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Veille juridique du 9 novembre 2021

SECTION DROIT DU TRAVAIL

GÉNÉRAL

 

Petit-Frère c. Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec inc., 2021 QCTAT 3544

https://www.canlii.org/fr/qc/qctat/doc/2021/2021qctat3544/2021qctat3544.pdf

Dans cette affaire, la plaignante dépose, le 6 décembre 2019, une plainte contre son syndicat pour avoir manqué à son devoir de juste représentation conformément à l’article 47.2 du Code du travail (ci-après « CT »). Elle leur reproche notamment d’avoir refusé de la représenter dans le cadre d’une plainte en 15 CT déposée le 25 janvier 2019 à l’encontre de l’employeur pour une mesure de représailles. Le Syndicat, conteste la plainte, en soulevant deux moyens préliminaires : la prescription et l’irrecevabilité. En effet, il est d’avis que la plainte est hors délai et que la plainte en 15 CT ne fait pas partie de son devoir de représentation.

Au regard du premier moyen préliminaire, le Tribunal est saisi des deux questions en litige suivantes :

    1. La plainte a-t-elle été déposée dans le délai prévu à l’article 47.5 du Code?
    2. Si tel n’est pas le cas, la plaignante a-t-elle un motif raisonnable de ne pas avoir respecté le délai prescrit qui permettrait au Tribunal de la relever de son défaut?

En réponse à la première question, le Tribunal estime que la plainte en 47.2 CT est hors délai à la face même de la preuve. En effet, la plaignante affirme avoir reçu un courriel le 8 avril 2019 suivi d’une lettre le 10 avril 2019 confirmant le refus du Syndicat de la représenter dans son recours. Le délai de prescription, tel que le prévoit l’article 47.2 CT, prend fin dans les six mois de la connaissance de l’agissement dont le salarié se plaint. La plaignante avait donc jusqu’au 8, voire au 10 octobre 2019, pour déposer sa plainte.

Concernant la deuxième question, la plaignante impute son délai d’agir à la relation qu’elle entretient avec le syndicat et de son ignorance face à l’existence du recours en 47.2 CT. En effet, elle prétend qu’en avril 2019, elle avait encore espoir que son syndicat reviendrait sur sa décision vue que sa relation avec lui existait toujours. Toutefois, ce n’est qu’en septembre 2019, lors de sa fin d’emploi, que son lien avec le syndicat a été rompu. Le Tribunal rejette ce premier motif compte tenu du fait que le Syndicat a continué de représenter la plaignante dans trois griefs malgré sa fin d’emploi. Donc, le lien n’a jamais été rompu. Il rejette également le deuxième motif, car l’ignorance de la loi ne peut être une défense valable pour être relevé de son défaut d’agir.

Pour ces motifs, le Tribunal rejette la plainte.

 


 

POLICIERS ET POLICIÈRES

 

Cavalière c. Association de bienfaisance et de retraite des policiers et policières de la Ville de Montréal, 2021 QCCQ 8260

https://www.canlii.org/fr/qc/qccq/doc/2021/2021qccq8260/2021qccq8260.pdf

Dans cette affaire, le policier Cavalière intente une action devant la Cour du Québec afin de réclamer le versement d’une indemnité pour préjudice corporel à l’Association de bienfaisance et de retraite des policiers et policières de la Ville de Montréal (ci-après « l’Association »). Il réclame, également, solidairement à l’Association et la Fraternité des policiers et policières de la Ville de Montréal (ci-après « Fraternité »), le remboursement des honoraires d’avocats engagés.

Les faits sont les suivants : le policier a subi un grave accident au travail en 2005. Il reçoit, jusqu’en 2013, une indemnité de remplacement de revenu de la CNESST et de son employeur. En 2013, il est mis à la retraite anticipée. À partir de cette date, c’est l’Association qui lui verse une rente d’invalidité professionnelle totale et permanente. En 2015, la CNESST verse au policier à titre d’indemnité pour préjudice corporel, une somme forfaitaire en vertu de la LATMP. En 2016, ayant été mise au courant de ce versement, l’Association suspend temporairement le versement de la rente jusqu’à concurrence du montant versé par la CNESST. Le versement de la rente est repris en 2017.

Au soutien de ses prétentions, le policier allègue que l’Association a fait une mauvaise application de la loi et que la rente doit s’ajouter au montant de l’indemnité pour préjudice corporel versé par la CNESST. Il ajoute également que l’Association et de la Fraternité ont été complices et de mauvaise foi dans la gestion de son dossier.

Dans sa décision, concernant le versement de le la rente, la Cour reprend le libellé de l’article 7.09 du Règlement du régime de retraite des policiers et policières de la Ville de Montréal (ci-après « RRPM ») qui prévoit que

[12] Selon l’article 7.09, la rente cesse d’être versée si le Policier reçoit une prestation payable en vertu de la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP), sous forme de montant unique « jusqu’à la date à laquelle la somme des montants périodiques non versés atteint ce montant unique ». Le RRPM ne distingue pas la prestation payable à titre d’indemnité de remplacement de revenu et l’indemnité pour préjudice corporel.

Elle ajoute également que le RRPM ne vise pas l’enrichissement du prestataire, ce qui explique la « restriction quant au cumul des prestations payables en vertu du régime de retraite et en vertu des régimes publics ou législations sociales.»

Concernant les allégations de mauvaise foi et de collusion, la Cour, avec égard pour l’opinion contraire, ne peut souscrire à ces prétentions. Rien dans la preuve ne révèle que les défenderesses ont agi de façon déraisonnable ou dans l’intention de nuire au policier. Au contraire, la preuve est à l’effet que l’Association a agi de manière tout à fait indépendante de la Fraternité. Qui plus est, le policier a fait défaut de démontrer que la Fraternité a manqué à son devoir de juste représentation.

Pour ces motifs, la Cour rejette la demande du policier.

 

Fraternité des policiers et policières de Repentigny et Ville de Repentigny, 2021 CanLII 111068 (QC SAT)

https://canlii.ca/t/jk72b

Dans cette affaire, la Fraternité des policiers et policières de Repentigny (ci-après « Fraternité ») dépose un grief contestant la décision de l’employeur d’annuler l’assignation temporaire de Mme Gignac au poste d’agent sociocommunautaire qu’elle occupe depuis 2 ans et de la retirer de la liste d’éligibilité. L’employeur prétend que Mme Gignac nuisait au climat de travail ce qui impactait la prestation et l’exécution du travail dans sa section. La Fraternité est d’avis que la décision administrative de l’employeur s’assimile à une rétrogradation et que ce dernier n’a pas respecté les critères jurisprudentiels applicables dans une telle situation.

Dans un premier temps, dans sa décision, le Tribunal réitère le cadre juridique applicable. Il mentionne qu’en matière de mesure administrative, les arbitres de grief doivent faire preuve d’une grande déférence à l’égard des décisions de nature administrative prises par l’employeur. Ils ne peuvent intervenir que dans la mesure où le syndicat démontre de manière prépondérante le caractère abusif, discriminatoire, arbitraire ou déraisonnable de la décision. Le Tribunal reprend, également, les critères établis par la Cour d’appel dans l’affaire Costco Wholesale Canada Ltd, 2005 ACCA 788, qui permettent d’examiner le comportement de l’employeur dans l’imposition d’une mesure administrative et qui vont comme suit:

1) Le salarié doit connaître les politiques de l’entreprise et les attentes fixées par l’employeur à son égard;

2) Ses lacunes lui ont été signalées;

3) Il a obtenu le support nécessaire pour se corriger et atteindre ses objectifs;

4) Il a bénéficié d’un délai raisonnable pour s’ajuster;

5) Il a été prévenu des risques de mesures et des conséquences à défaut d’amélioration de sa part.

Dans un deuxième temps, le Tribunal rejette les prétentions de l’employeur à l’effet que son obligation d’assurer un climat de travail sain permet d’assouplir à son endroit l’application des critères établis dans Cotsco. Il ajoute que rien dans la jurisprudence, à moins de circonstances exceptionnelles ce qui n’est pas le cas en l’occurrence, ne permet d’appuyer ces prétentions.

Dans un troisième temps, le Tribunal analyse le litige au regard des 5 critères jurisprudentiels. Il estime que seul le premier critère a été respecté par l’employeur. En effet, il a été mis en preuve que la policière a été rencontrée avant son entrée en fonction et informée des attentes de l’employeur face à son travail et sa conduite.

Relativement au deuxième critère, la policière n’a jamais été informée des lacunes ou inconduites reprochées. Sa mi-évaluation en 2006 ne rapporte rien de problématique, bien au contraire. Les lacunes sont plutôt ressorties dans une évaluation de 2017 qui ne peut être prise en compte, vu qu’elle n’a jamais été soumise à la salariée.

Considérant ce qui précède, le non-respect du second critère entraîne irrémédiablement le non-respect des suivants.

Pour ces motifs, le grief est accueilli.

Nous tenons à féliciter l’excellence du travail de Me Sophia Rossi dans ce dossier !

 


 

TRAVAILLEURS(EUSES) DU PRÉHOSPITALIER

Rien à signaler.

 


 

POMPIERS ET POMPIÈRES

 

Lanteigne c. Municipalité de Morin-Heights., 2021 QCTAT 5235

https://canlii.ca/t/jk6q5

Dans cette affaire, M. Lanteigne est président du syndicat des pompiers qui œuvrent dans le service incendie de la municipalité de Morin-Heights. Il dépose une plainte en 15 du Code du travail pour avoir reçu une mesure disciplinaire, soit un avertissement écrit en raison de ses fonctions syndicales.

Les faits s’inscrivent dans un contexte de relations de travail tendu en raison de l’application de la première convention collective signée entre les parties. Plusieurs griefs autant patronaux que syndicaux seront déposés depuis l’année 2018. Dans la foulée de ces griefs, plusieurs reproches et griefs provenant du syndicat auront été déposés à l’encontre du directeur du service incendie. Ce dernier déposera donc une plainte en harcèlement psychologique en 2018 à l’encontre du président du syndicat, soit le plaignant. En 2019, une vingtaine de griefs auront été réglés. Durant l’année 2020, pendant la période d’urgence sanitaire, le syndicat continuera de déposer des griefs à l’encontre du directeur de service pour sa mauvaise gestion.  En octobre 2020, le plaignant critique, dans une correspondance à l’attention du directeur général, une intervention du directeur du service incendie. Il communique également avec le directeur général pour fixer une rencontre afin de discuter de l’intervention du directeur incendie. Ce dernier, ayant été mis au courant de la correspondance, souhaite réactiver sa plainte en harcèlement.  Le jour de la rencontre, le directeur général informe le plaignant qu’une enquête sera enclenchée, car le directeur a réactivé sa plainte. Le plaignant mécontent que la rencontre ne porte pas sur ce qui était initialement planifié, rétorque en traitant le directeur général et la ville de « chicken » et « pissou » parce qu’ils ne vont jamais jusqu’au bout de leur recours et se désistent toujours vers la fin.  Le lendemain, le plaignant reçoit un avertissement écrit de l’employeur.

Dans sa décision, le TAT considère qu’étant donné que l’employeur a tenu compte du statut syndical du plaignant dans l’octroi de la mesure disciplinaire, en mentionnant notamment dans l’avis écrit que son poste syndical « commande un devoir d’exemplarité », sa décision d’octroyer une mesure disciplinaire est viciée. Pour renverser la présomption prévue à l’article 17 du Code du travail, l’employeur doit faire la preuve d’une autre cause juste et suffisante. Or, le seul fait de considérer le statut syndical d’un salarié dans l’octroi d’une mesure contamine la procédure et ne permet pas de renverser la présomption.

Pour ces motifs, le TAT accueille la plainte.

Félicitation à Me Andrew Charbonneau pour son excellent travail dans ce dossier !

 


 

SECTION DROIT CRIMINEL

GÉNÉRAL

R. c. Fréchette, 500-01-201638-209, Cour du Québec

Disponible sur demande

Dans cette affaire, le policier Roger Fréchette faisait face à une accusation d’avoir agressé sexuellement la plaignante, E.A. Le 18 février 2019, Monsieur Fréchette terminait son quart de travail à 5 :30 du matin et avait un rendez-vous médical à 8h30 le matin. Après son quart de travail au centre de détention, monsieur Fréchette avait attendu la plaignante, incarcérée pendant le quart de travail de ce dernier, et l’avait aidé à retrouver son hôtel. Par la suite, monsieur Fréchette était entré dans la chambre d’hôtel de la plaignante et celle-ci alléguait que monsieur Fréchette s’était livré à des attouchements non-consensuels sur sa personne. Au procès, l’accusé niait cette version des faits et alléguait plutôt que c’était la plaignante qui l’avait agressé sexuellement en plaçant sa main sur son pénis alors qu’il était assis sur le lit.

Dans son jugement, la juge Weitzman de la Cour du Québec analyse le témoignage de l’accusé et rejette sa version, qu’elle juge non-crédible. En outre, la juge estime qu’il est non-plausible que l’accusé se soit présenté à la chambre d’hôtel de la plaignante sans avoir l’intention d’avoir des relations sexuelles, puisque la preuve révèle que l’accusé a demandé au commis de l’hôtel combien de temps il pouvait laisser son véhicule garé devant l’endroit.

Néanmoins, la version de la plaignante comporte de sérieuses lacunes de fiabilité. En effet, la preuve révèle que cette dernière était dans un stade d’intoxication avancée et qu’elle souffrait de troubles de stress post-traumatique qui lui cause des trous de mémoire. De plus, la plaignante s’est fracassé la tête sur le mur de la détention à deux reprises. En somme, la juge est d’avis que la version de la plaignante n’est pas fiable en raison d’importantes divergences et de faits qui sont niés par des témoins indépendants.

En somme, la juge conclut que la preuve de la culpabilité de l’accusé sur l’agression sexuelle n’a pas été faite hors de tout doute raisonnable. Par conséquent, monsieur Fréchette est acquitté.

Toutes nos félicitations à Me Félix R. Larose pour cette victoire dans ce dossier!

 

R. c. Dulac, 635-01-019198-200, Cour du Québec, 3 novembre 2021

Disponible sur demande

Dans cette affaire, l’agent Daniel Dulac était accusé d’avoir braqué son arme de service et de s’être livré à des voies de fait sur le plaignant, un détenu à Kativik le 22 septembre 2019. L’agent Dulac avait procédé à l’arrestation du plaignant et, à la fin de son quart de travail, il avait croisé son collègue, l’agent Paiement. En rentrant au poste vers 6h, l’agent Paiement demande à l’accusé comment s’est passée la garde du détenu. La réponse que lui donne l’accusé, c’est que le détenu a fait du bruit jusqu’à 5h, après quoi il n’y a plus eu un son; que lui, l’accusé, a pointé son arme à travers la porte sur le détenu et qu’il espère que la caméra ne fonctionnait pas; mais que de toute façon, comme le détenu était intoxiqué, il ne se rappellerait probablement pas ce qui s’est passé, car il devait être « sur la drogue ou autre chose ».

Le juge Paul Chevalier acquitte l’accusé sur le chef de voies de fait. Selon le juge, lors du témoignage du plaignant, il affirme avoir reçu trois coups de pied, lors de sa déclaration il en mentionne seulement deux. L’accusé nie ces gestes qu’on lui reproche. La crédibilité toute relative accordée au témoignage du plaignant amène le juge à conclure que la preuve n’établit pas hors de tout doute raisonnable que l’accusé s’est porté à des voies de fait sur le plaignant.

En ce qui a trait au chef d’avoir braqué une arme à feu, le plaignant accuse aussi M. Dulac d’avoir pointé son arme de service en sa direction, ce que nie l’accusé. Si la preuve ne résidait que dans le témoignage du plaignant, la conclusion du tribunal serait différente, mais cette accusation est confirmée par le témoignage de l’agent Paiement, qui affirme que l’accusé lui a mentionné avoir effectivement pointé son arme en direction du détenu pendant la nuit.

L’accusé est acquitté sur le chef de voies de fait, mais déclaré coupable d’avoir braqué une arme à feu.

Félicitations à Me Genesis R. Diaz pour son travail dans ce dossier.