Dans ce dossier, on se demande dans quelle circonstances un employeur peut recourir à de la sous-traitance pour remplir des besoins en termes de main d’œuvre alors que cela est strictement interdit par la convention collective applicable.
À l’automne 2023, dans le dossier Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce, section locale 501 et Taxis Coop Québec 525-5191 (grief collectif), 2024 QCTA 196 (a. Me Martin Racine – 7 mai 2024 – disponible sur SOQUIJ), le syndicat dépose plusieurs griefs contestant une pratique de l’employeur. Le syndicat demande donc à ce dernier, Taxis Coop Québec, de cesser de confier à un tiers du travail ou une partie de travail de l’unité de négociation. Le syndicat représente notamment les répartiteurs, soit les salariés qui répondent aux besoins de la clientèle.
Selon le syndicat, le fait d’avoir recours à la sous-traitance contrevient directement à une clause de la convention collective qui prévoit que l’employeur ne peut pas confier à un tiers du travail ou une partie de travail de l’unité de négociation. De son côté, l’employeur reconnait avoir eu recours à la sous-traitance et indique ne pas avoir eu le choix de le faire, puisqu’il n’était pas en mesure de recruter et de conserver à son emploi des salariés capables d’effectuer le travail de répartiteur, et ce, malgré ses efforts.
Le tribunal d’arbitrage doit donc déterminer si les dispositions de la convention collective interdisent à l’employeur d’avoir recours à la sous-traitance pour les tâches effectuées par les salariés de l’unité d’accréditation.
Selon l’arbitre, la clause 1.04 interdisant à l’employeur d’accorder tout contrat pour le travail effectué par ses salariés est claire et ne nécessite aucune interprétation. Pour ce qui est de la clause 2.06, celle-ci prévoit les exceptions pour lesquelles l’employeur peut confier du travail à des tiers. Parmi celles-ci, il y est notamment prévu les cas de surplus de travail ou lorsqu’il y a un nombre insuffisant de salariés désirant effectuer du temps supplémentaire.
Cependant, les raisons invoquées par l’employeur pour recourir à la sous-traitance n’entrent dans aucune des exceptions précédemment mentionnées. Par ailleurs, l’arbitre rappelle que l’employeur a une obligation de résultat par rapport aux obligations qui découlent de la convention collective. Il n’est donc pas possible d’y déroger, à moins d’être dans l’impossibilité d’agir. La jurisprudence définit cette notion comme suit : « L’impossibilité d’agir impose au débiteur d’aller au-delà d’efforts ordinaires ou de la diligence pour tenter d’exécuter son obligation. »
Or, bien que l’employeur soumette avoir fourni des efforts soutenus et d’avoir multiplié ses démarches pour recruter le personnel manquant, la preuve ne démontre pas une réelle impossibilité d’agir, tel que l’entend la définition.
Le tribunal d’arbitrage accueille en partie les griefs et ordonne à l’employeur de cesser de faire exécuter du travail de répartiteur par des personnes n’étant pas des salariés régis par la convention collective.
Text