestion du lait maternel, n’a été déposée. Le Tribunal souligne ensuite qu’aucun médecin n’a témoigné et aucune opinion médicale n’a été produite. En somme aucune preuve n’a été présentée quant au danger pour l’enfant allaité. Selon le Tribunal, le seul témoignage de la travailleuse alléguant qu’il y a un danger pour son enfant allaité est insuffisant en l’absence d’une preuve médicale sur cet aspect.

La contestation est rejetée.

 


 

POMPIERS ET POMPIÈRES

 

Béland c. Ville de Deux-Montagnes, 2021 QCTAT 5470

https://canlii.ca/t/jkkmt

Le plaignant est un pompier ayant le statut de « temporaire » chez l’employeur, en plus d’être pompier permanent à la Ville de Montréal. Il dépose une plainte de mesures de représailles en vertu de l’article 16 du Code du travail. Il soutient que l’employeur lui a remis un avis disciplinaire écrit à la suite du dépôt d’un grief de harcèlement.

Le contexte est le suivant. Le service incendie est en restructuration : les pompiers doivent désormais travailler à temps plein. Cela suscite beaucoup de résistance de la part des pompiers qui ont une permanence à Montréal et qui travaillent à temps partiel à Deux-Montagnes. La nouvelle convention collective interdit maintenant le double statut permanent-temps partiel. Le plaignant, jusqu’alors pompier à temps partiel à Deux-Montagnes, fait le choix de devenir un pompier « temporaire ». Le climat de travail est malsain et les tensions sont vives entre les pompiers permanents et temporaires. Le 17 mars, le plaignant partage sur sa page Facebook un article intitulé : « un climat de travail toxique force vos meilleurs pompiers à quitter ». Le directeur, qui se sent personnellement attaqué et trahi, appelle le plaignant afin d’en discuter. La conversation est houleuse et, après lui avoir demandé de retirer l’article, en vient à proférer des menaces directes envers le plaignant.

Le 23 mars, le plaignant dépose une plainte de harcèlement psychologique à l’encontre du directeur. Le même jour, il dépose aussi une plainte de menaces de mort à la police. Le premier avril, le directeur est convoqué au poste de police. Une promesse de comparaître comportant des conditions est alors émise. Il ne doit pas se rendre au travail ni au domicile et au lieu d’étude du plaignant. Le 7 avril, le plaignant dépose un grief de harcèlement psychologique à l’encontre du directeur.

Le 20 avril, les conditions de la promesse de comparaître sont modifiées. Le directeur peut dorénavant se rendre à la caserne lorsque le plaignant n’est pas au travail ou lors d’une situation d’urgence majeure lorsque le plaignant est au travail. Seules les communications indirectes avec le plaignant sont permises. Le 22 avril, le directeur se rend à la caserne puisque le plaignant n’est pas prévu à l’horaire de travail. Il reçoit l’appel d’un policier lui demandant ce qu’il fait au travail. Ce dernier aurait reçu un appel du plaignant lui disant que le directeur violait les conditions de la promesse. Le directeur l’informe que les conditions ont été modifiées. On lui demande tout de même de quitter les lieux afin d’éclaircir le tout.

S’en suit un avis disciplinaire écrit remis au plaignant lui reprochant de s’être présenté au travail sans raison valable et d’avoir manqué de jugement en utilisant de manière déraisonnable et abusive les conditions émises dans le cadre de la citation à comparaître. L’employeur considère que cela constitue un manquement aux règles de bonne conduite. Un avis disciplinaire amendé est transmis le 28 mai au plaignant. L’employeur ne reproche plus au plaignant d’être entré dans la caserne, mais plutôt d’avoir communiqué avec la police après avoir vu le véhicule du directeur dans le stationnement.

Le Tribunal constate que le plaignant est un salarié qui a exercé un droit par le dépôt d’un grief et que dans la période concomitante, l’employeur lui a remis un avis disciplinaire écrit. La présomption de l’article 17 du Code du travail trouve alors application et le Tribunal doit déterminer si l’employeur a démontré une cause étrangère à l’exercice du droit protégé pour justifier cet avis disciplinaire, soit une cause qui n’est pas de nature d’un prétexte. Le Tribunal doit établir si le motif invoqué par l’employeur est réel, s’il est sérieux ou s’il camoufle un prétexte afin de maquiller une décision visant à contrer l’exercice d’un droit qui résulte du Code.

Le Tribunal conclut que la décision de l’employeur n’est pas en lien avec le dépôt d’un grief de harcèlement psychologique par le plaignant. La preuve démontre que le plaignant a communiqué avec la police lorsqu’il a vu la voiture du directeur dans le stationnement de la caserne. Il n’était pas prévu qu’il travaille et il affirme ne pas avoir été mis au courant des modifications des conditions liées à la promesse de comparaître. La directrice des ressources humaines a voulu réagir rapidement à la suite de cet incident afin de calmer le jeu. Le Tribunal précise qu’elle aurait probablement pu effectuer une enquête plus approfondie, mais que ce n’est pas son rôle de fournir des conseils ou des opinions quant aux meilleures pratiques d’enquête. L’employeur devait gérer une situation fort délicate et l’avis disciplinaire écrit qui lui a été remis n’est en aucun temps une mesure de représailles consécutive au dépôt du grief de harcèlement psychologique qu’il a déposé.

Le Tribunal rejette la plainte.

 


 

ARTISTES

Rien à signaler.

 


 

SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

 

Rien à signaler.