Dans la décision Syndicat des employé-e-s de métiers d’Hydro-Québec, section locale 1500 SCFP-FTQ et Hydro-Québec, 23 mai 2024, T.A. – disponible sur demande (a. André G. Lavoie), plaidée par Me Alexandre Grenier, associé principal au sein de notre cabinet, le syndicat conteste la décision de l’employeur d’implanter une garde obligatoire.
La décision soulève une question d’interprétation et d’application de dispositions conventionnées. La lettre d’entente G11 se trouve au cœur de l’analyse. Celle-ci prévoit la mise en place d’une équipe de garde, laquelle s’articule autour d’une mécanique assurant la disponibilité du personnel, afin de réaliser les travaux de rétablissement du réseau de distribution, incluant les situations d’urgence.
La question soulevée par les parties est la suivante : l’employeur pouvait-il, tenant compte du contexte et de ses obligations, imposer une garde obligatoire, conformément aux dispositions de la lettre d’entente G11?
Selon cette lettre d’entente, les monteurs ne sont pas tenus d’offrir des disponibilités. On y consacre plutôt le principe de volontariat. De plus, l’article 5.3 de la lettre d’entente prévoit les cas où l’absence de volontaire a pour effet de créer un bris de couverture du service de rétablissement. Dans ce cas, il faut, dans un premier temps, effectuer une rencontre paritaire afin de déterminer les modalités nécessaires pour permettre que la garde soit assurée. Dans un deuxième temps, selon l’article 5.3.2, la Direction peut prendre les actions appropriées pour réaliser les interventions lors du rétablissement de service. Selon l’employeur, ces actions incluent l’imposition d’une garde obligatoire aux monteurs.
Or, selon l’interprétation de l’arbitre, le texte ne donne pas ouverture au droit de direction de l’employeur et ne lui permet aucunement de contrevenir au principe de volontariat de la lettre d’entente G11, en rendant les gardes obligatoires. S’il est vrai que l’article 5.3.2 accorde une discrétion à l’employeur, quant au choix des actions appropriées, il ne peut contrevenir à l’esprit de la lettre d’entente G11. L’arbitre rappelle que cette lettre d’entente constitue une mesure d’exception qui, dès lors, doit recevoir une interprétation restrictive.
L’arbitre souligne que si les parties avaient voulu que les actions appropriées dont dispose l’employeur lui permettent de modifier les conditions de la lettre d’entente et de se soustraire au principe de volontariat, elles l’auraient écrit. Le fait que l’employeur soit soumis à des obligations particulières, notamment en vertu du Plan national de sécurité civil, ne devrait pas lui permettre de contrevenir aux dispositions de la convention collective, dûment négociée et convenue par les parties.
L’arbitre accueille donc le grief et ordonne à l’employeur de cesser immédiatement l’imposition de toute garde obligatoire.
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