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Veille juridique du 9 février 2021

SECTION DROIT DU TRAVAIL 

GÉNÉRAL

 

Naadei Lyonnais c. 9355-4392 Québec inc. 2020 QCTAT 4919

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat4919/2020qctat4919.pdf

Dans cette affaire, la travailleuse est congédiée dans les semaines suivant une demande de remboursement de commission. Au début du mois de février 2018, la travailleuse réclame des sommes en lien avec des commissions dont elle prétend avoir droit. Le 13 avril, elle est congédiée. De ce fait, la travailleuse remplit les trois critères de l’article 122 de la Loi sur les normes du travail, soit être (1) un salarié (2) avoir exercé un droit prévu à la loi et (3) être congédié. Il y a donc une présomption en faveur de la travailleuse qu’elle a été congédiée pour l’exercice de son droit.

L’employeur prétend avoir congédié Mme Lyonnais pour une autre cause juste et suffisante. Il lui reproche entre autres le bris d’un ordinateur, l’omission de verrouiller les bureaux administratifs, un manque de rigueur ainsi que son comportement. Or, le tribunal constate que l’employeur ne procure aucun élément factuel en lien avec son comportement et son manque de rigueur. Il n’en demeure que l’événement avec l’ordinateur où la travailleuse a accidentellement renversé du jus sur l’appareil ainsi que l’oubli de verrouiller le bureau à son départ. Le tribunal retient la version de la travailleuse :

[21] Pour sa part, cette dernière explique avoir accidentellement renversé du jus sur l’ordinateur qui lui avait été confié par l’employeur. Elle le fait réparer et en avise celui-ci, qui lui répond d’annuler la réparation et de lui remettre l’appareil, afin qu’il puisse supprimer les données rapidement et le revendre. Elle propose alors de l’acheter, ce que l’employeur refuse. Ceci fait en sorte que la plaignante doit se procurer un nouvel ordinateur immédiatement, afin d’y transférer ses données personnelles. Elle ne comprend pas la tournure des événements, elle est émotive et elle pleure. Elle considère que son comportement était justifié compte tenu des circonstances.

[22] Le jour même, la plaignante quitte un bureau des ventes sans verrouiller la porte d’entrée ni activer le système d’alarme. Elle explique qu’elle était toujours sous le coup de l’émotion compte tenu des événements survenus plus tôt dans la journée et ajoute qu’il s’agit d’un bureau des ventes où elle n’avait pas l’habitude de travailler. Elle mentionne se souvenir précisément de ces événements étant donné qu’ils sont survenus le jour de son anniversaire.

Pour le tribunal, la sanction est à ce point disproportionnée avec la faute qu’il ne peut s’agir que d’un prétexte de congédiement. Ce faisant, l’employeur n’a pas renversé la présomption qui pèse contre lui et le congédiement est annulé.

 

Syndicat des travailleuses et travailleurs des industries manufacturières — CSN c. Béton Brunet ltée 2020 QCTAT 4654

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat4654/2020qctat4654.pdf

Depuis le mois de janvier 2020, les parties sont en négociation pour la conclusion d’une première convention collective. Peu de temps après le début des négociations, le syndicat demande aux chauffeurs opérateurs de bétonnières (les chauffeurs), d’installer un drapeau à l’effigie de la Confédération des syndicats nationaux (CSN) sur leur bétonnière pour mobiliser ses membres. L’employeur demande aux salariés de retirer les drapeaux. Lorsqu’ils ne le font pas, l’employeur les retire lui-même. Des plaintes en vertu des articles 12 et 15 du Code du travail sont déposées au Tribunal administratif du travail. Le syndicat prétend qu’il s’agit de l’entrave dans les activités du syndicat. De plus, les salariés prétendent être victimes de représailles de l’employeur. De son côté, l’employeur est d’avis qu’en vertu de son droit de propriété sur ses camions, il peut retirer les drapeaux et qu’il n’y a pas ouverture à un recours en vertu de l’article 15 C.t. puisque les salariés ne se sont pas vu imposer une mesure en lien avec l’exercice de leur droit d’association.

Le Tribunal accueille la plainte d’entrave. Selon son analyse, la liberté d’expression du syndicat doit avoir préséance sur le droit de propriété de l’employeur, lorsque le droit exercé est raisonnable et pondéré. Le syndicat avait donc le droit d’accrocher des drapeaux de la CSN sur les bétonnières de l’employeur.

Sur la question des mesures de représailles, le Tribunal constate qu’aucune mesure disciplinaire n’a été émise par l’employeur. Il n’y a eu aucune enquête disciplinaire de lancer par l’employeur. Ce faisant, le syndicat n’a pas fait la preuve de l’imposition d’une mesure au sens de l’article 15 C.t.

 

St-Martin et 2425-2264 Québec inc. (Garderie Rêve d’enfance) 2020 QCTAT 4797

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2020/2020qctat4797/2020qctat4797.pdf

Le 3 mars 2020, la salariée, éducatrice, dépose une plainte en mesure de représailles contre son employeur où allègue avoir été congédié en raison de sa participation au processus de syndicalisation. L’employeur prétend l’avoir congédiée parce qu’elle a intimidé des collègues et des parents et maltraité des enfants. Son congédiement n’a, selon lui, rien à voir avec ses activités syndicales dont il n’avait de toute façon pas connaissance.

Le congédiement survient environ une semaine après que le Syndicat ait été accrédité pour représenter « Toutes et tous les salarié-es du Code du travail » chez l’employeur. La plaignante est l’instigatrice de cette syndicalisation. On reproche à la plaignante un nombre important de plaintes à son endroit, allant de l’intimidation à la maltraitance. Les manquements invoqués se seraient perpétués dans le temps, entre 2018 et le congédiement de la plaignante en 2020. Le Tribunal mentionne que l’employeur n’a jamais entamé d’enquêtes sérieuses sur les plaintes ni sanctionné la plaignante pour certains manquements survenus en 2018 et 2020. Ainsi, l’employeur ne peut se servir d’évènements passés  et non sanctionnés pour bâtir un dossier disciplinaire contre la plaignante, cela relève du prétexte.

La plainte est accueillie et le congédiement est annulé.

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POLICIERS ET POLICIÈRES

 

Leroux et Sécurité-Policiers Ville de Montréal 2021 QCTAT 517

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2021/2021qctat517/2021qctat517.pdf

La plaignante est une policière pour la ville de Montréal ayant vécu une lésion professionnelle en 1998. À cette occasion, il en a résulté une blessure à la mâchoire qui a nécessité des traitements dentaires jusqu’à maintenant. En septembre 2017 et février 2018, la CNESST refuse le remboursement de traitements de détartrage parodontal. Les décisions sont contestées. Or, pour deux raisons distinctes, les décisions de la révision administrative (DRA) ne sont pas contestées dans les délais. D’abord, la première DRA est transmise à la plaignante à son ancienne résidence, malgré une demande de réacheminent du courriel à Postes Canada à la suite de son déménagement. Dans le deuxième cas, la DRA fut transmise au syndicat en pleine pandémie. Les bureaux étant fermés en raison des règles sanitaires du mois de mars 2020, la DRA ne fut portée à la connaissance de l’avocat qu’au mois d’avril. La plaignante est relevée de son défaut.

Sur le fond, le tribunal donne raison à la plaignante. La plaignante retient les services du Dr Poirier. S’appuyant de la littérature médicale appropriée, le Dr Poirier précise que la plaignante a reçu des implants dentaires à la suite de l’accident de 1998. Le succès des implants dépend d’un suivi assidu, notamment par des visites de détartrage parodontal aux quatre à six mois.

Félicitations à Me Julien David Hobson pour cette belle victoire!

 

Fraternité des policiers et policières de Deux-Montagnes et Régie de police du Lac des Deux-Montagnes, QCTA 2021

Sur demande seulement

Dans cette affaire, un policier temporaire est congédié après quatre ans de service continu. La convention collective exclut les agents temporaires de plusieurs protections en matière disciplinaire. La Fraternité conteste une suspension de quinze jours imposée au plaignant pour conduite téméraire d’un véhicule de police. De plus, la Fraternité conteste le congédiement du plaignant découlant de la production d’un faux rapport, d’une conduite négligente d’un véhicule de patrouille et de manque d’assiduité. L’employeur conteste la compétence de l’arbitre sur la suspension disciplinaire. La fraternité invoque d’abord que la suspension a été imposée seulement dans l’objectif de construire un dossier disciplinaire contre le plaignant puisque la sanction est survenue après les faits ayant donné naissance au congédiement. Ainsi, au moment où les faits justifiant le congédiement ont été commis, le plaignant n’avait toujours par reçu la suspension disciplinaire de quinze jours. Pour le tribunal, cela ne constitue pas un abus du droit de gérance et s’explique par les délais d’enquête et de convocation disciplinaire. Puisque le délai n’est pas déraisonnable, l’arbitre n’y voit pas de mauvaise foi de l’employeur et maintient la suspension.

En ce qui concerne le congédiement, il est maintenu par le tribunal. Deux manquements sont retenus, soit la production d’un faux rapport et la conduite négligente.

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TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER

 

Cinq-Mars et C.T.A.Q, QCTAT 2021

(Sur demande seulement)

Cette décision représente le premier cas de retrait préventif d’un paramédic en lien avec les risques d’exposition au virus de la COVID-19 pour un travailleur immunomodulé.

Le travailleur, atteint de la maladie de Crohn, exerce des fonctions de paramédic. Ses médecins recommandent de l’affecter à une tâche ne comportant pas de risques d’exposition au coronavirus. Puisque son employeur ne possède aucun poste disponible respectant cette recommandation, le travailleur fait une réclamation pour un retrait préventif, en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Cette réclamation est refusée par la CNESST au motif que le travailleur ne présente aucun signe d’altération de son état de santé. Le tribunal renverse cette décision. Pour le juge administratif, un travailleur n’a pas à démontrer une altération de son état, puisqu’une telle interprétation dénature le rôle préventif de la loi.

ICI, vous trouverez une analyse détaillée de la décision par notre collègue Me Stéphanie Bouchard.

 

Blouin Sirois c. Ambulance Sacré-Cœur 2021 QCCA 151

https://www.canlii.org/fr/qc/qcca/doc/2021/2021qcca151/2021qcca151.pdf

Devant la Cour d’appel, l’appelante prétend que le TAT-SST a erré en droit en concluant qu’elle n’avait pas subi un événement imprévu et soudain par la transmission d’un avis disciplinaire. L’appelante témoigne dans un dossier impliquant d’autres salariés. À la suite de son témoignage, elle reçoit un avis disciplinaire dans lequel l’employeur l’accuse d’avoir menti pendant son témoignage et d’avoir discrédité l’entreprise. La plaignante dépose une plainte en vertu de l’article 15 du Code du travail. Le TAT reconnaît que l’avis disciplinaire constitue une mesure de représailles et annule l’avis.

En parallèle, l’appelante se fait diagnostiquer un trouble d’adaptation avec humeur anxieuse en lien avec l’événement. Elle s’absente du travail et fait une réclamation à la CNESST. La réclamation est refusée devant l’ensemble des instances où l’appelante s’est adressée. L’argument de l’appelante est à l’effet que la CNESST ne pouvait décider que l’avis disciplinaire ne constituait pas un événement imprévu et soudain.  Le TAT a préalablement déterminé qu’il s’agit d’une mesure de représailles au sens du Code du travail. Pour l’appelante, cette qualification du comportement de l’employeur sous-tend qu’il s’agit d’un abus du droit de gérance. La Cour d’appel, s’appuyant sur l’arrêt Durocher, conclut que les champs de compétence du TAT-SST et du TAT ne sont pas les mêmes. Conséquemment, le TAT-SST n’était pas soumis à la détermination qu’en a faite le TAT dans le cadre de la mesure de représailles. Au surplus, la Cour d’appel rappelle que le TAT-SST a aussi déterminé que l’événement n’était pas objectivement traumatisant.

Pour ces raisons, la Cour d’appel rejette l’appel.

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POMPIERS ET POMPIÈRES

Rien à signaler.

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ARTISTES

Rien à signaler.

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SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

La Reine c. Christian Gilbert

(Décision non-disponible en raison d’une ordonnance de non-publication et non-diffusion)

Dans cette décision, le juge Yvan Poulin de la Cour du Québec prononce l’acquittement de monsieur Christian Gilbert, policier au SPVM membre du groupe d’intervention tactique (GTI), du chef d’homicide involontaire coupable de Bony Jean-Pierre.

Les faits ayant donné lieu au dépôt de l’accusation se sont produits en mars 2016 lors de l’exécution d’un mandat de perquisition par le groupe d’intervention tactique. Lors de cette intervention, monsieur Jean-Pierre avait tenté de fuir le lieu de la perquisition en sautant par la fenêtre de la chambre. Monsieur Gilbert avait remarqué que monsieur Jean-Pierre tentait de s’enfuir et il décide de tirer un premier projectile de plastique sur le cadrage de la fenêtre afin de l’en dissuader. Ce tir atteint précisément la cible mais n’a pas l’effet escompté. L’agent Gilbert constate que monsieur Jean-Pierre poursuit sa manœuvre et grimpe sur le cadrage de la fenêtre en position accroupie afin de sauter en bas de l’immeuble. Devant cette situation, l’agent Gilbert vise la hanche de monsieur Jean-Pierre et tire un second projectile de plastique. Monsieur Jean-Pierre saute en bas au même moment où l’agent Gilbert tire le second projectile en visant sa hanche. C’est dans ce contexte que ce second projectile atteint la tête de monsieur Jean-Pierre. Ce dernier décèdera quelques jours plus tard.

Le juge Poulin de la Cour du Québec fait d’abord la revue des dispositions législatives pertinentes, à savoir les articles 25, 26 et 222 et 234 du Code criminel. Il rappelle également que les agents de la paix sont légitimés d’utiliser la force raisonnable et nécessaire dans le cadre de leur pouvoir d’application de la loi. En appliquant ces principes au cas en l’espèce, le juge Poulin retient le témoignage de l’agent Gilbert quant aux circonstances qui l’amènent à tirer un projectile de plastique à la hanche de monsieur Jean-Pierre pour stopper sa fuite. Au vu de toutes les circonstances, il a été démontré qu’il visait une « zone verte » et qu’il avait une fenêtre d’opportunité lui permettant de le repousser à l’intérieur. Il convient de rappeler que les évènements se déroulent extrêmement vite et que les agents doivent réagir rapidement devant la résistance active de monsieur Jean-Pierre et le danger potentiel qu’il représente. En raison de toutes les circonstances, il est avéré que l’utilisation de l’arme intermédiaire dans une zone verte constituait la seule option valable. Après analyse de toute la preuve, le ministère public n’a pas démontré hors de tout doute raisonnable que l’agent Gilbert a utilisé une force excessive à l’endroit de monsieur Jean-Pierre lors de l’intervention policière du 31 mars 2016.

L’accusé est acquitté. 

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